Différents traités internationaux  (2° partie)

            =>    voir le site du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (ensemble des traités) : 
                          http://www.ohchr.org/french/law/

Traités importants :

Charte internationale des droits de l'homme

o Déclaration universelle des droits de l´homme - DUDH

o Pacte international relatif aux droits civils et politiques

o Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels

Crimes de guerre et crimes contre l'humanité y compris le génocide

o Principes de la coopération internationale en ce qui concerne le dépistage, l'arrestation, l'extradition et le châtiment des individus coupables de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité

o Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre

Défenseurs des droits humains

o Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus

o Déclaration de Paris / Projet final soumis pour adoption aux états généraux des défenseurs des droits humains

Droit humanitaire

o Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre du 12 août 1949

o Convention de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre

o Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 (Protocole I)

o Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 (Protocole II)

Droits de l'enfant

o Convention relative aux droits de l'enfant

Droits des femmes

o Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes

o Convention sur les droits politiques de la femme

o Déclaration sur la protection des femmes et des enfants en période d'urgence et de conflit armé

o Déclaration sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes

Esclavage, servitude, travail forcé et institutions et pratiques analogues

o Convention relative à l'esclavage

o Convention sur l'abolition du travail forcé

o Convention sur le travail forcé

La Lutte contre la discrimination

o Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale

o Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid

o Déclaration sur la race et les préjugés raciaux

o Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction

Les droits de l'homme dans l'administration de la justice

o Code de conduite pour les responsables de l'application des lois

o Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

o Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

o Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement

o Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus

o Garanties pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort

o Principes d'éthique médicale applicables au rôle du personnel de santé, en particulier des médecins, dans la protection des prisonniers et des détenus contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

o Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus

Liberté d'association

o Convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical

Documents du Conseil de l’Europe

o Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

o Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradant


Droits de l'enfant

o Convention relative aux droits de l'enfant


Droits des femmes

Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes

Adoptée et ouverte à la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'Assemblée générale dans sa résolution 34/180 du 18 décembre 1979
Entrée en vigueur : le 3 septembre 1981, conformément aux dispositions de l'article 27 (1)

 
Les Etats parties à la présente Convention,

Notant que la Charte des Nations Unies réaffirme la foi dans les droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine et dans l'égalité des droits de l'homme et de la femme,

Notant que la Déclaration universelle des droits de l'homme affirme le principe de la non-discrimination et proclame que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit, et que chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés qui y sont énoncés, sans distinction aucune, notamment de sexe,

Notant que les Etats parties aux Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme ont l'obligation d'assurer l'égalité des droits de l'homme et de la femme dans l'exercice de tous les droits économiques, sociaux, culturels, civils et politiques,

Considérant les conventions internationales conclues sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies et des institutions spécialisées en vue de promouvoir l'égalité des droits de l'homme et de la femme,

Notant également les résolutions, déclarations et recommandations adoptées par l'Organisation des Nations Unies et les institutions spécialisées en vue de promouvoir l'égalité des droits de l'homme et de la femme,

Préoccupés toutefois de constater qu'en dépit de ces divers instruments les femmes continuent de faire l'objet d'importantes discriminations,

Rappelant que la discrimination à l'encontre des femmes viole les principes de l'égalité des droits et du respect de la dignité humaine, qu'elle entrave la participation des femmes, dans les mêmes conditions que les hommes, à la vie politique, sociale, économique et culturelle de leur pays, qu'elle fait obstacle à l'accroissement du bien-être de la société et de la famille et qu'elle empêche les femmes de servir leur pays et l'humanité dans toute la mesure de leurs possibilités,

Préoccupés par le fait que, dans les situations de pauvreté, les femmes ont un minimum d'accès à l'alimentation, aux services médicaux, à l'éducation, à la formation, ainsi qu'aux possibilités d'emploi et à la satisfaction d'autres besoins,

Convaincus que l'instauration du nouvel ordre économique international fondé sur l'équité et la justice contribuera de façon significative à promouvoir l'égalité entre l'homme et la femme,

Soulignant que l'élimination de l'apartheid, de toutes les formes de racisme, de discrimination raciale, de colonialisme, de néocolonialisme, d'agression, d'occupation et domination étrangères et d'ingérence dans les affaires intérieures des Etats est indispensable à la pleine jouissance par l'homme et la femme de leurs droits,

Affirmant que le renforcement de la paix et de la sécurité internationales, le relâchement de la tension internationale, la coopération entre tous les Etats quels que soient leurs systèmes sociaux et économiques, le désarmement général et complet et, en particulier, le désarmement nucléaire sous contrôle international strict et efficace, l'affirmation des principes de la justice, de l'égalité et de l'avantage mutuel dans les relations entre pays et la réalisation du droit des peuples assujettis à une domination étrangère et coloniale et à une occupation étrangère à l'autodétermination et à l'indépendance, ainsi que le respect de la souveraineté nationale et de l'intégrité territoriale favoriseront le progrès social et le développement et contribueront par conséquent à la réalisation de la pleine égalité entre l'homme et la femme,

Convaincus que le développement complet d'un pays, le bien- être du monde et la cause de la paix demandent la participation maximale des femmes, à égalité avec les hommes, dans tous les domaines,

Ayant à l'esprit l'importance de la contribution des femmes au bien-être de la famille et au progrès de la société, qui jusqu'à présent n'a pas été pleinement reconnue, de l'importance sociale de la maternité et du rôle des parents dans la famille et dans l'éducation des enfants et conscients du fait que le rôle de la femme dans la procréation ne doit pas être une cause de discrimination et que l'éducation des enfants exige le partage des responsabilités entre les hommes, les femmes et la société dans son ensemble,

Conscients que le rôle traditionnel de l'homme dans la famille et dans la société doit évoluer autant que celui de la femme si on veut parvenir à une réelle égalité de l'homme et de la femme,

Résolus à mettre en oeuvre les principes énoncés dans la Déclaration sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes et, pour ce faire, à adopter les mesures nécessaires à la suppression de cette discrimination sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations,

Sont convenus de ce qui suit :

Première partie

Article premier

Aux fins de la présente Convention, l'expression "discrimination à l'égard des femmes" vise toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le sexe qui a pour effet ou pour but de compromettre ou de détruire la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice par les femmes, quel que soit leur état matrimonial, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel et civil ou dans tout autre domaine.

Article 2

Les Etats parties condamnent la discrimination à l'égard des femmes sous toutes ses formes, conviennent de poursuivre par tous les moyens appropriés et sans retard une politique tendant à éliminer la discrimination à l'égard des femmes et, à cette fin, s'engagent à :

a) Inscrire dans leur constitution nationale ou toute autre disposition législative appropriée le principe de l'égalité des hommes et des femmes, si ce n'est déjà fait, et assurer par voie de législation ou par d'autres moyens appropriés l'application effective dudit principe;

b) Adopter des mesures législatives et d'autres mesures appropriées assorties, y compris des sanctions en cas de besoin, interdisant toute discrimination à l'égard des femmes;

c) Instaurer une protection juridictionnelle des droits des femmes sur un pied d'égalité avec les hommes et garantir, par le truchement des tribunaux nationaux compétents et d'autres institutions publiques, la protection effective des femmes contre tout acte discriminatoire;

d) S'abstenir de tout acte ou pratique discriminatoire à l'égard des femmes et faire en sorte que les autorités publiques et les institutions publiques se conforment à cette obligation;

e) Prendre toutes mesures appropriées pour éliminer la discrimination pratiquée à l'égard des femmes par une personne, une organisation ou une entreprise quelconque;

f) Prendre toutes les mesures appropriées, y compris des dispositions législatives, pour modifier ou abroger toute loi, disposition réglementaire, coutume ou pratique qui constitue une discrimination à l'égard des femmes;

g) Abroger toutes les dispositions pénales qui constituent une discrimination à l'égard des femmes.

Article 3

Les Etats parties prennent dans tous les domaines, notamment dans les domaines politique, social, économique et culturel, toutes les mesures appropriées, y compris des dispositions législatives, pour assurer le plein développement et le progrès des femmes, en vue de leur garantir l'exercice et la jouissance des droits de l'homme et des libertés fondamentales sur la base de l'égalité avec les hommes.

Article 4

1. L'adoption par les Etats parties de mesures temporaires spéciales visant à accélérer l'instauration d'une égalité de fait entre les hommes et les femmes n'est pas considérée comme un acte de discrimination tel qu'il est défini dans la présente Convention, mais ne doit en aucune façon avoir pour conséquence le maintien de normes inégales ou distinctes; ces mesures doivent être abrogées dès que les objectifs en matière d'égalité de chances et de traitement ont été atteints.

2. L'adoption par les Etats parties de mesures spéciales, y compris de mesures prévues dans la présente Convention, qui visent à protéger la maternité n'est pas considérée comme un acte discriminatoire.

Article 5

Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour :

a) Modifier les schémas et modèles de comportement socio- culturel de l'homme et de la femme en vue de parvenir à l'élimination des préjugés et des pratiques coutumières, ou de tout autre type, qui sont fondés sur l'idée de l'infériorité ou de la supériorité de l'un ou l'autre sexe ou d'un rôle stéréotypé des hommes et des femmes;

b) Faire en sorte que l'éducation familiale contribue à faire bien comprendre que la maternité est une fonction sociale et à faire reconnaître la responsabilité commune de l'homme et de la femme dans le soin d'élever leurs enfants et d'assurer leur développement, étant entendu que l'intérêt des enfants est la condition primordiale dans tous les cas.

Article 6

Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées, y compris des dispositions législatives, pour supprimer, sous toutes leurs formes, le trafic des femmes et l'exploitation de la prostitution des femmes.

Deuxième partie

Article 7

Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans la vie politique et publique du pays et, en particulier, leur assurent, dans des conditions d'égalité avec les hommes, le droit :

a) De voter à toutes les élections et dans tous les référendums publics et être éligibles à tous les organismes publiquement élus;

b) De prendre part à l'élaboration de la politique de l'Etat et à son exécution, occuper des emplois publics et exercer toutes les fonctions publiques à tous les échelons du gouvernement;

c) De participer aux organisations et associations non gouvernementales s'occupant de la vie publique et politique du pays.

Article 8

Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour que les femmes, dans des conditions d'égalité avec les hommes et sans aucune discrimination, aient la possibilité de représenter leur gouvernement à l'échelon international et de participer aux travaux des organisations internationales.

Article 9

1. Les Etats parties accordent aux femmes des droits égaux à ceux des hommes en ce qui concerne l'acquisition, le changement et la conservation de la nationalité. Ils garantissent en particulier que ni le mariage avec un étranger, ni le changement de nationalité du mari pendant le mariage ne change automatiquement la nationalité de la femme, ni ne la rend apatride, ni ne l'oblige à prendre la nationalité de son mari.

2. Les Etats parties accordent à la femme des droits égaux à ceux de l'homme en ce qui concerne la nationalité de leurs enfants.

Troisième partie

Article 10

Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes afin de leur assurer des droits égaux à ceux des hommes en ce qui concerne l'éducation et, en particulier, pour assurer, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme :

a) Les mêmes conditions d'orientation professionnelle, d'accès aux études et d'obtention de diplômes dans les établissements d'enseignement de toutes catégories, dans les zones rurales comme dans les zones urbaines, cette égalité devant être assurée dans l'enseignement préscolaire, général, technique, professionnel et technique supérieur, ainsi que dans tout autre moyen de formation professionnelle;

b) L'accès aux mêmes programmes, aux mêmes examens, à un personnel enseignant possédant les qualifications de même ordre, à des locaux scolaires et à un équipement de même qualité;

c) L'élimination de toute conception stéréotypée des rôles de l'homme et de la femme à tous les niveaux et dans toutes les formes d'enseignement en encourageant l'éducation mixte et d'autres types d'éducation qui aideront à réaliser cet objectif et, en particulier, en révisant les livres et programmes scolaires et en adaptant les méthodes pédagogiques;

d) Les mêmes possibilités en ce qui concerne l'octroi de bourses et autres subventions pour les études;

e) Les mêmes possibilités d'accès aux programmes d'éducation permanente, y compris aux programmes d'alphabétisation pour adultes et d'alphabétisation fonctionnelle, en vue notamment de réduire au plus tôt tout écart d'instruction existant entre les hommes et les femmes;

f) La réduction des taux d'abandon féminin des études et l'organisation de programmes pour les filles et les femmes qui ont quitté l'école prématurément;

g) Les mêmes possibilités de participer activement aux sports et à l'éducation physique;

h) L'accès à des renseignements spécifiques d'ordre éducatif tendant à assurer la santé et le bien-être des familles, y compris l'information et des conseils relatifs à la planification de la famille.

Article 11

1. Les Etats parties s'engagent à prendre toutes le mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans le domaine de l'emploi, afin d'assurer, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, les mêmes droits, et en particulier :

a) Le droit au travail en tant que droit inaliénable de tous les êtres humains;

b) Le droit aux mêmes possibilités d'emploi, y compris l'application des mêmes critères de sélection en matière d'emploi;

c) Le droit au libre choix de la profession et de l'emploi, le droit à la promotion, à la stabilité de l'emploi et à toutes les prestations et conditions de travail, le droit à la formation professionnelle et au recyclage, y compris l'apprentissage, le perfectionnement professionnel et la formation permanente;

d) Le droit à l'égalité de rémunération, y compris de prestation, à l'égalité de traitement pour un travail d'égale valeur aussi bien qu'à l'égalité de traitement en ce qui concerne l'évaluation de la qualité du travail;

e) Le droit à la sécurité sociale, notamment aux prestations de retraite, de chômage, de maladie, d'invalidité et de vieillesse ou pour toute autre perte de capacité de travail, ainsi que le droit à des congés payés;

f) Le droit à la protection de la santé et à la sécurité des conditions de travail, y compris la sauvegarde de la fonction de reproduction.

2. Afin de prévenir la discrimination à l'égard des femmes en raison de leur mariage ou de leur maternité et de garantir leur droit effectif au travail, les Etats parties s'engagent à prendre des mesures appropriées ayant pour objet :

a) D'interdire, sous peine de sanctions, le licenciement pour cause de grossesse ou de congé de maternité et la discrimination des les licenciements fondée sur le statut matrimonial;

b) D'instituer l'octroi de congés de maternité payés ou ouvrant droit à des prestations sociales comparables, avec la garantie du maintien de l'emploi antérieur, des droits d'ancienneté et des avantages sociaux;

c) D'encourager la fourniture des services sociaux d'appui nécessaires pour permettre aux parents de combiner les obligations familiales avec les responsabilités professionnelles et la participation à la vie publique, en particulier en favorisant l'établissement et le développement d'un réseau de garderies d'enfants;

d) D'assurer une protection spéciale aux femmes enceintes dont il est prouvé que le travail est nocif.

3. Les lois visant à protéger les femmes dans les domaines visés par le présent article seront revues périodiquement en fonction des connaissances scientifiques et techniques et seront révisées, abrogées ou étendues, selon les besoins.

Article 12

1. Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans le domaine des soins de santé en vue de leur assurer, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, les moyens d'accéder aux services médicaux, y compris ceux qui concernent la planification de la famille.

2. Nonobstant les dispositions du paragraphe 1 ci-dessus, les Etats parties fournissent aux femmes pendant la grossesse, pendant l'accouchement et après l'accouchement, des services appropriés et, au besoin, gratuits, ainsi qu'une nutrition adéquate pendant la grossesse et l'allaitement.

Article 13

Les Etats parties s'engagent à prendre toutes les mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans d'autres domaines de la vie économique et sociale, afin d'assurer, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, les mêmes droits et, en particulier :

a) Le droit aux prestations familiales;

b) Le droit aux prêts bancaires, prêts hypothécaires et autres formes de crédit financier;

c) Le droit de participer aux activités récréatives, aux sports et à tous les aspects de la vie culturelle.

Article 14

1. Les Etats parties tiennent compte des problèmes particuliers qui se posent aux femmes rurales et du rôle important que ces femmes jouent dans la survie économique de leurs familles, notamment par leur travail dans les secteurs non monétaires de l'économie, et prennent toutes les mesures appropriées pour assurer l'application des dispositions de la présente Convention aux femmes des zones rurales.

2. Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans les zones rurales afin d'assurer, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, leur participation au développement rural et à ses avantages et, en particulier, ils leur assurent le droit :

a) De participer pleinement à l'élaboration et à l'exécution des plans de développement à tous les échelons;

b) D'avoir accès aux services adéquats dans le domaine de la santé, y compris aux informations, conseils et services en matière de planification de la famille;

c) De bénéficier directement des programmes de sécurité sociale;

d) De recevoir tout type de formation et d'éducation, scolaires ou non, y compris en matière d'alphabétisation fonctionnelle, et de pouvoir bénéficier de tous les services communautaires et de vulgarisation, notamment pour accroître leurs compétences techniques;

e) D'organiser des groupes d'entraide et des coopératives afin de permettre l'égalité de chances sur le plan économique, qu'il s'agisse de travail salarié ou de travail indépendant;

f) De participer à toutes les activités de la communauté;

g) D'avoir accès au crédit et aux prêts agricoles, ainsi qu'aux services de commercialisation et aux technologies appropriées, et de recevoir un traitement égal dans les réformes foncières et agraires et dans les projets d'aménagement rural;

h) De bénéficier de conditions de vie convenables, notamment en ce qui concerne le logement, l'assainissement, l'approvisionnement en électricité et en eau, les transports et les communications.

Quatrième partie

Article 15

1. Les Etats parties reconnaissent à la femme l'égalité avec l'homme devant la loi.

2. Les Etats parties reconnaissent à la femme, en matière civile, une capacité juridique identique à celle de l'homme et les mêmes possibilités pour exercer cette capacité. Ils lui reconnaissent en particulier des droits égaux en ce qui concerne la conclusion de contrats et l'administration des biens et leur accordent le même traitement à tous les stades de la procédure judiciaire.

3. Les Etats parties conviennent que tout contrat et tout autre instrument privé, de quelque type que ce soit, ayant un effet juridique visant à limiter la capacité juridique de la femme doivent être considérés comme nuls.

4. Les Etats parties reconnaissent à l'homme et à la femme les mêmes droits en ce qui concerne la législation relative au droit des personnes à circuler librement et à choisir leur résidence et leur domicile.

Article 16

1. Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans toutes les questions découlant du mariage et dans les rapports familiaux et, en particulier, assurent, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme :

a) Le même droit de contracter mariage;

b) Le même droit de choisir librement son conjoint et de ne contracter mariage que de son libre et plein consentement;

c) Les mêmes droits et les mêmes responsabilités au cours du mariage et lors de sa dissolution;

d) Les mêmes droits et les mêmes responsabilités en tant que parents, quel que soit leur état matrimonial, pour les questions se rapportant à leurs enfants; dans tous les cas, l'intérêt des enfants est la considération primordiale;

e) Les mêmes droits de décider librement et en toute connaissance de cause du nombre et de l'espacement des naissances et d'avoir accès aux informations, à l'éducation et aux moyens nécessaires pour leur permettre d'exercer ces droits;

f) Les mêmes droits et responsabilités en matière de tutelle, de curatelle, de garde et d'adoption des enfants, ou d'institutions similaires, lorsque ces concepts existent dans la législation nationale; dans tous les cas, l'intérêt des enfants est la considération primordiale;

g) Les mêmes droits personnels au mari et à la femme, y compris en ce qui concerne le choix du nom de famille, d'une profession et d'une occupation;

h) Les mêmes droits à chacun des époux en matière de propriété, d'acquisition, de gestion, d'administration, de jouissance et de disposition des biens, tant à titre gratuit qu'à titre onéreux.

2. Les fiançailles et les mariages d'enfants n'ont pas d'effets juridiques et toutes les mesures nécessaires, y compris des dispositions législatives, sont prises afin de fixer un âge minimal pour le mariage et de rendre obligatoire l'inscription du mariage sur un registre officiel.

Cinquième partie

Article 17

1. Aux fins d'examiner les progrès réalisés dans l'application de la présente Convention, il est constitué un Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (ci-après dénommé le Comité), qui se compose, au moment de l'entrée en vigueur de la Convention, de dix-huit, et après sa ratification ou l'adhésion du trente-cinquième Etat partie, de vingt-trois experts d'une haute autorité morale et éminemment compétents dans le domaine auquel s'applique la présente Convention. Ces experts sont élus par les Etats parties parmi les ressortissants et siègent à titre personnel, compte tenu du principe d'une répartition géographique équitable et de la représentation des différentes formes de civilisation ainsi que des principaux systèmes juridiques.

2. Les membres du Comité sont élus au scrutin secret sur une liste de candidats désignés par les Etats parties. Chaque Etat partie peut désigner un candidat choisi parmi ses ressortissants.

3. La première élection a lieu six mois après la date d'entrée en vigueur de la présente Convention. Trois mois au moins avant la date de chaque élection, le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies adresse une lettre aux Etats parties pour les inviter à soumettre leurs candidatures dans un délai de deux mois. Le Secrétaire général dresse une liste alphabétique de tous les candidats, en indiquant par quel Etat ils ont été désignés, liste qu'il communique aux Etats parties.

4. Les membres du Comité sont élus au cours d'une réunion des Etats parties convoquée par le Secrétaire général au Siège de l'Organisation des Nations Unies. A cette réunion, où le quorum est constitué par les deux tiers des Etats parties, sont élus membres du Comité les candidats ayant obtenu le plus grand nombre de voix et la majorité absolue des votes des représentants des Etats parties présents et votants.

5. Les membres du Comité sont élus pour quatre ans. Toutefois, le mandat de neuf des membres élus à la première élection prendra fin au bout de deux ans; le Président du Comité tirera au sort les noms de ces neuf membres immédiatement après la première élection.

6. L'élection des cinq membres additionnels du Comité se fera conformément aux dispositions des paragraphes 2, 3 et 4 du présent article à la suite de la trente-cinquième ratification ou adhésion. Le mandat de deux des membres additionnels élus à cette occasion prendra fin au bout de deux ans; le nom de ces deux membres sera tiré au sort par le Président du Comité.

7. Pour remplir les vacances fortuites, l'Etat partie dont l'expert a cessé d'exercer ses fonctions de membre de Comité nommera un autre expert parmi ses ressortissants, sous réserve de l'approbation du Comité.

8. Les membres du Comité reçoivent, avec l'approbation de l'Assemblée générale, des émoluments prélevés sur les ressources de l'Organisation des Nations Unies dans les conditions fixées par l'Assemblée eu égard à l'importance des fonctions du Comité.

9. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies met à la disposition du Comité le personnel et les moyens matériels qui lui sont nécessaires pour s'acquitter efficacement des fonctions qui lui sont confiées en vertu de la présente Convention.

Article 18

1. Les Etats parties s'engagent à présenter au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, pour examen par le Comité, un rapport sur les mesures d'ordre législatif, judiciaire, administratif ou autre qu'ils ont adoptées pour donner effet aux dispositions de la présente Convention et sur les progrès réalisés à cet égard :

a) Dans l'année suivant l'entrée en vigueur de la Convention dans l'Etat intéressé :

b) Puis tous les quatre ans, ainsi qu'à la demande du Comité.

2. Les rapports peuvent indiquer les facteurs et difficultés influant sur la mesure dans laquelle sont remplies les obligations prévues par la présente Convention.

Article 19

1. Le Comité adopte son propre règlement intérieur.

2. Le Comité élit son Bureau pour une période de deux ans.

Article 20

1. Le Comité se réunit normalement pendant une période de deux semaines au plus chaque année pour examiner les rapports présentés conformément à l'article 18 de la présente Convention.

2. Les séances du Comité se tiennent normalement au Siège de l'Organisation des Nations Unies ou en tout autre lieu adéquat déterminé par le Comité.

Article 21

1. Le Comité rend compte chaque année à l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies, par l'intermédiaire du Conseil économique et social, de ses activités et peut formuler des suggestions et des recommandations générales fondées sur l'examen des rapports et des renseignements reçus des Etats parties. Ces suggestions et recommandations sont incluses dans le rapport du Comité, accompagnées, le cas échéant, des observations des Etats parties.

2. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies transmet les rapports du Comité à la Commission de la condition de la femme, pour information.

Article 22

Les institutions spécialisées ont le droit d'être représentées lors de l'examen de la mise en oeuvre de toute disposition de la présente Convention qui entre dans le cadre de leurs activités. Le Comité peut inviter les institutions spécialisées à soumettre des rapports sur l'application de la Convention dans les domaines qui entrent dans le cadre de leurs activités.

Sixième partie

Article 23

Aucune des dispositions de la présente Convention ne portera atteinte aux dispositions plus propices à la réalisation de l'égalité de l'homme et de la femme pouvant être contenues :

a) Dans la législation d'un Etat partie; ou

b) Dans toute autre convention, tout autre traité ou accord international en vigueur dans cet Etat.

Article 24

Les Etats parties s'engagent à adopter toutes les mesures nécessaires au niveau national pour assurer le plein exercice des droits reconnus par la présente Convention.

Article 25

1. La présente Convention est ouverte à la signature de tous les Etats.

2. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies est désigné comme dépositaire de la présente Convention.

3. La présente Convention est sujette à ratification et les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

4. La présente Convention sera ouverte à l'adhésion de tous les Etats. L'adhésion s'effectuera par le dépôt d'un instrument d'adhésion auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article 26

1. Tout Etat partie peut demander à tout moment la révision de la présente Convention en adressant une communication écrite à cet effet au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

2. L'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies décide des mesures à prendre, le cas échéant, au sujet d'une demande de cette nature.

Article 27

1. La présente Convention entrera en vigueur le trentième jour qui suivra la date du dépôt auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies du vingtième instrument de ratification ou d'adhésion.

2. Pour chacun des Etats qui ratifieront la présente Convention ou y adhéreront après le dépôt du vingtième instrument de ratification ou d'adhésion, ladite Convention entrera en vigueur le trentième jour après la date du dépôt par cet Etat de son instrument de ramification ou d'adhésion.

Article 28

1. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies recevra et communiquera à tous les Etats le texte des réserves qui auront été faites au moment de la ratification ou de l'adhésion.

2. Aucune réserve incompatible avec l'objet et le but de la présente Convention ne sera autorisée.

3. Les réserves peuvent être retirées à tout moment par voie de notification adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, lequel informe tous les Etats parties à la Convention. La notification prendra effet à la date de réception.

Article 29

1. Tout différend entre deux ou plusieurs Etats parties concernant l'interprétation ou l'application de la présente Convention qui n'est pas réglé par voie de négociation est soumis à l'arbitrage, à la demande de l'un d'entre eux. Si, dans les six mois qui suivent la date de la demande d'arbitrage, les parties ne parviennent pas à se mettre d'accord sur l'organisation de l'arbitrage, l'une quelconque d'entre elles peut soumettre le différend à la Cour internationale de Justice, en déposant une requête conformément au Statut de la Cour.

2. Tout Etat partie pourra, au moment où il signera la présente Convention, la ratifiera ou y adhérera, déclarer qu'il ne se considère pas lié par les dispositions du paragraphe 1 du présent article. Les autres Etats parties ne seront pas liés par lesdites dispositions envers un Etat partie qui aura formulé une telle réserve.

3. Tout Etat partie qui aura formulé une réserve conformément aux dispositions du paragraphe 2 du présent article pourra à tout moment lever cette réserve par une notification adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article 30

La présente Convention, dont les textes en anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe font également foi, sera déposée auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

En foi de quoi les soussignés, à ce dûment habilités, ont signé la présente Convention.


Convention sur les droits politiques de la femme

Ouverte à la signature et à la ratification par l'Assemblée générale dans sa résolution 640 (VII) du 20 décembre 1952
Entrée en vigueur : le 7 juillet 1954, conformément aux dispositions de l'article VI

 
Les Parties contractantes,

Souhaitant mettre en oeuvre le principe de l'égalité de droits des hommes et des femmes contenu dans la Charte des Nations Unies,

Reconnaissant que toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis, et d'accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions publiques de son pays, et désirant accorder aux hommes et aux femmes l'égalité dans la jouissance et l'exercice des droits politiques, conformément à la Charte des Nations Unies et aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l'homme,

Ayant décidé de conclure une convention à cette fin,

Sont convenues des dispositions suivantes :

Article premier

Les femmes auront, dans des conditions d'égalité avec les hommes, le droit de vote dans toutes les élections, sans aucune discrimination.

Article II

Les femmes seront, dans des conditions d'égalité avec les hommes, éligibles à tous les organismes publiquement élus, constitués en vertu de la législation nationale, sans aucune discrimination.

Article III

Les femmes auront, dans des conditions d'égalité, le même droit que les hommes d'occuper tous les postes publics et d'exercer toutes les fonctions publiques établis en vertu de la législation nationale, sans aucune discrimination.

Article IV

1. La présente Convention sera ouverte à la signature de tous les Etats Membres de l'Organisation des Nations Unies et de tout autre Etat auquel l'Assemblée générale aura adressé une invitation à cet effet.

2. Elle sera ratifiée et les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article V

1. La présente Convention sera ouverte à l'adhésion de tous les Etats visés au paragraphe premier de l'article IV.

2. L'adhésion se fera par le dépôt d'un instrument d'adhésion auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article VI

1. La présente Convention entrera en vigueur le quatre- vingt-dixième jour qui suivra la date du dépôt du sixième instrument de ratification ou d'adhésion.

2. Pour chacun des Etats qui la ratifieront ou y adhéreront après le dépôt du sixième instrument de ratification ou d'adhésion, la présente Convention entrera en vigueur le quatre-vingt-dixième jour qui suivra le dépôt par cet Etat de son instrument de ratification ou d'adhésion.

Article VII

Si, au moment de la signature, de la ratification ou de l'adhésion, un Etat formule une réserve à l'un des articles de la présente Convention, le Secrétaire général communiquera le texte de la réserve à tous les Etats qui sont ou qui peuvent devenir parties à cette Convention. Tout Etat qui n'accepte pas ladite réserve peut, dans le délai de quatre-vingt-dix jours à partir de la date de cette communication (ou à la date à laquelle il devient Partie à la Convention), notifier au Secrétaire général qu'il n'accepte pas la réserve. Dans ce cas, la Convention n'entrera pas en vigueur entre ledit Etat et l'Etat qui formule la réserve.

Article VIII

1. Tout Etat contractant peut dénoncer la présente Convention par une notification écrite adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. La dénonciation prendra effet un an après la date à laquelle le Secrétaire général en aura reçu notification.

2. La présente Convention cessera d'être en vigueur à partir de la date à laquelle aura pris effet la dénonciation qui ramènera à moins de six le nombre des parties.

Article IX

Tout différend entre deux ou plusieurs Etats contractants touchant l'interprétation ou l'application de la présente Convention qui n'aura pas été réglé par voie de négociations sera porté, à la requête de l'une des Parties au différend, devant la Cour internationale de Justice pour qu'elle statue à son sujet, à moins que les Parties intéressées ne conviennent d'un autre mode de règlement.

Article X

Seront notifiés par le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies à tous les Etats Membres et aux Etats non membres visés au paragraphe premier de l'article IV de la présente Convention :

a) Les signatures apposées et les instruments de ratification reçus conformément à l'article IV;

b) Les instruments d'adhésion reçus conformément à l'article V;

c) La date à laquelle la présente Convention entrera en vigueur conformément à l'article VI;

d) Les communications et notifications reçues conformément à l'article VII;

e) Les notifications de dénonciation reçues conformément aux dispositions du paragraphe premier de l'article VIII;

f) L'extinction résultant de l'application du paragraphe 2 de l'article VIII.

Article XI

1. La présente Convention, dont les textes anglais, chinois, espagnol, français et russe feront également foi, sera déposée aux archives de l'Organisation des Nations Unies.

2. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies en fera parvenir une copie certifiée conforme à tous les Etats Membres et aux Etats non membres visés au paragraphe premier de l'article VI.


Déclaration sur la protection des femmes et des enfants en période d'urgence et de conflit armé

Proclamée par l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies le 14 décembre 1974 [résolution 3318(XXIX)]

 L'Assemblée générale,

Ayant examiné la recommandation du Conseil économique et social contenue dans sa résolution 1861(LVI) du 16 mai 1974,

Exprimant sa profonde préoccupation devant les souffrances des femmes et des enfants appartenant à la population civile qui, en période d'urgence et de conflit armé dans la lutte pour la paix, l'autodétermination, la libération nationale et l'indépendance, sont trop souvent les victimes d'actes inhumains et subissent ainsi de graves préjudices,

Consciente de la souffrance des femmes et des enfants dans de nombreuses régions du monde, spécialement dans celles qui sont en proie à la répression, à l'agression, au colonialisme, au racisme et à la domination ou la sujétion étrangère,

Profondément préoccupée par le fait que, en dépit de la condamnation générale et sans équivoque dont ils sont l'objet, le colonialisme, le racisme et l'oppression étrangère continuent à maintenir de nombreux peuples sous leur joug, répriment actuellement les mouvements de libération nationale et infligent de lourdes pertes et des souffrances indicibles aux populations sous leur domination, notamment aux femmes et aux enfants,

Déplorant que de graves atteintes soient encore portées aux libertés fondamentales et à la dignité de la personne humaine et que les régimes coloniaux et racistes et les puissances oppressives étrangères continuent de violer le droit international humanitaire,

Rappelant les dispositions pertinentes contenues dans les instruments du droit international humanitaire relatifs à la protection des femmes et des enfants en temps de paix et en temps de guerre,

Rappelant, entre autres documents importants, ses résolutions 2444(XXIII) du 19 décembre 1968, 2597(XXIV) du 16 décembre 1969 et 2674(XXV) et 2675(XXV) du 9 décembre 1970, relatives au respect des droits de l'homme et aux principes fondamentaux touchant la protection des populations civiles en période de conflit armé, ainsi que la résolution 1515(XLVIII) du Conseil économique et social, en date du 28 mai 1970, dans laquelle le Conseil a prié l'Assemblée générale de considérer la possibilité d'élaborer un projet de déclaration sur la protection des femmes et des enfants en période d'urgence ou en temps de guerre,

Consciente de sa responsabilité en ce qui concerne l'avenir de la jeune génération et le sort des mères, qui jouent un rôle important dans la société, dans la famille et en particulier dans l'éducation des enfants,

Tenant compte de la nécessité de fournir une protection spéciale aux femmes et aux enfants appartenant à la population civile,

Proclame solennellement la présente Déclaration sur la protection des femmes et des enfants en période d'urgence et de conflit armé et demande à tous les Etats Membres de veiller à ce qu'elle soit strictement observée :

1. Attaquer et bombarder la population civile, causant ainsi des souffrances indicibles, spécialement aux femmes et aux enfants qui constituent la partie la plus vulnérable de la population, est interdit et de tels actes seront condamnés.

2. Utiliser des armes chimiques et bactériologiques au cours des opérations militaires constitue une des violations les plus flagrantes du Protocole de Genève de 1925, des Conventions de Genève de 1949 et des principes du droit international humanitaire, cause de lourdes pertes aux populations civiles, y compris les femmes et les enfants sans défense et sera rigoureusement condamné.

3. Tous les Etats doivent remplir entièrement leurs obligations conformément au Protocole de Genève de 1925 et aux Conventions de Genève de 1949 ainsi qu'aux autres instruments internationaux relatifs au respect des droits de l'homme en période de conflit armé, qui donnent à la protection des femmes et des enfants des garanties importantes.

4. Tous les efforts seront faits par les Etats engagés dans un conflit armé, dans des opérations militaires sur des territoires étrangers ou dans des opérations militaires sur des territoires encore sous domination coloniale pour épargner aux femmes et aux enfants les ravages de la guerre. Toutes les dispositions nécessaires seront prises pour assurer l'interdiction des mesures telles que les persécutions, les tortures, les représailles, les traitements dégradants et les violences, en particulier dans la partie de la population civile que constituent les femmes et les enfants.

5. Toutes les formes de répression et de traitement cruel et inhumain appliqués aux femmes et aux enfants, notamment l'emprisonnement, la torture, les fusillades, les arrestations en masse, les châtiments collectifs, les destructions d'habitations, les déplacements par la force, que commettent les belligérants pendant les opérations militaires ou dans les territoires occupés seront considérées comme criminelles.

6. Les femmes et les enfants appartenant à la population civile et placés dans les conditions de période d'urgence et de conflit armé dans la lutte pour la paix, l'autodétermination, la libération nationale et l'indépendance, ou vivant dans des territoires occupés, ne seront pas privés d'abri, de nourriture, d'assistance médicale et des droits inaliénables, conformément aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l'homme, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, de la Déclaration des droits de l'enfant et des autres instruments internationaux.


Déclaration sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes
Résolution 48/104 de l'Assemblée générale du 20 décembre 1993

L'Assemblée générale,

Considérant qu'il est urgent de faire en sorte que les femmes bénéficient universellement des droits et principes consacrant l'égalité, la sécurité, la liberté, l'intégrité et la dignité de tous les êtres humains,

Notant que ces droits et principes sont consacrés dans un certain nombre d'instruments internationaux, dont la Déclaration universelle des droits de l'homme 1/, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques 2/, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels 2/, la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes 3/ et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants 4/,

Considérant que l'application effective de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes contribuera à l'élimination de la violence à l'égard des femmes et que la Déclaration sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes, énoncée dans la présente résolution, renforcera et complétera ce processus,

__________

1/ Résolution 217 A (III).

2/ Voir résolution 2200 A (XXI), annexe.

3/ Résolution 34/180, annexe.

4/ Résolution 39/46, annexe.

Préoccupée de constater que la violence à l'égard des femmes va à l'encontre de l'instauration de l'égalité, du développement et de la paix, comme l'indiquaient déjà les Stratégies prospectives d'action de Nairobi pour la promotion de la femme 5/, où était recommandée une série de mesures visant à combattre la violence à l'égard des femmes, et qu'elle fait obstacle à la mise en application de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes,

Affirmant que la violence à l'égard des femmes constitue une violation des droits de la personne humaine et des libertés fondamentales et empêche partiellement ou totalement les femmes de jouir desdits droits et libertés, et préoccupée que ceux-ci ne soient toujours pas protégés dans les cas de violence à l'égard des femmes,

Reconnaissant que la violence à l'égard des femmes traduit des rapports de force historiquement inégaux entre hommes et femmes, lesquels ont abouti à la domination et à la discrimination exercées par les premiers et freiné la promotion des secondes, et qu'elle compte parmi les principaux mécanismes sociaux auxquels est due la subordination des femmes aux hommes,

Constatant avec préoccupation que certains groupes de femmes, dont les femmes appartenant à des minorités, les femmes autochtones, les réfugiées, les femmes migrantes, les femmes vivant dans des communautés rurales ou reculées, les femmes sans ressources, les femmes internées, les femmes détenues, les petites filles, les femmes handicapées, les femmes âgées et les femmes dans des zones de conflit armé, sont particulièrement vulnérables face à la violence,

Rappelant la conclusion figurant au paragraphe 23 de l'annexe à la résolution 1990/15 du Conseil économique et social, en date du 24 mai 1990, selon laquelle il est constaté que la violence à l'égard des femmes exercée dans la famille et dans la société se répand partout, quels que soient le revenu, la classe sociale et la culture, et que des mesures urgentes et efficaces doivent être prises pour en éliminer les effets,

Rappelant également la résolution 1991/18 du Conseil économique et social, en date du 30 mai 1991, dans laquelle le Conseil a recommandé que soit élaboré le plan d'un instrument international qui traiterait explicitement de la question de la violence à l'égard des femmes,

Notant avec satisfaction que les mouvements de femmes ont contribué à appeler l'attention sur la nature, la gravité et l'ampleur du problème de la violence à l'égard des femmes,

Alarmée de constater que les femmes ont du mal à s'assurer l'égalité juridique, sociale, politique et économique dans la société, en raison notamment de la persistance et du caractère endémique de la violence,

Convaincue, eu égard aux considérations qui précèdent, de la nécessité d'une définition explicite et complète de la violence à l'égard des femmes, d'un énoncé très clair des droits à garantir pour faire disparaître la violence à l'égard des femmes sous toutes ses formes, d'un engagement des Etats à assumer leurs responsabilités, et d'un engagement de la communauté internationale à mettre fin à la violence à l'égard des femmes,

__________

5/ Rapport de la Conférence mondiale chargée d'examiner et d'évaluer les résultats de la Décennie des Nations Unies pour la femme : égalité, développement et paix, Nairobi, 15-26 juillet 1985 (publication des Nations Unies, numéro de vente : F.85.IV.10), chap. I, sect. A.

Proclame solennellement la Déclaration sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes et demande instamment que tout soit mis en oeuvre pour la faire universellement connaître et respecter.

 Article premier

Aux fins de la présente Déclaration, les termes "violence à l'égard des femmes" désignent tous actes de violence dirigés contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée.

Article 2

La violence à l'égard des femmes s'entend comme englobant, sans y être limitée, les formes de violence énumérées ci-après :

a) La violence physique, sexuelle et psychologique exercée au sein de la famille, y compris les coups, les sévices sexuels infligés aux enfants de sexe féminin au foyer, les violences liées à la dot, le viol conjugal, les mutilations génitales et autres pratiques traditionnelles préjudiciables à la femme, la violence non conjugale, et la violence liée à l'exploitation;

b) La violence physique, sexuelle et psychologique exercée au sein de la collectivité, y compris le viol, les sévices sexuels, le harcèlement sexuel et l'intimidation au travail, dans les établissements d'enseignement et ailleurs, le proxénétisme et la prostitution forcée;

c) La violence physique, sexuelle et psychologique perpétrée ou tolérée par l'Etat, où qu'elle s'exerce.

 Article 3

L'exercice et la protection de tous les droits de la personne humaine et des libertés fondamentales doivent être garantis aux femmes, à égalité avec les hommes, dans les domaines politique, économique, social, culturel, civil et autres. Au nombre de ces droits figurent :

a) Le droit à la vie 6/;

b) Le droit à l'égalité 7/;

c) Le droit à la liberté et à la sûreté de la personne 8/;

d) Le droit à une égale protection de la loi 7/;

e) Le droit de ne subir de discrimination sous aucune forme 7/;

__________

6/ Déclaration universelle des droits de l'homme, article 3; Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 6.

7/ Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 26.

8/ Déclaration universelle des droits de l'homme, article 3; Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 9.

f) Le droit au meilleur état de santé physique et mentale

possible 9/;

g) Le droit à des conditions de travail équitables et satisfaisantes 10/;

h) Le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants 11/.

 
Article 4

Les Etats devraient condamner la violence à l'égard des femmes et ne pas invoquer de considérations de coutume, de tradition ou de religion pour se soustraire à l'obligation de l'éliminer. Les Etats devraient mettre en oeuvre sans retard, par tous les moyens appropriés, une politique visant à éliminer la violence à l'égard des femmes et, à cet effet :

a) Envisager, lorsqu'ils ne l'ont pas encore fait, de ratifier la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, d'y adhérer ou de retirer les réserves qu'il y ont faites;

b) S'abstenir de tout acte de violence à l'égard des femmes;

c) Agir avec la diligence voulue pour prévenir les actes de violence à l'égard des femmes, enquêter sur ces actes et les punir conformément à la législation nationale, qu'ils soient perpétrés par l'Etat ou par des personnes privées;

d) Prévoir dans la législation nationale pénale, civile, du travail ou administrative les sanctions voulues pour punir et réparer les torts causés aux femmes soumises à la violence; les femmes victimes d'actes de violence devraient avoir accès à l'appareil judiciaire et la législation nationale devrait prévoir des réparations justes et efficaces du dommage subi; les Etats devraient en outre informer les femmes de leur droit à obtenir réparation par le biais de ces mécanismes;

e) Examiner la possibilité d'élaborer des plans d'action nationaux visant à promouvoir la protection de la femme contre toute forme de violence, ou d'inclure des dispositions à cet effet dans les plans existants, en tenant compte, le cas échéant, de la coopération que sont en mesure d'apporter les organisations non gouvernementales, notamment celles qu'intéresse plus particulièrement la question;

___________

9/ Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, article 12.

10/ Déclaration universelle des droits de l'homme, article 23; Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, articles 6 et 7.

11/ Déclaration universelle des droits de l'homme, article 5; Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 7; Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

f) Elaborer des stratégies de prévention et toutes mesures de caractère juridique, politique, administratif et culturel propres à favoriser la protection des femmes contre la violence et à garantir que les femmes ne se verront pas infliger un surcroît de violence du fait de lois, de modes de répression ou d'interventions d'un autre ordre ne prenant pas en considération les caractéristiques propres à chaque sexe;

g) Dans toute la mesure possible, compte tenu des ressources dont ils disposent, et en ayant recours au besoin à la coopération internationale, assurer aux femmes victimes d'actes de violence et, le cas échéant, à leurs enfants une aide spécialisée, y compris réadaptation, assistance pour les soins aux enfants, traitement, conseils, services médico-sociaux et structures d'appui, et prendre toutes autres mesures voulues pour promouvoir la réadaptation physique et psychologique;

h) Inscrire au budget national des crédits suffisants pour financer les activités visant à éliminer la violence à l'égard des femmes;

i) Veiller à ce que les agents des services de répression ainsi que les fonctionnaires chargés d'appliquer des politiques visant à prévenir la violence à l'égard des femmes, à assurer les enquêtes nécessaires et à punir les coupables reçoivent une formation propre à les sensibiliser aux besoins des femmes;

j) Adopter toutes les mesures voulues, notamment dans le domaine de l'éducation, pour modifier les comportements sociaux et culturels des hommes et des femmes et éliminer les préjugés, coutumes et pratiques tenant à l'idée que l'un des deux sexes est supérieur ou inférieur à l'autre ou à des stéréotypes concernant les rôles masculins et féminins;

k) Favoriser la recherche, rassembler des données et compiler des statistiques se rapportant à l'incidence des différentes formes de violence à l'égard des femmes, y compris en particulier la violence au foyer, et encourager la recherche sur les causes, la nature, la gravité et les conséquences de la violence à l'égard des femmes, ainsi que sur l'efficacité des mesures prises pour prévenir et réparer la violence à l'égard des femmes, lesdites statistiques et les conclusions des travaux de recherche étant à rendre publiques;

l) Adopter des mesures visant à éliminer la violence à l'égard des femmes particulièrement vulnérables;

m) Inclure dans les rapports présentés en application des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme des éléments d'information concernant la violence à l'égard des femmes et les mesures prises pour donner effet à la présente Déclaration;

n) Encourager l'élaboration des directives voulues pour aider à la mise en oeuvre des principes énoncés dans la présente Déclaration;

o) Reconnaître l'importance du rôle que jouent les mouvements de femmes et les organisations non gouvernementales du monde entier s'agissant de faire prendre conscience du problème de la violence à l'égard des femmes et d'y remédier;

p) Faciliter et encourager les travaux des mouvements de femmes et des organisations non gouvernementales et coopérer avec eux sur les plans local, national et régional;

q) Encourager les organisations intergouvernementales régionales dont ils sont membres à inclure s'il y a lieu l'élimination de la violence à l'égard des femmes dans leurs programmes.

 Article 5

Les institutions spécialisées et les autres organes du système des Nations Unies devraient, dans leurs domaines de compétence respectifs, contribuer à faire reconnaître et à assurer l'exercice des droits et l'application des principes énoncés dans la présente Déclaration, en s'attachant notamment à :

a) Encourager la coopération internationale et régionale ayant pour fin de définir des stratégies régionales de lutte contre la violence, d'échanger des données d'expérience et de financer des programmes relatifs à l'élimination de la violence à l'égard des femmes;

b) Promouvoir des réunions et des séminaires visant à faire prendre conscience à chacun du problème de l'élimination de la violence à l'égard des femmes;

c) Encourager la coordination et les échanges entre les organes du système des Nations Unies créés en vertu d'instruments relatifs aux droits de l'homme qui ont à connaître de la question de la violence à l'égard des femmes, afin qu'il en soit traité comme il convient;

d) Faire une place, dans leurs analyses des tendances et des problèmes sociaux, telles que celles auxquelles donnent lieu les rapports périodiques sur la situation sociale dans le monde, aux tendances de la violence à l'égard des femmes;

e) Encourager la coordination entre les organismes des Nations Unies et leurs organes, de manière que la question de la violence à l'égard des femmes, en particulier celles qui font partie des groupes les plus vulnérables, soit incluse dans les programmes en cours;

f) Promouvoir l'établissement de directives ou de manuels se rapportant à la violence à l'égard des femmes qui fassent une place aux mesures mentionnées dans la présente Déclaration;

g) Faire une place, s'il y a lieu, à la question de l'élimination de la violence à l'égard des femmes dans l'exécution de leurs mandats concernant l'application des instruments relatifs aux droits de l'homme;

h) Coopérer avec les organisations non gouvernementales face au problème de la violence à l'égard des femmes.

 Article 6

Rien dans la présente Déclaration ne saurait compromettre l'application des dispositions de la législation d'un Etat ou d'une convention, d'un traité ou d'un autre instrument international en vigueur dans un Etat qui permettraient d'éliminer plus efficacement la violence à l'égard des femmes.


Esclavage, servitude, travail forcé et institutions et pratiques analogues

 
Convention relative à l'esclavage

Signée à Genève, le 25 septembre 1926
Entrée en vigueur le : 9 mars 1927, conformément aux dispositions de l'article 12.

 La Convention a été amendée par le Protocole fait au Siège de l'Organisation des Nations Unies, à New York, le 7 décembre 1953; la Convention amendée est entrée en vigueur le 7 juillet 1955, date à laquelle les amendements énoncés dans l'annexe au Protocole du 7 décembre 1953 sont entrés en vigueur conformément à l'article III du Protocole.

Considérant que les signataires de l'Acte général de la Conférence de Bruxelles de 1889-1890 se sont déclarés également animés de la ferme intention de mettre fin au trafic des esclaves en Afrique,

Considérant que les signataires de la Convention de Saint-Germain-en-Laye de 1919, ayant pour objet la révision de l'Acte général de Berlin de 1885, et de l'Acte général de la Déclaration de Bruxelles de 1890, ont affirmé leur intention de réaliser la suppression complète de l'esclavage, sous toutes ses formes, et de la traite des esclaves par terre et par mer,

Prenant en considération le rapport de la Commission temporaire de l'esclavage, nommée par le Conseil de la Société des Nations le 12 juin 1924,

Désireux de compléter et de développer l'oeuvre réalisée grâce à l'Acte de Bruxelles et de trouver le moyen de donner effet pratique, dans le monde entier, aux intentions exprimées, en ce qui concerne la traite des esclaves et l'esclavage, par les signataires de la Convention de Saint-Germain-en-Laye, et reconnaissant qu'il est nécessaire de conclure à cet effet des arrangements plus détaillés que ceux qui figurent dans cette Convention.

Estimant, en outre, qu'il est nécessaire d'empêcher que le travail forcé n'amène des conditions analogues à celles de l'esclavage,

Ont décidé de conclure une convention et ont désigné comme plénipotentiaires à cette effet :
...
Lesquels sont convenus des dispositions suivantes :

Article premier

Aux fins de la présente Convention, il est entendu que : 1 L'esclavage est l'état ou condition d'un individu sur lequel s'exercent les attributs du droit de propriété ou certains d'entre eux;

2 La traite des esclaves comprend tout acte de capture, d'acquisition ou de cession d'un individu en vue de la réduire en esclavage; tout acte d'acquisition d'un esclave en vue de le vendre ou de l'échanger; tout acte de cession par vente ou échange d'un esclave acquis en vue d'être vendu ou échangé, ainsi que, en général, tout acte de commerce ou de transport d'esclaves.

Article 2

Les Hautes Parties contractantes s'engagent, pour autant qu'elles n'ont pas déjà pris les mesures nécessaires, et chacune en ce qui concerne les territoires placés sous sa souveraineté, juridiction, protection, suzeraineté ou tutelle :

a) A prévenir et réprimer la traite des esclaves;

b) A poursuivre la suppression complète de l'esclavage sous toutes ses formes, d'une manière progressive et aussitôt que possible.

Article 3

Les Hautes Parties contractantes s'engagent à prendre toutes mesures utiles en vue de prévenir et réprimer l'embarquement, le débarquement et le transport des esclaves dans leurs eaux territoriales, ainsi que, en général, sur tous les navires abordant leurs pavillons respectifs.

Les Hautes Parties contractantes s'engagent à négocier, aussitôt que possible, une convention générale sur la traite des esclaves leur donnant des droits et leur imposant des obligations de même nature que ceux prévus dans la Convention du 17 juin 1925 concernant le commerce international des armes (articles 12, 20, 21, 22, 23, 24 et paragraphes 3, 4, 5 de la section II de l'annexe II), sous réserve des adaptations nécessaires, étant entendu que cette convention générale ne placera les navires (même de petit tonnage) d'aucune des Hautes Parties contractantes dans une autre position que ceux des autres Hautes Parties contractantes.

Il est également entendu que, avant comme après l'entrée en vigueur de ladite convention générale, les Hautes Parties contractantes gardent toute liberté de passer entre elles, sans toutefois déroger aux principes stipulés dans l'alinéa précédent, tels arrangements particuliers qui, en raison de leur situation spéciale, leur paraîtraient convenables pour arriver le plus promptement possible à la disparition totale de la traite.

Article 4

Les Hautes Parties contractantes se prêteront mutuellement assistance pour arriver à la suppression de l'esclavage et de la traite des esclaves. Article 5

Les Hautes Parties contractantes reconnaissent que le recours au travail forcé ou obligatoire peut avoir de graves conséquences et s'engagent, chacune en ce qui concerne les territoires soumis à sa souveraineté, juridiction, protection, suzeraineté ou tutelle, à prendre des mesures utiles pour éviter que le travail forcé ou obligatoire n'amène des conditions analogues à l'esclavage.

Il est entendu :

1 Que, sous réserve des dispositions transitoires énoncées au paragraphe 2 ci-dessous, le travail forcé ou obligatoire ne peut être exigé que pour des fins publiques;

2 Que, dans les territoires où le travail forcé ou obligatoire, pour d'autres fins que des fins publiques, existe encore, les Hautes Parties contractantes s'efforceront d'y mettre progressivement fin, aussi rapidement que possible, et que, tant que ce travail forcé ou obligatoire existera, il ne sera employé qu'à titre exceptionnel, contre une rémunération adéquate et à la condition qu'un changement du lieu habituel de résidence ne puisse être imposé;

3 Et que, dans tous les cas, les autorités centrales compétentes du territoire intéressé assumeront la responsabilité du recours au travail forcé ou obligatoire.

Article 6

Les Hautes Parties contractantes dont la législation ne serait pas dès à présent suffisante pour réprimer les infractions aux lois et règlements édictés en vue de donner effet aux fins de la présente Convention s'engagent à prendre les mesures nécessaires pour que ces infractions soient punies de peines sévères.

Article 7

Les Hautes Parties contractantes s'engagent à se communiquer entre elles et à communiquer au Secrétaire général de la Société des Nations les lois et règlements qu'elles édicteront en vue de l'application des stipulations de la présente Convention.

Article 8

Les Hautes Parties contractantes, conviennent que tous les différends qui pourraient s'élever entre elles au sujet de l'interprétation ou de l'application de la présente Convention seront, s'ils ne peuvent être réglés par des négociations directes, envoyés pour décision à la Cour permanente de Justice internationale. Si les Etats entre lesquels surgit un différend, ou l'un d'entre eux, n'étaient pas parties au Protocole du 16 décembre 1920, relatif à la Cour permanente de Justice internationale, ce différend sera soumis à leur gré et conformément aux règles constitutionnelles de chacun d'eux, soit à la Cour permanente de Justice internationale, soit à un tribunal d'arbitrage constitué conformément à la Convention du 18 octobre 1907 pour règlement pacifique des conflits internationaux, soit à tout autre tribunal d'arbitrage.

Article 9

Chacune des Hautes Parties contractantes peut déclarer, soit au moment de la signature, soit au moment de sa ratification ou de son adhésion, que, en ce qui concerne l'application des stipulations de la présente Convention ou de quelques-unes d'entre elles, son acceptation n'engage pas soit l'ensemble, soit tel des territoires placés sous sa souveraineté, juridiction, protection, suzeraineté ou tutelle, et peut ultérieurement adhérer séparément, en totalité ou en partie, au nom de l'un quelconque d'entre eux.

Article 10

S'il arrivait qu'une des Hautes Parties contractantes voulût dénoncer la présente Convention, la dénonciation sera notifiée par écrit au Secrétaire général de la Société des Nations, qui communiquera immédiatement une copie certifiée conforme de la notification à toutes les autres Hautes Parties contractantes, en leur faisant savoir la date à laquelle il l'a reçue.

Le dénonciation ne produira ses effets qu'à l'égard de l'Etat qui l'aura notifiée, et un an après que la notification en sera parvenue au Secrétaire général de la Société des Nations.

La dénonciation pourra également être effectuée séparément pour tout territoire placé sous sa souveraineté, juridiction, protection, suzeraineté ou tutelle.

Article 11

La présente Convention, qui portera la date de ce jour et dont les textes français et anglais feront également foi, restera ouverte jusqu'au 1er avril 1927 à la signature des Etats Membres de la Société des Nations.

Le Secrétaire général de la Société des Nations portera ensuite la présente Convention à la connaissance des Etats non signataires, y compris les Etats qui ne sont pas membres de la Société des Nations, en les invitant à y adhérer.

L'Etat qui désire adhérer notifiera par écrit son intention au Secrétaire général de la Société des Nations en lui transmettant l'acte d'adhésion, qui sera déposé dans les archives de la Société des Nations.

Le Secrétaire général transmettra immédiatement à toutes les autres Hautes Parties contractantes une copie certifiée conforme de la notification ainsi que de l'acte d'adhésion, en indiquant la date à laquelle il les a reçus.

Article 12

Le présente Convention sera ratifiée et les instruments de ratification en seront déposés au Bureau du Secrétaire général de la Société des Nations, qui en fera la notification aux Hautes Parties contractantes.

La Convention produira ses effets pour chaque Etat dès la date du dépôt de sa ratification ou de son adhésion.

EN FOI DE QUOI les plénipotentiaires soussignés ont signé la présente Convention.

FAIT à Genève, le vingt-cinq septembre mil neuf cent vingt-six, en un seul exemplaire qui sera déposé aux archives de la Société des Nations. Une copie certifiée conforme sera transmise à chaque Etat signataire.


Convention sur l'abolition du travail forcé
Convention (N 105) concernant l'abolition du travail forcé

Adoptée par la Conférence générale de l'Organisation internationale du Travail à sa quarantième session, le 25 juin 1957
Entrée en vigueur : le 17 janvier 1959, conformément aux dispositions de l'article 4

La Conférence générale de l'Organisation internationale du Travail,

Convoquée à Genève par le Conseil d'administration du Bureau international du Travail, et s'y étant réunie le 5 juin 1957, en sa quarantième session,

Après avoir examiné la question de travail forcé, qui constitue le quatrième point à l'ordre du jour de la session,

Après avoir pris note des dispositions de la Convention sur le travail forcé, 1930,

Après avoir noté que la Convention de 1926 relative à l'esclavage prévoit que des mesures utiles doivent être prises pour éviter que le travail forcé ou obligatoire n'amène des conditions analogues à l'esclavage et que la Convention supplémentaire de 1956 relative à l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l'esclavage vise à obtenir l'abolition complète de la servitude pour dettes et du servage,

Après avoir noté que la Convention sur la protection du salaire, 1949, énonce que le salaire sera payé à intervalles réguliers et interdit les modes de paiement qui privent le travailleur de toute possibilité réelle de quitter son emploi,

Après avoir décidé d'adopter d'autres propositions relatives à l'abolition de certaines formes de travail forcé ou obligatoire constituant une violation des droits de l'homme tels qu'ils sont visés par la Charte des Nations Unies et énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme,

Après avoir décidé que ces propositions prendraient la forme d'une convention internationale,

Adopte, ce vingt-cinquième jour de juin mil neuf cent cinquante-sept, la convention ci- après, qui sera dénommée Convention sur l'abolition du travail forcé, 1957 :

Article premier

Tout Membre de l'Organisation internationale du Travail qui ratifie la présente Convention s'engage à supprimer le travail forcé ou obligatoire et à n'y recourir sous aucune forme :

a) En tant que mesure de coercition ou d'éducation politique ou en tant que sanction à l'égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l'ordre politique, social ou économique établi;

b) En tant que méthode de mobilisation et d'utilisation de la main-d'oeuvre à des fins de développement économique;

c) En tant que mesure de discipline du travail;

d) En tant que punition pour avoir participé à des grèves;

e) En tant que mesure de discrimination raciale, sociale, nationale ou religieuse.

Article 2

Tout Membre de l'Organisation internationale du Travail qui ratifie la présente Convention s'engage à prendre des mesures efficaces en vue de l'abolition immédiate et complète du travail forcé ou obligatoire tel qu'il est décrit à l'article 1 de la présente Convention.

Article 3

Les ratifications formelles de la présente Convention seront communiquées au Directeur général du Bureau international du Travail et par lui enregistrées.

Article 4

1. La présente Convention ne liera que les Membres de l'Organisation internationale du Travail dont la ratification aura été enregistrée par le Directeur général.

2. Elle entrera en vigueur douze mois après que les ratifications de deux Membres auront été enregistrées par le Directeur général.

3. Par la suite, cette Convention entrera en vigueur pour chaque Membre douze mois après la date où sa ratification aura été enregistrée.

Article 5

1. Tout Membre ayant ratifié la présente Convention peut la dénoncer à l'expiration d'une période de dix années après la date de la mise en vigueur initiale de la Convention, par un acte communiqué au Directeur général du Bureau international du Travail et par lui enregistré. La dénonciation ne prendra effet qu'une année après avoir été enregistrée.

2. Tout Membre ayant ratifié la présente Convention qui, dans le délai d'une année après l'expiration de la période de dix années mentionnée au paragraphe précédent, ne fera pas usage de la faculté de dénonciation prévue par le présent article sera lié pour une nouvelle période de dix années et, par la suite, pourra dénoncer la présente Convention à l'expiration de chaque période de dix années dans les conditions prévues au présent article.

Article 6

1. Le Directeur général du Bureau international du Travail notifiera à tous les Membres de l'Organisation internationale du Travail l'enregistrement de toutes les ratifications et dénonciations qui lui seront communiquées par les Membres de l'Organisation.

2. En notifiant aux Membres de l'Organisation l'enregistrement de la deuxième ratification qui lui aura été communiquée, le Directeur général appellera l'attention des Membres de l'Organisation sur la date à laquelle la présente Convention entrera en vigueur.

Article 7

Le Directeur général du Bureau international du Travail communiquera au Secrétaire général des Nations Unies, aux fins d'enregistrement, conformément à l'Article 102 de la Charte des Nations Unies, des renseignements complets au sujet de toutes ratifications et de tous actes de dénonciation qu'il aura enregistrés conformément aux articles précédents.

Article 8

Chaque fois qu'il le jugera nécessaire, le Conseil d'administration du Bureau international du Travail présentera à la Conférence générale un rapport sur l'application de la présente Convention et examinera s'il y a lieu d'inscrire à l'ordre du jour de la Conférence la question de sa révision totale ou partielle.

Article 9

1. Au cas où la Conférence adopterait une nouvelle convention portant révision totale ou partielle de la présente Convention, et à moins que la nouvelle convention ne dispose autrement :

a) La ratification par un Membre de la nouvelle convention portant révision entraînerait de plein droit, nonobstant l'article 5 ci-dessus, dénonciation immédiate de la présente Convention, sous réserve que la nouvelle convention portant révision soit entrée en vigueur;

b) A partir de la date de l'entrée en vigueur de la nouvelle convention portant révision, la présente convention cesserait d'être ouverte à la ratification des Membres.

2. La présente Convention demeurerait en tout cas en vigueur dans sa forme et sa teneur pour les Membres qui l'auraient ratifiée et qui ne ratifieraient pas la convention portant révision.

Article 10

Les versions française et anglaise du texte de la présente Convention font également foi.

Le texte qui précède est le texte authentique de la Convention dûment adoptée par la Conférence générale de l'Organisation internationale du Travail dans sa quarantième session, qui s'est tenue à Genève et qui a été déclarée close le 27 juin 1957.

En foi de quoi ont apposé leurs signatures, ce quatrième jour de juillet 1957.


Convention sur le travail forcé
Convention (N 29) concernant le travail forcé

Adoptée par la Conférence générale de l'Organisation internationale du Travail à sa quatorzième session, le 28 juin 1930
Entrée en vigueur : le ler mai 1932, conformément aux dispositions de l'article 28

La Conférence générale de l'Organisation internationale du Travail,

Convoquée à Genève par le Conseil d'administration du Bureau international du Travail, et s'y étant réunie le 10 juin 1930 en sa quatorzième session,

Après avoir décidé d'adopter diverses propositions relatives au travail forcé ou obligatoire, question comprise dans le premier point de l'ordre du jour de la session, et

Après avoir décidé que ces propositions prendraient la forme d'une convention internationale.

Adopte, ce vingt-huitième jour de juin mil neuf cent trente, la convention ci-après, qui sera dénommée Convention sur le travail forcé, 1930, à ratifier par les Membres de l'Organisation internationale du Travail conformément aux dispositions de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail.

Article 1

1. Tout Membre de l'Organisation internationale du Travail qui ratifie la présente Convention s'engage à supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes dans le plus bref délai possible.

2. En vue de cette suppression totale, le travail forcé ou obligatoire pourra être employé, pendant la période transitoire, uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans les conditions et avec les garanties stipulées par les articles qui suivent.

3. A l'expiration d'un délai de cinq ans à partir de l'entrée en vigueur de la présente Convention et à l'occasion du rapport prévu à l'article 31 ci-dessous, le Conseil d'administration du Bureau international du Travail examinera la possibilité de supprimer sans nouveau délai le travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes et décidera s'il y a lieu d'inscrire cette question à l'ordre du jour de la Conférence.

Article 2

1. Aux fins de la présente Convention, le terme "travail forcé ou obligatoire" désignera tout travail ou service exigé d'un individu sous la menace d'une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de plein gré.

2. Toutefois, le terme "travail forcé ou obligatoire" ne comprendra pas, aux fins de la présente Convention :

a) Tout travail ou service exigé en vertu des lois sur le service militaire obligatoire et affecté à des travaux d'un caractère purement militaire;

b) Tout travail ou service faisant partie des obligations civiques normales des citoyens d'un pays se gouvernant pleinement lui-même;

c) Tout travail ou service exigé d'un individu comme conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire, à la condition que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées;

d) Tout travail ou service exigé dans les cas de force majeure, c'est-à-dire dans les cas de guerre, de sinistres ou menaces de sinistres tels qu'incendies, inondations, famines, tremblements de terre, épidémies et épizooties violentes, invasions d'animaux, d'insectes ou de parasites végétaux nuisibles, et en général toutes circonstances mettant en danger ou risquant de mettre en danger la vie ou les conditions normales d'existence de l'ensemble ou d'une partie de la population;

e) Les menus travaux de village, c'est-à-dire les travaux exécutés dans l'intérêt direct de la collectivité par les membres de celle-ci, travaux qui, de ce chef, peuvent être considérés comme des obligations civiques normales incombant aux membres de la collectivité, à condition que la population elle-même ou ses représentants directs aient le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux.

Article 3

Aux fins de la présente Convention, le terme "autorités compétentes" désignera soit les autorités métropolitaines, soit les autorités centrales supérieures du territoire intéressé.

Article 4

1. Les autorités compétentes ne devront pas imposer ou laisser imposer le travail forcé ou obligatoire au profit de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées.

2. Si une telle forme de travail forcé ou obligatoire au profit de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées existe à la date à laquelle la ratification de la présente Convention par un Membre est enregistrée par le Directeur général du Bureau international du Travail, ce Membre devra supprimer complètement ledit travail forcé ou obligatoire dès la date de l'entrée en vigueur de la présente Convention à son égard.

Article 5

1. Aucune concession accordée à des particuliers, à des compagnies ou à des personnes morales ou privées ne devra avoir pour conséquence l'imposition d'une forme quelconque de travail forcé ou obligatoire en vue de produire ou de recueillir les produits que ces particuliers, compagnies ou personnes morales privées utilisent ou dont ils font le commerce.

2. Si des concessions existantes comportent des dispositions ayant pour conséquence l'imposition d'un tel travail forcé ou obligatoire, ces dispositions devront être rescindées aussitôt que possible afin de satisfaire aux prescriptions de l'article premier de la présente Convention.

Article 6

Les fonctionnaires de l'administration, même lorsqu'ils devront encourager les populations dont ils ont la charge à s'adonner à une forme quelconque de travail, ne devront pas exercer sur ces populations une contrainte collective ou individuelle en vue de les faire travailler pour des particuliers, compagnies ou personnes morales privées.

Article 7

1. Les chefs qui n'exercent pas des fonctions administratives ne devront pas avoir recours au travail forcé ou obligatoire.

2. Les chefs exerçant des fonctions administratives pourront, avec l'autorisation expresse des autorités compétentes, avoir recours au travail forcé ou obligatoire dans les conditions visées à l'article 10 de la présente Convention.

3. Les chefs légalement reconnus et ne recevant pas une rémunération adéquate sous d'autres formes pourront bénéficier de la jouissance de services personnels dûment réglementés, toutes mesures utiles devant être prises pour prévenir les abus.

Article 8

1. La responsabilité de toute décision de recourir au travail forcé ou obligatoire incombera aux autorités civiles supérieures du territoire intéressé.

2. Toutefois, ces autorités pourront déléguer aux autorités locales supérieures le pouvoir d'imposer du travail forcé ou obligatoire dans les cas où ce travail n'aura pas pour effet d'éloigner les travailleurs de leur résidence habituelle. Ces autorités pourront également déléguer aux autorités locales supérieures, pour les périodes et dans les conditions qui seront stipulées par la réglementation prévue à l'article 23 de la présente Convention, le pouvoir d'imposer un travail forcé ou obligatoire pour l'exécution duquel les travailleurs devront s'éloigner de leur résidence habituelle, lorsqu'il s'agira de faciliter le déplacement de fonctionnaires de l'administration dans l'exercice de leurs fonctions et le transport du matériel de l'administration.

Article 9

Sauf dispositions contraires stipulées à l'article 10 de la présente Convention, toute autorité ayant le droit d'imposer du travail forcé ou obligatoire ne devra permettre le recours à cette forme de travail que si elle s'est d'abord assurée :

a) Que le service ou travail à exécuter est d'un intérêt direct et important pour la collectivité appelée à l'exécuter;

b) Que ce service ou travail est d'une nécessité actuelle ou imminente;

c) Qu'il a été impossible de se procurer la main-d'oeuvre volontaire pour l'exécution de ce service ou travail malgré l'offre de salaires et de conditions de travail au moins égaux à ceux qui sont pratiqués dans le territoire intéressé pour des travaux ou services analogues; et

d) Qu'il ne résultera pas du travail ou service un fardeau trop lourd pour la population actuelle, eu égard à la main-d'oeuvre disponible et à son aptitude à entreprendre le travail en question.

Article 10

1. Le travail forcé ou obligatoire demandé à titre d'impôt et le travail forcé ou obligatoire imposé, pour des travaux d'intérêt public, par des chefs qui exercent des fonctions administratives devront être progressivement supprimés.

2. En attendant cette abolition, lorsque le travail forcé ou obligatoire sera demandé à titre d'impôt et lorsque le travail forcé ou obligatoire sera imposé, par des chefs qui exercent des fonctions administratives, en vue de l'exécution de travaux d'intérêt public, les autorités intéressées devront s'assurer préalablement :

a) Que le service ou travail à exécuter est d'un intérêt direct et important pour la collectivité appelée à l'exécuter;

b) Que ce service ou travail est d'une nécessité actuelle ou imminente;

c) Qu'il ne résultera pas du travail ou service un fardeau trop lourd pour la population actuelle, eu égard à la main-d'oeuvre disponible et à son aptitude à entreprendre le travail en question;

d) Que l'exécution de ce travail ou service n'obligera pas les travailleurs à s'éloigner du lieu de leur résidence habituelle;

e) Que l'exécution de ce travail ou service sera dirigée conformément aux exigences de la religion, de la vie sociale ou de l'agriculture.

Article 11

1. Seuls les adultes valides du sexe masculin dont l'âge ne sera pas présumé inférieur à 18 ans ni supérieur à 45 pourront être assujettis au travail forcé ou obligatoire. Sauf pour les catégories de travail visées à l'article 10 de la présente Convention, les limitations et conditions suivantes devront être observées :

a) Reconnaissance préalable, dans tous les cas où cela sera possible, par un médecin désigné par l'administration, de l'absence de toute maladie contagieuse et de l'aptitude physique des intéressés à supporter le travail imposé et les conditions où il sera exécuté;

b) Exemption du personnel des écoles, élèves et professeurs, ainsi que du personnel administratif en général;

c) Maintien dans chaque collectivité du nombre d'hommes adultes et valides indispensables à la vie familiale et sociale;

d) Respect des liens conjugaux et familiaux.

2. Aux fins indiquées par l'alinéa c ci-dessus, la réglementation prévue à l'article 23 de la présente Convention fixera la proportion d'individus de la population permanente mâle et valide qui pourra faire l'objet d'un prélèvement déterminé, sans toutefois que cette proportion puisse, en aucun cas, dépasser 25 % de cette population. En fixant cette proportion, les autorités compétentes devront tenir compte de la densité de la population, de l'époque de l'année et de l'état des travaux à effectuer par les intéressés sur place et à leur propre compte; d'une manière générale, elles devront respecter les nécessités économiques et sociales de la vie normale de la collectivité envisagée.

Article 12

1. La période maximum pendant laquelle un individu quelconque pourra être astreint au travail forcé ou obligatoire sous ses diverses formes ne devra pas dépasser soixante jours par période de douze mois, les jours de voyage nécessaires pour aller au lieu de travail et pour en revenir devant être compris dans ces soixante jours.

2. Chaque travailleur astreint au travail forcé ou obligatoire devra être muni d'un certificat indiquant les périodes de travail forcé ou obligatoire qu'il aura effectuées.

Article 13

1. Les heures normales de travail de toute personne astreinte au travail forcé ou obligatoire devront être les mêmes que celles en usage pour le travail libre et les heures de travail effectuées en sus de la durée normale devront être rémunérées aux mêmes taux que les taux en usage pour les heures supplémentaires des travailleurs libres.

2. Un jour de repos hebdomadaire devra être accordé à toutes les personnes soumises à une forme quelconque de travail forcé ou obligatoire et ce jour devra coïncider autant que possible avec le jour consacré par la tradition ou les usages du pays ou de la région.

Article 14

1. A l'exception du travail prévu à l'article 10 de la présente Convention, le travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes devra être rémunéré en espèces et à des taux qui, pour le même genre de travail, ne devront être inférieurs ni à ceux en vigueur dans la région où les travailleurs sont employés, ni à ceux en vigueur dans la région où les travailleurs ont été recrutés.

2. Dans le cas de travail imposé par des chefs dans l'exercice de leurs fonctions administratives, le paiement de salaires dans les conditions prévues au paragraphe précédent devra être introduit aussitôt que possible.

3. Les salaires devront être versés à chaque travailleur individuellement et non à son chef de tribu ou à toute autre autorité.

4. Les jours de voyage pour aller au lieu de travail et pour en revenir devront être comptés pour le paiement des salaires comme journées de travail.

5. Le présent article n'aura pas pour effet d'interdire la fourniture aux travailleurs des rations alimentaires habituelles comme partie du salaire, ces rations devant être au moins équivalentes à la somme d'argent qu'elles sont censées représenter; mais aucune déduction ne devra être opérée sur le salaire, ni pour l'acquittement des impôts, ni pour la nourriture, les vêtements et le logement spéciaux qui seront fournis aux travailleurs pour les maintenir en état de continuer leur travail eu égard aux conditions spéciales de leur emploi, ni pour la fourniture d'outils.

Article 15

1. Toute législation concernant la réparation des accidents ou des maladies résultant du travail et toute législation prévoyant l'indemnisation des personnes à la charge de travailleurs décédés ou invalides, qui sont ou seront en vigueur sur le territoire intéressé, devront s'appliquer aux personnes assujetties au travail forcé ou obligatoire dans les mêmes conditions qu'aux travailleurs libres.

2. De toute façon, toute autorité employant un travailleur au travail forcé ou obligatoire devra avoir l'obligation d'assurer la subsistance dudit travailleur si un accident ou une maladie résultant de son travail a pour effet de le rendre totalement ou partiellement incapable de subvenir à ses besoins. Cette autorité devra également avoir l'obligation de prendre des mesures pour assurer l'entretien de toute personne effectivement à la charge dudit travailleur en cas d'incapacité ou de décès résultant du travail.

Article 16

1. Les personnes soumises au travail forcé ou obligatoire ne devront pas, sauf dans les cas de nécessité exceptionnelle, être transférées dans des régions où les conditions de nourriture et de climat seraient tellement différentes de celles auxquelles elles ont été accoutumées qu'elles offriraient un danger pour leur santé.

2. Dans aucun cas, un tel transfert de travailleurs ne sera autorisé sans que toutes les mesures d'hygiène et d'habitat qui s'imposent pour leur installation et pour la sauvegarde de leur santé n'aient été strictement appliquées.

3. Lorsqu'un tel transfert ne pourra être évité, des mesures assurant l'adaptation progressive des travailleurs aux nouvelles conditions de nourriture et de climat devront être adoptées après avis ou service médical compétent.

4. Dans les cas où ces travailleurs sont appelés à exécuter un travail régulier auquel ils ne sont pas accoutumés, des mesures devront être prises pour assurer leur adaptation à ce genre de travail, notamment en ce qui concerne l'entraînement progressif, les heures de travail, l'aménagement de repos intercalaires et les améliorations ou accroissements de rations alimentaires qui pourraient être nécessaires.

Article 17

Avant d'autoriser tout recours au travail forcé ou obligatoire pour des travaux de construction ou d'entretien qui obligeront les travailleurs à séjourner sur des lieux de travail pendant une période prolongée, les autorités compétentes devront s'assurer :

1) Que toutes les mesures nécessaires ont été prises pour assurer l'hygiène des travailleurs et leur garantir les soins médicaux indispensables, et que, en particulier : a) ces travailleurs subissent un examen médical avant de commencer les travaux et de nouveaux examens à des intervalles déterminés durant la durée de l'emploi, b) il a été prévu un personnel médical suffisant ainsi que les dispensaires, infirmeries, hôpitaux et matériel nécessaires pour faire face à tous les besoins, et c) la bonne hygiène des lieux de travail, l'approvisionnement des travailleurs en eau, en vivres, en combustibles et matériel de cuisine ont été assurés d'une manière satisfaisante et des vêtements et un logement satisfaisants ont été prévus s'il est nécessaire;

2) Que des mesures appropriées ont été prises pour assurer la subsistance de la famille du travailleur, notamment en facilitant l'envoi d'une partie du salaire à celle-ci, par un procédé sûr, avec l'assentiment ou sur la demande du travailleur;

3) Que les voyages des travailleurs pour aller au lieu du travail et pour en revenir seront assurés par l'administration, sous sa responsabilité et à ses frais et que l'administration facilitera ces voyages en utilisant dans la plus large mesure possible tous les moyens de transport disponibles;

4) Que, en cas de maladie ou d'accident du travailleur entraînant une incapacité de travail d'une certaine durée, le rapatriement du travailleur sera assuré aux frais de l'administration;

5) Que tout travailleur qui désirerait rester sur place comme travailleur libre, à l'expiration de sa période de travail forcé ou obligatoire, aura la faculté de le faire sans être déchu, pendant une période de deux ans, de ses droits au rapatriement gratuit.

Article 18

1. Le travail forcé ou obligatoire pour le transport de personnes ou de marchandises, par exemple pour le portage et le pagayage, devra être supprimé dans le plus bref délai possible et, en attendant cette suppression, les autorités compétentes devront édicter des règlements fixant notamment : a) l'obligation de n'utiliser ce travail que pour faciliter le déplacement de fonctionnaires de l'administration dans l'exercice de leurs fonctions, ou le transport du matériel de l'administration, ou, en cas de nécessité absolument urgente, le transport d'autres personnes que des fonctionnaires; b) l'obligation de n'employer à de tels transports que des hommes reconnus physiquement aptes à ce travail par un examen médical préalable, dans tous les cas où cet examen est possible; dans les cas où il ne sera pas possible, la personne employant cette main-d'oeuvre devra s'assurer, sous sa responsabilité, que les travailleurs employés ont l'aptitude physique requise et ne souffrent pas d'une maladie contagieuse; c) la charge maximum à porter par les travailleurs; d) le parcours maximum qui pourra être imposé à ces travailleurs du lieu de leur résidence; e) le nombre maximum de jours par mois ou par toute autre période, pendant lesquels ces travailleurs pourront être réquisitionnés, en comprenant dans ce nombre les journées du voyage de retour; f) les personnes qui sont autorisées à faire appel à cette forme de travail forcé ou obligatoire ainsi que la mesure dans laquelle elles ont le droit d'y recourir.

2. En fixant les maxima dont il est question sous les lettres, c, d, e du paragraphe précédent, les autorités compétentes devront tenir compte des divers éléments à considérer, notamment de l'aptitude physique de la population qui devra subir la réquisition, de la nature de l'itinéraire à parcourir, ainsi que des conditions climatiques.

3. Les autorités compétentes devront, en outre, prendre des dispositions pour que le trajet quotidien normal des porteurs ne dépasse pas une distance correspondant à la durée moyenne d'une journée de travail de huit heures, étant entendu que, pour la déterminer, on devra tenir compte non seulement de la charge à porter et de la distance à parcourir, mais encore de l'état de la route, de l'époque de l'année et de tous autres éléments à considérer; s'il était nécessaire d'imposer aux porteurs des heures de marche supplémentaires, celles-ci devront être rémunérées à des taux plus élevés que les taux normaux.

Article 19

1. Les autorités compétentes ne devront autoriser le recours aux cultures obligatoires que dans le but de prévenir la famine ou une disette de produits alimentaires et toujours sous la réserve que les denrées ou les produits ainsi obtenus devront rester la propriété des individus ou de la collectivité qui les auront produits.

2. Le présent article ne devra pas avoir pour effet, lorsque la production se trouve organisée suivant la loi et la coutume, sur une base communale et lorsque les produits ou les bénéfices provenant de la vente de ces produits restent la propriété de la collectivité, de supprimer l'obligation pour les membres de la collectivité de s'acquitter du travail ainsi imposé.

Article 20

Les législations prévoyant une répression collective applicable à une collectivité entière pour les délits commis par quelques-uns de ses membres ne devront pas comporter le travail forcé ou obligatoire pour une collectivité comme une des méthodes de répression.

Article 21

Il ne sera pas fait appel au travail forcé ou obligatoire pour les travaux souterrains à exécuter dans les mines.

Article 22

Les rapports annuels que les Membres qui ratifient la présente Convention s'engagent à présenter au Bureau international du Travail, conformément aux dispositions de l'article 22 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, sur les mesures prises par eux pour donner effet aux dispositions de la présente Convention, devront contenir des informations aussi complètes que possible, pour chaque territoire intéressé, sur la mesure dans laquelle il aura été fait appel au travail forcé ou obligatoire dans ce territoire, ainsi que sur les points suivants : fins auxquelles ce travail aura été effectué; taux de morbidité et de mortalité; heures de travail; méthodes de paiement des salaires et taux de ces derniers; ainsi que tous autres renseignements pertinents.

Article 23

1. Pour donner effet aux dispositions de la présente Convention, les autorités compétentes devront promulguer une réglementation complète et précise sur l'emploi du travail forcé ou obligatoire.

2. Cette réglementation devra comporter, notamment, des règles permettant à chaque personne assujettie au travail forcé ou obligatoire de présenter aux autorités toutes réclamations relatives aux conditions de travail qui lui sont faites et lui donnant des garanties que ces réclamations seront examinées et prises en considération.

Article 24

Des mesures appropriées devront être prises dans tous les cas pour assurer la stricte application des règlements concernant l'emploi du travail forcé ou obligatoire soit par l'extension au travail forcé ou obligatoire des attributions de tout organisme d'inspection déjà créé pour la surveillance du travail libre, soit par tout autre système convenable. Des mesures devront également être prises pour que ces règlements soient portés à la connaissance des personnes assujetties au travail forcé ou obligatoire.

Article 25

Le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales et tout Membre ratifiant la présente Convention aura l'obligation de s'assurer que les sanctions imposées par la loi sont réellement efficaces et strictement appliquées.

Article 26

1. Tout Membre de l'Organisation internationale du Travail qui ratifie la présente Convention s'engage à l'appliquer aux territoires soumis à sa souveraineté, juridiction, protection, suzeraineté, tutelle ou autorité, dans la mesure où il a le droit de souscrire des obligations touchant à des questions de juridiction intérieure. Toutefois, si ce Membre veut se prévaloir des dispositions de l'article 35 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, il devra accompagner sa ratification d'une déclaration faisant connaître :

1) Les territoires dans lesquels il entend appliquer intégralement les dispositions de la présente Convention;

2) Les territoires dans lesquels il entend appliquer les dispositions de la présente Convention avec des modifications et en quoi consistent lesdites modifications;

3) Les territoires pour lesquels il réserve sa décision.

2. La déclaration susmentionnée sera réputée partie intégrante de la ratification et portera des effets identiques. Tout Membre qui formulera une telle déclaration aura la faculté de renoncer, par une nouvelle déclaration, à tout ou partie des réserves contenues, en vertu des alinéas 2 et 3 ci-dessus, dans sa déclaration antérieure.

Article 27

Les ratifications officielles de la présente Convention dans les conditions établies par la Constitution de l'Organisation internationale du Travail seront communiquées au Directeur général du Bureau international du Travail et par lui enregistrées.

Article 28

1. La présente Convention ne liera que les Membres de l'Organisation internationale du Travail dont la ratification aura été enregistrée au Bureau international du Travail.

2. Elle entrera en vigueur douze mois après que les ratifications de deux Membres auront été enregistrées par le Directeur général.

3. Par la suite, cette Convention entrera en vigueur pour chaque Membre douze mois après la date où sa ratification aura été enregistrée.

Article 29

Aussitôt que les ratifications de deux Membres de l'Organisation internationale du Travail auront été enregistrées au Bureau international du Travail, le Directeur général du Bureau international du Travail notifiera ce fait à tous les Membres de l'Organisation internationale du Travail. Il leur notifiera également l'enregistrement des ratifications qui lui seront ultérieurement communiquées par tous autres Membres de l'Organisation.

Article 30

1. Tout Membre ayant ratifié la présente Convention peut la dénoncer à l'expiration d'une période de dix années après la date de la mise en vigueur initiale de la Convention, par un acte communiqué au Directeur général du Bureau international du Travail et par lui enregistré. La dénonciation ne prendra effet qu'une année après avoir été enregistrée au Bureau international du Travail.

2. Tout Membre ayant ratifié la présente Convention qui, dans le délai d'une année après l'expiration de la période de dix années mentionnée au paragraphe précédent, ne fera pas usage de la faculté de dénonciation prévue par le présent article, sera lié pour une nouvelle période de cinq années, et par la suite pourra dénoncer la présente Convention à l'expiration de chaque période de cinq années dans les conditions prévues au présent article.

Article 31

A l'expiration de chaque période de cinq années à compter de l'entrée en vigueur de la présente Convention, le Conseil d'administration du Bureau international du Travail devra présenter à la Conférence générale un rapport sur l'application de la présente Convention et décidera s'il y a lieu d'inscrire à l'ordre du jour de la Conférence la question de sa révision totale ou partielle.

Article 32

1. Au cas où la Conférence générale adopterait une nouvelle convention portant révision totale ou partielle de la présente Convention, la ratification par un Membre de la nouvelle convention portant révision entraînerait de plein droit dénonciation de la présente Convention sans condition de délai, nonobstant l'article 30 ci-dessus, sous réserve que la nouvelle convention portant révision soit entrée en vigueur.

2. A partir de la date de l'entrée en vigueur de la nouvelle convention portant révision, la présente Convention cesserait d'être ouverte à la ratification des Membres.

3. La présente Convention demeurerait toutefois en vigueur dans sa forme et sa teneur pour les Membres qui l'auraient ratifiée et qui ne ratifieraient pas la nouvelle convention portant révision.

Article 33

Les textes français et anglais de la présente Convention feront foi l'un et l'autre.


La Lutte contre la discrimination

  Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Adoptée et ouverte à la signature et à la ratification par l'Assemblée générale dans sa résolution 2106 A(XX) du 21 décembre 1965
Entrée en vigueur : le 4 janvier 1969, conformément aux dispositions de l'article 19

Les Etats parties à la présente convention,

Considérant que la Charte des Nations Unies est fondée sur les principes de la dignité et de l'égalité de tous les êtres humains, et que tous les Etats Membres se sont engagés à agir, tant conjointement que séparément, en coopération avec l'Organisation, en vue d'atteindre l'un des buts des Nations Unies, à savoir : développer et encourager le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion,

Considérant que la Déclaration universelle des droits de l'homme proclame que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit et que chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés qui y sont énoncés, sans distinction aucune notamment de race, de couleur ou d'origine nationale,

Considérant que tous les hommes sont égaux devant la loi et ont droit à une égale protection de la loi contre toute discrimination et contre toute incitation à la discrimination,

Considérant que les Nations Unies ont condamné le colonialisme et toutes les pratiques de ségrégation et de discrimination dont il s'accompagne, sous quelque forme et en quelque endroit qu'ils existent, et que la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, du 14 décembre 1960 [résolution 1514(XV) de l'Assemblée générale], a affirmé et solennellement proclamé la nécessité d'y mettre rapidement et inconditionnellement fin,

Considérant que la Déclaration des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, du 20 novembre 1963 [résolution 1904(XVIII) de l'Assemblée générale], affirme solennellement la nécessité d'éliminer rapidement toutes les formes et toutes les manifestations de discrimination raciale dans toutes les parties du monde et d'assurer la compréhension et le respect de la dignité de la personne humaine,

Convaincus que toute doctrine de supériorité fondée sur la différenciation entre les races est scientifiquement fausse, moralement condamnable et socialement injuste et dangereuse et que rien ne saurait justifier, où que ce soit, la discrimination raciale, ni en théorie ni en pratique,

Réaffirmant que la discrimination entre les être humains pour des motifs fondés sur la race, la couleur ou l'origine ethnique est un obstacle aux relations amicales et pacifiques entre les nations et est susceptible de troubler la paix et la sécurité entre les peuples ainsi que la coexistence harmonieuse des personnes au sein d'un même Etat,

Convaincus que l'existence de barrières raciales est incompatible avec les idéals de toute société humaine,

Alarmés par les manifestations de discrimination raciale qui existent encore dans certaines régions du monde et par les politiques gouvernementales fondées sur la supériorité ou la haine raciale, telles que les politiques d'apartheid, de ségrégation ou de séparation,

Résolus à adopter toutes les mesures nécessaires pour l'élimination rapide de toutes les formes et de toutes les manifestations de discrimination raciale et à prévenir et combattre les doctrines et pratiques racistes afin de favoriser la bonne entente entre les races et d'édifier une communauté internationale affranchie de toutes les formes de ségrégation et de discrimination raciales,

Ayant présentes à l'esprit la Convention concernant la discrimination en matière d'emploi et de profession adoptée par l'Organisation internationale du Travail en 1958 et la Convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l'enseignement adoptée par l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture en 1960,

Désireux de donner effet aux principes énoncés dans la Déclaration des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et d'assurer le plus rapidement possible l'adoption de mesures pratiques à cette fin,

Sont convenus de ce qui suit :

Première Partie

Article premier

1. Dans la présente Convention, l'expression "discrimination raciale" vise toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique, qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice, dans des conditions d'égalité, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique.

2. La présente Convention ne s'applique pas aux distinctions, exclusions, restrictions ou préférences établies par un Etat partie à la Convention selon qu'il s'agit de ses ressortissants ou de non-ressortissants.

3. Aucune disposition de la présente Convention ne peut être interprétée comme affectant de quelque manière que ce soit les dispositions législatives des Etats parties à la Convention concernant la nationalité, la citoyenneté ou la naturalisation, à condition que ces dispositions ne soient pas discriminatoires à l'égard d'une nationalité particulière.

4. Les mesures spéciales prises à seule fin d'assurer comme il convient le progrès de certains groupes raciaux ou ethniques ou d'individus ayant besoin de la protection qui peut être nécessaire pour leur garantir la jouissance et l'exercice des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans des conditions d'égalité ne sont pas considérées comme des mesures de discrimination raciale, à condition toutefois qu'elles n'aient pas pour effet le maintien de droits distincts pour des groupes raciaux différents et qu'elles ne soient pas maintenues en vigueur une fois atteints les objectifs auxquels elles répondaient.

Article 2

1. Les Etats parties condamnent la discrimination raciale et s'engagent à poursuivre par tous les moyens appropriés et sans retard une politique tendant à éliminer toute forme de discrimination raciale et à favoriser l'entente entre toutes les races, et, à cette fin :

a) Chaque Etat partie s'engage à ne se livrer à aucun acte ou pratique de discrimination raciale contre des personnes, groupes de personnes ou institutions et à faire en sorte que toutes les autorités publiques et institutions publiques, nationales et locales, se conforment à cette obligation;

b) Chaque Etat partie s'engage à ne pas encourager, défendre ou appuyer la discrimination raciale pratiquée par une personne ou une organisation quelconque;

c) Chaque Etat partie doit prendre des mesures efficaces pour revoir les politiques gouvernementales nationales et locales et pour modifier, abroger ou annuler toute loi et toute disposition réglementaire ayant pour effet de créer la discrimination raciale ou de la perpétuer là où elle existe;

d) Chaque Etat partie doit, par tous les moyens appropriés, y compris, si les circonstances l'exigent, des mesures législatives, interdire la discrimination raciale pratiquée par des personnes, des groupes ou des organisations et y mettre fin;

e) Chaque Etat partie s'engage à favoriser, le cas échéant, les organisations et mouvements intégrationnistes multiraciaux et autres moyens propres à éliminer les barrières entre les races, et à décourager ce qui tend à renforcer la division raciale.

2. Les Etats parties prendront, si les circonstances l'exigent, dans les domaines social, économique, culturel et autres, des mesures spéciales et concrètes pour assurer comme il convient le développement ou la protection de certains groupes raciaux ou d'individus appartenant à ces groupes en vue de leur garantir, dans des conditions d'égalité, le plein exercice des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces mesures ne pourront en aucun cas avoir pour effet le maintien de droits inégaux ou distincts pour les divers groupes raciaux, une fois atteints les objectifs auxquels elles répondaient.

Article 3

Les Etats parties condamnent spécialement la ségrégation raciale et l'apartheid et s'engagent à prévenir, à interdire et à éliminer sur les territoires relevant de leur juridiction toutes les pratiques de cette nature.

Article 4

Les Etats parties condamnent toute propagande et toutes organisations qui s'inspirent d'idées ou de théories fondées sur la supériorité d'une race ou d'un groupe de personnes d'une certaine couleur ou d'une certaine origine ethnique, ou qui prétendent justifier ou encourager toute forme de haine et de discrimination raciales; ils s'engagent à adopter immédiatement des mesures positives destinées à éliminer toute incitation à une telle discrimination, ou tous actes de discrimination, et, à cette fin, tenant dûment compte des principes formulés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et des droits expressément énoncés à l'article 5 de la présente Convention, ils s'engagent notamment :

a) A déclarer délits punissables par la loi toute diffusion d'idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale, toute incitation à la discrimination raciale, ainsi que tous actes de violence, ou provocation à de tels actes, dirigés contre toute race ou tout groupe de personnes d'une autre couleur ou d'une autre origine ethnique, de même que toute assistance apportée à des activités racistes, y compris leur financement;

b) A déclarer illégales et à interdire les organisations ainsi que les activités de propagande organisée et tout autre type d'activité de propagande qui incitent à la discrimination raciale et qui l'encouragent et à déclarer délit punissable par la loi la participation à ces organisations ou à ces activités;

c) A ne pas permettre aux autorités publiques ni aux institutions publiques, nationales ou locales, d'inciter à la discrimination raciale ou de l'encourager.

Article 5

Conformément aux obligations fondamentales énoncées à l'article 2 de la présente Convention, les Etats parties s'engagent à interdire et à éliminer la discrimination raciale sous toute ses formes et à garantir le droit de chacun à l'égalité devant la loi sans distinction de race, de couleur ou d'origine nationale ou ethnique, notamment dans la jouissance des droits suivants : a) Droit à un traitement égal devant les tribunaux et tout autre organe administrant la justice;

b) Droit à la sûreté de la personne et à la protection de l'Etat contre les voies de fait ou les sévices de la part soit de fonctionnaires du gouvernement, soit de tout individu, groupe ou institution;

c) Droits politiques, notamment droit de participer aux élections -- de voter et d'être candidat -- selon le système du suffrage universel et égal, droit de prendre part au gouvernement ainsi qu'à la direction des affaires publiques, à tous les échelons, et droit d'accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions publiques;

d) Autres droits civils, notamment :

i) Droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l'intérieur d'un Etat;

ii) Droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays;

iii) Droit à une nationalité;

iv) Droit de se marier et de choisir son conjoint;

v) Droit de toute personne, aussi bien seule qu'en association, à la propriété;

vi) Droit d'hériter;

vii) Droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion;

viii) Droit à la liberté d'opinion et d'expression;

ix) Droit à la liberté de réunion et d'association pacifiques;

e) Droits économiques, sociaux et culturels, notamment :

i) Droits au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail, à la protection contre le chômage, à un salaire égal pour un travail égal, à une rémunération équitable et satisfaisante;

ii) Droit de fonder des syndicats et de s'affilier à des syndicats;

iii) Droit au logement;

iv) Droit à la santé, aux soins médicaux, à la sécurité sociale et aux services sociaux;

v) Droit à l'éducation et à la formation professionnelle;

vi) Droit de prendre part, dans des conditions d'égalité, aux activités culturelles; f) Droit d'accès à tous lieux et services destinés à l'usage du public, tels que moyens de transport, hôtels, restaurants, cafés, spectacles et parcs.

Article 6

Les Etats parties assureront à toute personne soumise à leur juridiction une protection et une voie de recours effectives, devant les tribunaux nationaux et autres organismes d'Etat compétents, contre tous actes de discrimination raciale qui, contrairement à la présente Convention, violeraient ses droits individuels et ses libertés fondamentales, ainsi que le droit de demander à ces tribunaux satisfaction ou réparation juste et adéquate pour tout dommage dont elle pourrait être victime par suite d'une telle discrimination.

Article 7

Les Etats parties s'engagent à prendre des mesures immédiates et efficaces, notamment dans les domaines de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et de l'information, pour lutter contre les préjugés conduisant à la discrimination raciale et favoriser la compréhension, la tolérance et l'amitié entre nations et groupes raciaux ou ethniques, ainsi que pour promouvoir les buts et les principes de la Charte des Nations Unies, de la Déclaration universelle des droits de l'homme, de la Déclaration des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et de la présente Convention.

Deuxième Partie

Article 8

1. Il est constitué un Comité pour l'élimination de la discrimination raciale (ci-après dénommé le Comité) composé de dix-huit experts connus pour leur haute moralité et leur impartialité, qui sont élus par les Etats parties parmi leurs ressortissants et qui siègent à titre individuel, compte tenu d'une répartition géographique équitable et de la représentation des différentes formes de civilisation ainsi que des principaux systèmes juridiques.

2. Les membres du Comité sont élus au scrutin secret sur une liste de candidats désignés par les Etats parties. Chaque Etat partie peut désigner un candidat choisi parmi ses ressortissants.

3. La première élection aura lieu six mois après la date de l'entrée en vigueur de la présente Convention. Trois mois au moins avant la date de chaque élection, le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies envoie une lettre aux Etats parties pour les inviter à présenter leurs candidatures dans un délai de deux mois. Le Secrétaire général dresse une liste par ordre alphabétique de tous les candidats ainsi désignés, avec indication des Etats parties qui les ont désignés, et la communique aux Etats parties.

4. Les membres du Comité sont élus au cours d'une réunion des Etats parties convoquée par le Secrétaire général au Siège de l'Organisation des Nations Unies. A cette réunion où le quorum est constitué par les deux tiers des Etats parties, sont élus membres du Comité les candidats qui obtiennent le plus grand nombre de voix et la majorité absolue des votes des représentants des Etats parties présents et votants.

5.

a) Les membres du Comité sont élus pour quatre ans. Toutefois, le mandat de neuf des membres élus lors de la première élection prendra fin au bout de deux ans; immédiatement après la première élection, le nom de ces neuf membres sera tiré au sort par le Président du Comité;

b) Pour remplir les vacances fortuites, l'Etat partie dont l'expert a cessé d'exercer ses fonctions de membre du Comité nommera un autre expert parmi ses ressortissants, sous réserve de l'approbation du Comité;

6. Les Etats parties prennent à leur charge les dépenses des membres du Comité pour la période où ceux-ci s'acquittent de fonctions au Comité.

Article 9

1. Les Etats parties s'engagent à présenter au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, pour examen par le Comité, un rapport sur les mesures d'ordre législatif, judiciaire, administratif ou autre qu'ils ont arrêtées et qui donnent effet aux dispositions de la présente Convention : a) dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la Convention, pour chaque Etat intéressé en ce qui le concerne et b) par la suite, tous les deux ans et, en outre, chaque fois que le Comité en fera la demande. Le Comité peut demander des renseignements complémentaires aux Etats parties.

2. Le Comité soumet chaque année à l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies, par l'intermédiaire du Secrétaire général, un rapport sur ses activités et peut faire des suggestions et des recommandations d'ordre général fondées sur l'examen des rapports et des renseignements reçus des Etats parties. Il porte ces suggestions et recommandations d'ordre général à la connaissance de l'Assemblée générale avec, le cas échéant, les observations des Etats parties.

Article 10

1. Le Comité adopte son règlement intérieur.

2. Le Comité élit son bureau pour une période de deux ans.

3. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies assure le secrétariat du Comité.

4. Le Comité tient normalement ses réunions au Siège de l'Organisation des Nations Unies.

Article 11

1. Si un Etat partie estime qu'un autre Etat également partie n'applique pas les dispositions de la présente Convention, il peut appeler l'attention du Comité sur la question. Le Comité transmet alors la communication à l'Etat partie intéressé. Dans un délai de trois mois, l'Etat destinataire soumet au Comité des explications ou déclarations écrites éclaircissant la question et indiquant, le cas échéant, les mesures qui peuvent avoir été prises par ledit Etat pour remédier à la situation.

2. Si, dans un délai de six mois à compter de la date de réception de la communication originale par l'Etat destinataire, la question n'est pas réglée à la satisfaction des deux Etats, par voie de négociations bilatérales ou par toute autre procédure qui serait à leur disposition, l'un comme l'autre auront le droit de la soumettre à nouveau au Comité en adressant une notification au Comité ainsi qu'à l'autre Etat intéressé.

3. Le Comité ne peut connaître d'une affaire qui lui est soumise conformément au paragraphe 2 du présent article qu'après s'être assuré que tous les recours internes disponibles ont été utilisés ou épuisés, conformément aux principes de droit international généralement reconnus. Cette règle ne s'applique pas si les procédures de recours excèdent des délais raisonnables.

4. Dans toute affaire qui lui est soumise, le Comité peut demander aux Etats parties en présence de lui fournir tout renseignement complémentaire pertinent.

5. Lorsque le Comité examine une question en application du présent article, les Etats parties intéressés ont le droit de désigner un représentant qui participera sans droit de vote aux travaux du Comité pendant toute la durée des débats.

Article 12

1.

a) Une fois que le Comité a obtenu et dépouillé tous les renseignements qu'il juge nécessaires, le Président désigne une Commission de conciliation ad hoc (ci-après dénommée la Commission) composée de cinq personnes qui peuvent ou non être membres du Comité. Les membres en sont désignés avec l'assentiment entier et unanime des parties au différend et la Commission met ses bons offices à la disposition des Etats intéressés, afin de parvenir à une solution amiable de la question, fondée sur le respect de la présente Convention.

b) Si les Etats parties au différend ne parviennent pas à une entente sur tout ou partie de la composition de la Commission dans un délai de trois mois, les membres de la Commission qui n'ont pas l'assentiment des Etats parties au différend sont élus au scrutin secret parmi les membres du Comité, à la majorité des deux tiers des membres du Comité.

2. Les membres de la Commission siègent à titre individuel. Ils ne doivent pas être ressortissants de l'un des Etats parties au différend ni d'un Etat qui n'est pas partie à la présente Convention.

3. La Commission élit son Président et adopte son règlement intérieur.

4. La Commission tient normalement ses réunions au Siège de l'Organisation des Nations Unies ou en tout autre lieu approprié que déterminera la Commission.

5. Le secrétariat prévu au paragraphe 3 de l'article 10 de la présente Convention prête également ses services à la Commission chaque fois qu'un différend entre des Etats parties entraîne la constitution de la Commission.

6. Toutes les dépenses des membres de la Commission sont réparties également entre les Etats parties au différend, sur la base d'un état estimatif établi par le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

7. Le Secrétaire général sera habilité, si besoin est, à défrayer les membres de la Commission de leurs dépenses, avant que le remboursement en ait été effectué par les Etats parties au différend conformément au paragraphe 6 du présent article.

8. Les renseignements obtenus et dépouillés par le Comité sont mis à la disposition de la Commission, et la Commission peut demander aux Etats intéressés de lui fournir tout renseignement complémentaire pertinent.

Article 13

1. Après avoir étudié la question sous tous ses aspects, la Commission prépare et soumet au Président du Comité un rapport contenant ses conclusions sur toutes les questions de fait relatives au litige entre les parties et renfermant les recommandations qu'elle juge opportunes en vue de parvenir à un règlement amiable au différend.

2. Le Président du Comité transmet le rapport de la Commission à chacun des Etats parties au différend. Lesdits Etats font savoir au Président du Comité, dans un délai de trois mois, s'ils acceptent, ou non, les recommandations contenues dans le rapport de la Commission.

3. Une fois expiré le délai prévu au paragraphe 2 du présent article, le Président du Comité communique le rapport de la Commission et les déclarations des Etats parties intéressés aux autres Etats parties à la Convention.

Article 14

1. Tout Etat partie peut déclarer à tout moment qu'il reconnaît la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant de personnes ou de groupes de personnes relevant de sa juridiction qui se plaignent d'être victimes d'une violation, par ledit Etat partie, de l'un quelconque des droits énoncés dans la présente Convention. Le Comité ne reçoit aucune communication intéressant un Etat partie qui n'a pas fait une telle déclaration.

2. Tout Etat partie qui fait une déclaration conformément au paragraphe 1 du présent article peut créer ou désigner un organisme dans le cadre de son ordre juridique national qui aura compétence pour recevoir et examiner les pétitions émanant de personnes ou de groupes de personnes relevant de la juridiction dudit Etat qui se plaignent d'être victimes d'une violation de l'un quelconque des droits énoncés dans la présente Convention et qui ont épuisé les autres recours locaux disponibles.

3. La déclaration faite conformément au paragraphe 1 du présent article et le nom de tout organisme créé ou désigné conformément au paragraphe 2 du présent article sont déposés par l'Etat partie intéressé auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, qui en communique copie aux autres Etats parties. La déclaration peut être retirée à tout moment au moyen d'une notification adressée au Secrétaire général, mais ce retrait n'affecte pas les communications dont le Comité est déjà saisi.

4. L'organisme créé ou désigné conformément au paragraphe 2 du présent article devra tenir un registre des pétitions et des copies certifiées conformes du registre seront déposées chaque année auprès du Secrétaire général par les voies appropriées, étant entendu que le contenu desdites copies ne sera pas divulgué au public.

5. S'il n'obtient pas satisfaction de l'organisme créé ou désigné conformément au paragraphe 2 du présent article, le pétitionnaire a le droit d'adresser, dans les six mois, une communication à cet effet au Comité.

6.

a) Le Comité porte, à titre confidentiel, toute communication qui lui est adressée à l'attention de l'Etat partie qui a prétendument violé l'une quelconque des dispositions de la Convention, mais l'identité de la personne ou des groupes de personnes intéressés ne peut être révélée sans le consentement exprès de ladite personne ou desdits groupes de personnes. Le Comité ne reçoit pas de communications anonymes.

b) Dans les trois mois qui suivent, ledit Etat soumet par écrit au Comité des explications ou déclarations éclaircissant la question et indiquant, le cas échéant, les mesures qu'il pourrait avoir prises pour remédier à la situation.

7.

a) Le Comité examine les communications en tenant compte de toutes les informations qui lui sont soumises par l'Etat partie intéressé et par le pétitionnaire. Le Comité n'examinera aucune communication d'un pétitionnaire sans s'être assuré que celui-ci a épuisé tous les recours internes disponibles. Toutefois, cette règle ne s'applique pas si les procédures de recours excèdent des délais raisonnables.

b) Le Comité adresse ses suggestions et recommandations éventuelles à l'Etat partie intéressé et au pétitionnaire.

8. Le Comité inclut dans son rapport annuel un résumé de ces communications et, le cas échéant, un résumé des explications et déclarations des Etats parties intéressés ainsi que de ses propres suggestions et recommandations.

9. Le Comité n'a compétence pour s'acquitter des fonctions prévues au présent article que si au moins dix Etats parties à la Convention sont liés par des déclarations faites conformément au paragraphe 1 du présent article.

Article 15

1. En attendant la réalisation des objectifs de la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, contenue dans la résolution 1514 (XV) de l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies, en date du 14 décembre 1960, les dispositions de la présente Convention ne restreignent en rien le droit de pétition accordé à ces peuples par d'autres instruments internationaux ou par l'Organisation des Nations Unies ou ses institutions spécialisées.

2.

a) Le Comité constitué conformément au paragraphe 1 de l'article 8 de la présente Convention reçoit copie des pétitions venant des organes de l'Organisation des Nations Unies qui s'occupent de questions ayant un rapport direct avec les principes et les objectifs de la présente Convention, et exprime une opinion et fait des recommandations au sujet des pétitions reçues lors de l'examen des pétitions émanant des habitants de territoires sous tutelle ou non autonomes ou de tout autre territoire auquel s'applique la résolution 1514(XV) de l'Assemblée générale, et ayant trait à des questions visées par la présente Convention, dont sont saisis lesdits organes.

b) Le Comité reçoit des organes compétents de l'Organisation des Nations Unies copie des rapports concernant les mesures d'ordre législatif, judiciaire, administratif ou autre intéressant directement les principes et objectifs de la présente Convention que les puissances administrantes ont appliquées dans les territoires mentionnés à l'alinéa a) du présent paragraphe et exprime des avis et fait des recommandations à ces organes.

3. Le Comité inclut dans ses rapports à l'Assemblée générale un résumé des pétitions et des rapports qu'il a reçus d'organes de l'Organisation des Nations Unies, ainsi que les expressions d'opinion et les recommandations qu'ont appelées de sa part lesdits pétitions et rapports.

4. Le Comité prie le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies de lui fournir tous renseignements ayant trait aux objectifs de la présente Convention, dont celui-ci dispose au sujet des territoires mentionnés à l'alinéa a) du paragraphe 2 du présent article.

Article 16

Les dispositions de la présente Convention concernant les mesures à prendre pour régler un différend ou liquider une plainte s'appliquent sans préjudice des autres procédures de règlement des différends ou de liquidation des plaintes en matière de discrimination prévues dans des instruments constitutifs de l'Organisation des Nations Unies et de ses institutions spécialisées ou dans des conventions adoptées par ces organisations, et n'empêchent pas les Etats parties de recourir à d'autres procédures pour le règlement d'un différend conformément aux accords internationaux généraux ou spéciaux qui les lient.

Troisième Partie

Article 17

1. La présente Convention est ouverte à la signature de tout Etat Membre de l'Organisation des Nations Unies ou membre de l'une quelconque de ses institutions spécialisées, de tout Etat partie au Statut de la Cour internationale de Justice, ainsi que de tout autre Etat invité par l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies à devenir partie à la présente Convention.

2. La présente Convention est sujette à ratification et les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article 18

1. La présente Convention sera ouverte à l'adhésion de tout Etat visé au paragraphe 1 de l'article 17 de la Convention.

2. L'adhésion se fera par le dépôt d'un instrument d'adhésion auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article 19

1. La présente Convention entrera en vigueur le trentième jour qui suivra la date du dépôt auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies du vingt-septième instrument de ratification ou d'adhésion.

2. Pour chacun des Etats qui ratifieront la présente Convention ou y adhéreront après le dépôt du vingt-septième instrument de ratification ou d'adhésion, ladite Convention entrera en vigueur le trentième jour après la date du dépôt par cet Etat de son instrument de ratification ou d'adhésion.

Article 20

1. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies recevra et communiquera à tous les Etats qui sont ou qui peuvent devenir parties à la présente Convention le texte des réserves qui auront été faites au moment de la ratification ou de l'adhésion. Tout Etat qui élève des objections contre la réserve avisera le Secrétaire général, dans un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la date de ladite communication, qu'il n'accepte pas ladite réserve.

2. Aucune réserve incompatible avec l'objet et le but de la présente Convention ne sera autorisée non plus qu'aucune réserve qui aurait pour effet de paralyser le fonctionnement de l'un quelconque des organes créés par la Convention. Une réserve sera considérée comme rentrant dans les catégories définies ci-dessus si les deux tiers au moins des Etats parties à la Convention élèvent des objections.

3. Les réserves peuvent être retirées à tout moment par voie de notification adressée au Secrétaire général. La notification prendra effet à la date de réception.

Article 21

Tout Etat partie peut dénoncer la présente Convention par voie de notification adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. La dénonciation portera effet un an après la date à laquelle le Secrétaire général en aura reçu notification.

Article 22

Tout différend entre deux ou plusieurs Etats parties touchant l'interprétation ou l'application de la présente Convention qui n'aura pas été réglé par voie de négociation ou au moyen des procédures expressément prévues par ladite Convention sera porté, à la requête de toute partie au différend, devant la Cour internationale de Justice pour qu'elle statue à son sujet, à moins que les parties au différend ne conviennent d'un autre mode de règlement.

Article 23

1. Tout Etat partie peut formuler à tout moment une demande de révision de la présente Convention par voie de notification écrite adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

2. L'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies statuera sur les mesures à prendre, le cas échéant, au sujet de cette demande.

Article 24

Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies informera tous les Etats visés au paragraphe 1 de l'article 17 de la présente Convention : a) Des signatures apposées à la présente Convention et des instruments de ratification et d'adhésion déposés conformément aux articles 17 et 18;

b) De la date à laquelle la présente Convention entrera en vigueur conformément à l'article 19;

c) Des communications et déclarations reçues conformément aux articles 14, 20 et 23;

d) Des dénonciations notifiées conformément à l'article 21.

Article 25

1. La présente Convention, dont les textes anglais, chinois, espagnol, français et russe font également foi, sera déposée aux archives de l'Organisation des Nations Unies.

2. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies fera tenir une copie certifiée conforme de la présente Convention à tous les Etats appartenant à l'une quelconque des catégories mentionnées au paragraphe 1 de l'article 17 de la Convention.


Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid

Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'aparatheid

Adoptée et ouverte à la signature et à la ratification par l'Assemblée générale dans sa résolution 3068(XXVIII) du 30 novembre 1973
Entrée en vigueur : le 18 juillet 1976, conformément aux dispositions de l'article XV

Les Etats parties à la présente convention,

Rappelant les dispositions de la Charte des Nations Unies, par laquelle tous les Membres se sont engagés à agir, tant conjointement que séparément, en coopération avec l'Organisation en vue d'assurer le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion,

Considérant la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui dispose que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits et que chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur ou d'origine nationale,

Considérant la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, dans laquelle l'Assemblée générale a déclaré que le processus de libération est irrésistible et irréversible et que, dans l'intérêt de la dignité humaine, du progrès et de la justice, il faut mettre fin au colonialisme et à toutes les pratiques de ségrégation et de discrimination dont il s'accompagne,

Rappelant que, aux termes de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, les Etats condamnent spécialement la ségrégation raciale et l'apartheid et s'engagent à prévenir, à interdire et à éliminer sur les territoires relevant de leur juridiction toutes les pratiques de cette nature,

Rappelant que, dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, certains actes qui peuvent être qualifiés aussi d'actes d'apartheid constituent un crime au regard du droit international,

Rappelant que, aux termes de la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, les "actes inhumains découlant de la politique d'apartheid" sont qualifiés de crimes contre l'humanité,

Rappelant que l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies a adopté toute une série de résolutions dans lesquelles la politique et les pratiques d'apartheid sont condamnées en tant que crime contre l'humanité,

Rappelant que le Conseil de sécurité a souligné que l'apartheid et son intensification et son élargissement continus troublent et menacent gravement la paix et la sécurité internationales,

Convaincus qu'une convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid permettrait de prendre de nouvelles mesures plus efficaces sur le plan international et sur le plan national en vue d'éliminer et de réprimer le crime d'apartheid,

Sont convenus de ce qui suit :

Article premier

1. Les Etats parties à la présente Convention déclarent que l'apartheid est un crime contre l'humanité et que les actes inhumains résultant des politiques et pratiques d'apartheid et autres politiques et pratiques semblables de ségrégation et de discrimination raciales, définis à l'article II de la Convention, sont des crimes qui vont à l'encontre des normes du droit international, en particulier des buts et des principes de la Charte des Nations Unies, et qu'ils constituent une menace sérieuse pour la paix et la sécurité internationales.

2. Les Etats parties à la présente Convention déclarent criminels les organisations, les institutions et les individus qui commettent le crime d'apartheid.

Article II

Aux fins de la présente Convention, l'expression "crime d'apartheid", qui englobe les politiques et pratiques semblables de ségrégation et de discrimination raciales, telles qu'elles sont pratiquées en Afrique australe, désigne les actes inhumains indiqués ci-après, commis en vue d'instituer ou d'entretenir la domination d'un groupe racial d'êtres humains sur n'importe quel autre groupe racial d'êtres humains et d'opprimer systématiquement celui-ci;

a) Refuser à un membre ou à des membres d'un groupe racial ou de plusieurs groupes raciaux le droit à la vie et à la liberté de la personne :

i) En ôtant la vie à des membres d'un groupe racial ou de plusieurs groupes raciaux;

ii) En portant gravement atteinte à l'intégrité physique ou mentale, à la liberté ou à la dignité des membres d'un groupe racial ou de plusieurs groupes raciaux, ou en les soumettant à la torture ou à des peines ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants;

iii) En arrêtant arbitrairement et en emprisonnant illégalement les membres d'un groupe racial ou de plusieurs groupes raciaux;

b) Imposer délibérément à un groupe racial ou à plusieurs groupes raciaux des conditions de vie destinées à entraîner leur destruction physique totale ou partielle;

c) Prendre des mesures, législatives ou autres, destinées à empêcher un groupe racial ou plusieurs groupes raciaux de participer à la vie politique, sociale, économique et culturelle du pays et créer délibérément des conditions faisant obstacle au plein développement du groupe ou des groupes considérés, en particulier en privant les membres d'un groupe racial ou de plusieurs groupes raciaux des libertés et droits fondamentaux de l'homme, notamment le droit au travail, le droit de former des syndicats reconnus, le droit à l'éducation, le droit de quitter son pays et d'y revenir, le droit à une nationalité, le droit de circuler librement et de choisir sa résidence, le droit à la liberté d'opinion et d'expression et le droit à la liberté de réunion et d'association pacifiques;

d) Prendre des mesures, y compris des mesures législatives, visant à diviser la population selon des critères raciaux en créant des réserves et des ghettos séparés pour les membres d'un groupe racial ou de plusieurs groupes raciaux, en interdisant les mariages entre personnes appartenant à des groupes raciaux différents, et en expropriant les biens-fonds appartenant à un groupe racial ou à plusieurs groupes raciaux ou à des membres de ces groupes;

e) Exploiter le travail des membres d'un groupe racial ou de plusieurs groupes raciaux, en particulier en les soumettant au travail forcé;

f) Persécuter des organisations ou des personnes, en les privant des libertés et droits fondamentaux, parce qu'elles s'opposent à l'apartheid.

Article III

Sont tenus pour pénalement responsables sur le plan international, et quel que soit le mobile, les personnes, les membres d'organisations et d'institutions et les représentants de l'Etat, qu'ils résident sur le territoire de l'Etat dans lequel les actes sont perpétrés ou dans un autre Etat, qui :

a) Commettent les actes mentionnés à l'article II de la présente Convention, participent à ces actes, les inspirent directement ou conspirent à leur perpétration;

b) Favorisent ou encouragent directement la perpétration du crime d'apartheid ou y coopèrent directement.

Article IV

Les Etats parties à la présente Convention s'engagent :

a) A prendre toutes les mesures, législatives ou autres, nécessaires pour empêcher que le crime d'apartheid et autres politiques ségrégationnistes semblables ou leurs manifestations ne soient encouragés de quelque manière que ce soit ainsi que pour éliminer tout encouragement de cette nature et pour punir les personnes coupables de ce crime;

b) A prendre des mesures législatives, judiciaires et administratives pour poursuivre, faire juger et punir conformément à leur juridiction les personnes responsables ou accusées des actes définis à l'article II de la présente Convention, qu'elles résident ou non sur le territoire de l'Etat dans lequel ces actes ont été perpétrés, et qu'il s'agisse de ressortissants de cet Etat ou d'un autre Etat ou de personnes apatrides.

Article V

Les personnes accusées des actes énumérés à l'article II de la présente Convention peuvent être jugées par un tribunal compétent de tout Etat partie à la Convention qui pourrait avoir juridiction sur lesdites personnes, ou par un tribunal pénal international qui serait compétent à l'égard de ceux des Etats parties qui auront accepté sa compétence.

Article VI

Les Etats parties à la présente Convention s'engagent à accepter et à exécuter conformément à la Charte des Nations Unies les décisions prises par le Conseil de sécurité ayant pour but de prévenir, d'éliminer et de réprimer le crime d'apartheid, ainsi qu'à concourir à l'exécution des décisions adoptées par d'autres organes compétents de l'Organisation des Nations Unies en vue d'atteindre les objectifs de la Convention.

Article VII

1. Les Etats parties à la présente Convention s'engagent à soumettre périodiquement au groupe créé conformément à l'article IX de la Convention des rapports sur les mesures législatives, judiciaires, administratives ou autres qu'ils auront prises pour donner effet aux dispositions de la Convention.

2. Des exemplaires desdits rapports seront transmis, par les soins du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, au Comité spécial de l'apartheid.

Article VIII

Tout Etat partie à la présente Convention peut demander à l'un quelconque des organes compétents de l'Organisation des Nations Unies de prendre, conformément à la Charte des Nations Unies, les mesures qu'il juge appropriées pour prévenir et éliminer le crime d'apartheid.

Article IX

1. Le Président de la Commission des droits de l'homme désignera un groupe composé de trois membres de ladite commission, qui seront en même temps des représentants d'Etats parties à la présente Convention, aux fins d'examiner les rapports présentés par les Etats parties conformément aux dispositions de l'article VII de la Convention.

2. Si la Commission des droits de l'homme ne comprend pas de représentants d'Etats parties à la présente Convention, ou en comprend moins de trois, le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, en consultation avec tous les Etats parties à la Convention, désignera un représentant d'un Etat partie ou des représentants d'Etats parties à la Convention non membres de la Commission des droits de l'homme pour siéger au groupe créé en vertu des dispositions du paragraphe 1 du présent article jusqu'à l'élection à la Commission des droits de l'homme de représentants d'Etats parties à la Convention.

3. Le groupe pourra se réunir pour examiner les rapports présentés conformément aux dispositions de l'article VII pendant une période maximale de cinq jours soit avant l'ouverture soit après la clôture de la session de la Commission des droits de l'homme.

Article X

1. Les Etats parties à la présente Convention habilitent la Commission des droits de l'homme à :

a) Demander aux organes de l'Organisation des Nations Unies, quand ils communiquent des exemplaires de pétitions conformément à l'article 15 de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, d'appeler son attention sur les plaintes concernant des actes qui sont énumérés à l'article II de la présente Convention;

b) Etablir, en se fondant sur les rapports des organes compétents de l'Organisation des Nations Unies et sur les rapports soumis périodiquement par les Etats parties à la présente Convention, une liste des personnes, organisations, institutions et représentants d'Etats qui sont présumés responsables des crimes énumérés à l'article II, ainsi que de ceux contre lesquels des poursuites judiciaires ont été engagées par les Etats parties à la Convention;

c) Demander aux organes compétents de l'Organisation des Nations Unies des renseignements au sujet des mesures prises par les autorités responsables de l'administration de territoires sous tutelle et de territoires non autonomes, ainsi que de tous autres territoires auxquels s'applique la résolution 1514(XV) de l'Assemblée générale, en date du 14 décembre 1960, à l'égard des personnes qui seraient responsables des crimes visés à l'article II et qui sont présumées relever de leur juridiction territoriale et administrative.

2. En attendant que soient atteints les objectifs de la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, qui figure dans la résolution 1514(XV) de l'Assemblée générale, les dispositions de la présente Convention ne restreindront en rien le droit de pétition accordé à ces peuples par d'autres instruments internationaux ou par l'Organisation des Nations Unies et ses institutions spécialisées.

Article XI

1. Les actes énumérés à l'article II de la présente Convention ne seront pas considérés comme crimes politiques aux fins de l'extradition.

2. Les Etats parties à la présente Convention s'engagent à accorder en pareil cas l'extradition conformément à leur législation et aux traités en vigueur.

Article XII

Tout différend entre les Etats parties concernant l'interprétation, l'application ou l'exécution de la présente Convention qui n'aura pas été réglé par voie de négociation sera porté devant la Cour internationale de Justice, sur la demande des Etats parties au différend, à moins que ceux-ci ne soient convenus d'un autre mode de règlement.

Article XIII

La présente Convention est ouverte à la signature de tous les Etats. Tout Etat qui n'aura pas signé la Convention lors de son entrée en vigueur pourra y adhérer.

Article XIV

1. La présente Convention est sujette à ratification. Les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

2. L'adhésion se fera par le dépôt d'un instrument d'adhésion auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article XV

1. La présente Convention entrera en vigueur le trentième jour qui suivra la date du dépôt auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies du vingtième instrument de ratification ou d'adhésion.

2. Pour chacun des Etats qui ratifieront la présente Convention ou y adhéreront après le dépôt du vingtième instrument de ratification ou d'adhésion, la Convention entrera en vigueur le trentième jour après la date du dépôt par cet Etat de son instrument de ratification ou d'adhésion.

Article XVI

Tout Etat partie peut dénoncer la présente Convention par voie de notification écrite adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. La dénonciation prendra effet un an après la date à laquelle le Secrétaire général en aura reçu notification.

Article XVII

1. Tout Etat partie peut, à tout moment, demander la révision de la présente Convention par voie de notification écrite adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

2. L'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies décide des mesures à prendre, le cas échéant, au sujet d'une demande de cette nature.

Article XVIII

Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies informera tous les Etats :

a) Des signatures, ratifications et adhésions au titre des articles XIII et XIV;

b) De la date à laquelle la présente Convention entrera en vigueur conformément à l'article XV;

c) Des dénonciations notifiées conformément à l'article XVI;

d) Des notifications adressées conformément à l'article XVII.

Article XIX

1. La présente Convention, dont les textes anglais, chinois, espagnol, français et russe font également foi, sera déposée aux archives de l'Organisation des Nations Unies.

2. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies fera tenir une copie certifiée conforme de la présente Convention à tous les Etats.


Déclaration sur la race et les préjugés raciaux

Adoptée par acclamation le 27 novembre 1978 à la vingtième session de la Conférence générale de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture à Paris

Préambule

La Conférence générale de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, réunie à Paris, en sa vingtième session, du 24 octobre au 28 novembre 1978,

Rappelant qu'il est dit dans le préambule de l'Acte constitutif de l'UNESCO, adopté le 16 novembre 1945, que "la grande et terrible guerre qui vient de finir a été rendue possible par le reniement de l'idéal démocratique de dignité, d'égalité et de respect de la personne humaine et par la volonté de lui substituer, en exploitant l'ignorance et le préjugé, le dogme de l'inégalité des races et des hommes" et que, selon l'article premier dudit Acte constitutif, l'UNESCO "se propose de contribuer au maintien de la paix et de la sécurité en resserrant par l'éducation, la science et la culture, la collaboration entre nations, afin d'assurer le respect universel de la justice, de la loi, des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion, que la Charte des Nations Unies reconnaît à tous les peuples",

Reconnaissant que, plus de trois décennies après la fondation de l'UNESCO, ces principes ont la même force qu'à l'époque où ils ont été inscrits dans son Acte constitutif,

Consciente du processus de décolonisation et des autres mutations historiques qui ont conduit la plupart des peuples anciennement dominés à recouvrer leur souveraineté, faisant de la communauté internationale un ensemble à la fois universel et diversifié et créant de nouvelles possibilités d'éliminer le fléau du racisme et de mettre fin à ses manifestations odieuses sur tous les plans de la vie sociale et politique, dans le cadre national et international,

Persuadée que l'unité intrinsèque de l'espèce humaine et, par conséquent, l'égalité foncière de tous les être humains et de tous les peuples, reconnue par les expressions les plus élevées de la philosophie, de la morale et de la religion, reflètent un idéal vers lequel convergent aujourd'hui l'éthique et la science,

Persuadée que tous les peuples et tous les groupes humains, quelle que soit leur composition ou leur origine ethnique, contribuent selon leur génie propre au progrès des civilisations et des cultures qui, dans leur pluralité et grâce à leur interpénétration, constituent le patrimoine commun de l'humanité,

Confirmant son adhésion aux principes proclamés par la Charte des Nations Unies et par la Déclaration universelle des droits de l'homme, ainsi que sa volonté de promouvoir la mise en oeuvre des Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme et de la Déclaration concernant l'instauration d'un nouvel ordre économique international,

Résolue à promouvoir également la mise en oeuvre de la Déclaration et de la Convention internationale des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

Prenant note de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, de la Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid et de la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité,

Rappelant également les instruments internationaux déjà adoptés par l'UNESCO et en particulier la Convention et la Recommandation concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l'enseignement, la Recommandation concernant la condition du personnel enseignant, la Déclaration des principes de la coopération culturelle internationale, la Recommandation sur l'éducation pour la compréhension, la coopération et la paix internationales et l'éducation relative aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales, la Recommandation concernant la condition des chercheurs scientifiques et la Recommandation concernant la participation et la contribution des masses populaires à la vie culturelle,

Ayant à l'esprit les quatre déclarations sur la question raciale adoptées par des experts réunis par l'UNESCO,

Réaffirmant sa volonté de s'associer de manière vigoureuse et constructive à la mise en oeuvre du programme de la Décennie de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale, tel qu'il a été défini par l'Assemblée générale des Nations Unies à sa vingt-huitième session,

Constatant avec la préoccupation la plus vive que le racisme, la discrimination raciale, le colonialisme et l'apartheidcontinuent à sévir dans le monde sous des formes toujours renouvelées, tant par le maintien de dispositions législatives et de pratiques de gouvernement et d'administration contraires aux principes des droits de l'homme, que par la permanence de structures marquées par l'injustice et le mépris de la personne humaine et engendrant l'exclusion, l'humiliation et l'exploitation, ou l'assimilation forcée, des membres de groupes défavorisés,

Exprimant son indignation devant ces atteintes à la dignité de l'homme, déplorant les obstacles qu'elles opposent à la compréhension mutuelle entre les peuples et s'alarmant des troubles graves qui risquent d'en résulter pour la paix et la sécurité internationales,

Adopte et proclame solennellement la présente Déclaration sur la race et les préjugés raciaux :

Article premier

1. Tous les êtres humains appartiennent à la même espèce et proviennent de la même souche. Ils naissent égaux en dignité et en droits et font tous partie intégrante de l'humanité.

2. Tous les individus et tous les groupes ont le droit d'être différents, de se concevoir et d'être perçus comme tels. Toutefois, la diversité des formes de vie et le droit à la différence ne peuvent en aucun cas servir de prétexte aux préjugés raciaux; ils ne peuvent légitimer ni en droit ni en fait quelque pratique discriminatoire que ce soit, ni fonder la politique de l'apartheid qui constitue la forme extrême du racisme.

3. L'identité d'origine n'affecte en rien la faculté pour les êtres humains de vivre différemment, ni les différences fondées sur la diversité des cultures, du milieu et de l'histoire, ni le droit de maintenir l'identité culturelle.

4. Tous les peuples du monde sont dotés des mêmes facultés leur permettant d'atteindre la plénitude de développement intellectuel, technique, social, économique, culturel et politique.

5. Les différences entre les réalisations des différents peuples s'expliquent entièrement par des facteurs géographiques, historiques, politiques, économiques, sociaux et culturels. Ces différences ne peuvent en aucun cas servir de prétexte à un quelconque classement hiérarchisé des nations et des peuples.

Article 2

1. Toute théorie faisant état de la supériorité ou de l'infériorité intrinsèque de groupes raciaux ou ethniques qui donnerait aux uns le droit de dominer ou d'éliminer les autres, inférieurs présumés, ou fondant des jugements de valeur sur une différence raciale, est sans fondement scientifique et contraire aux principes moraux et éthiques de l'humanité.

2. Le racisme englobe les idéologies racistes, les attitudes fondées sur les préjugés raciaux, les comportements discriminatoires, les dispositions structurelles et les pratiques institutionnalisées qui provoquent l'inégalité raciale, ainsi que l'idée fallacieuse que les relations discriminatoires entre groupes sont moralement et scientifiquement justifiables; il se manifeste par des dispositions législatives ou réglementaires et par des pratiques discriminatoires, ainsi que par des croyances et des actes antisociaux; il entrave le développement de ses victimes, pervertit ceux qui le mettent en pratique, divise les nations au sein d'elles-mêmes, constitue un obstacle à la coopération internationale, et crée des tensions politiques entre les peuples; il est contraire aux principes fondamentaux du droit international et, par conséquent, il trouble gravement la paix et la sécurité internationales.

3. Le préjugé racial, historiquement lié aux inégalités de pouvoir, se renforçant en raison des différences économiques et sociales entre les individus et les groupes humains, et visant encore aujourd'hui à justifier de telles inégalités, est totalement injustifié.

Article 3

Est incompatible avec les exigences d'un ordre international juste et garantissant le respect des droits de l'homme toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l'origine ethnique ou nationale ou sur l'intolérance religieuse motivée par des considérations racistes, qui détruit ou compromet l'égalité souveraine des Etats et le droit des peuples à l'autodétermination ou qui limite d'une manière arbitraire ou discriminatoire le droit au développement intégral de tout être et groupe humains; ce droit implique un accès en pleine égalité aux moyens de progrès et d'épanouissement collectif et individuel dans un climat qui respecte les valeurs de civilisation et les cultures nationales et universelles.

Article 4

1. Toute entrave au libre épanouissement des êtres humains et à la libre communication entre eux, fondée sur des considérations raciales ou ethniques, est contraire au principe d'égalité en dignité et en droits; elle est inadmissible.

2. Une des violations les plus graves de ce principe est constituée par l'apartheid qui, comme le génocide, est un crime contre l'humanité et qui trouble gravement la paix et la sécurité internationales.

3. D'autres politiques et pratiques de ségrégation et de discrimination raciales constituent des crimes contre la conscience et la dignité de l'humanité et peuvent entraîner des tensions politiques et troubler gravement la paix et la sécurité internationales.

Article 5

1. La culture, oeuvre de tous les humains et patrimoine commun de l'humanité, et l'éducation, au sens le plus large, offrent aux hommes et aux femmes des moyens sans cesse plus efficaces d'adaptation, leur permettant non seulement d'affirmer qu'ils naissent égaux en dignité et en droits, mais aussi de reconnaître qu'ils doivent respecter le droit de tous les groupes humains à l'identité culturelle et au développement de leur vie culturelle propre dans le cadre national et international, étant entendu qu'il appartient à chaque groupe de décider en toute liberté du maintien et, le cas échéant, de l'adaptation ou de l'enrichissement des valeurs qu'il considère comme essentielles à son identité.

2. L'Etat, conformément à ses principes et procédures constitutionnels, ainsi que toutes les autorités compétentes et tout le corps enseignant ont la responsabilité de veiller à ce que les ressources en matière d'éducation de tous les pays soient mises en oeuvre pour combattre le racisme, notamment en faisant en sorte que les programmes et les manuels fassent place à des notions scientifiques et éthiques sur l'unité et la diversité humaines, et soient exempts de distinctions désobligeantes à l'égard d'un peuple; en assurant la formation du personnel enseignant à ces fins; en mettant les ressources du système scolaire à la disposition de tous les groupes de la population sans restriction ni discrimination raciales et en prenant les mesures propres à remédier aux limitations dont souffrent certains groupes raciaux ou ethniques quant au niveau d'éducation et au niveau de vie et à éviter en particulier qu'elles ne soient transmises aux enfants.

3. Les grands moyens d'information et ceux qui les contrôlent ou les servent, ainsi que tout groupe organisé au sein des communautés nationales, sont appelés -- tenant dûment compte des principes formulés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et notamment du principe de la liberté d'expression -- à promouvoir la compréhension, la tolérance et l'amitié entre les individus et les groupes humains et à contribuer à éliminer le racisme, la discrimination raciale et les préjugés raciaux, en particulier en évitant de donner des individus et des différents groupes humains une représentation stéréotypée, partielle, unilatérale ou captieuse. La communication entre les groupes raciaux et ethniques doit être un processus réciproque, leur permettant de s'exprimer et de se faire entendre pleinement et en toute liberté. les grands moyens d'information devraient donc s'ouvrir aux idées des individus et des groupes qui facilitent cette communication.

Article 6

1. L'Etat assume des responsabilités primordiales dans la mise en oeuvre des droits de l'homme et des libertés fondamentales en pleine égalité, en dignité et en droits, par tous les individus et par tous les groupes humains.

2. Dans le cadre de ses compétences et conformément à ses dispositions constitutionnelles, l'Etat devrait prendre toutes les mesures appropriées, y compris par voie législative, notamment dans les domaines de l'éducation, de la culture et de l'information, afin de prévenir, d'interdire et d'éliminer le racisme, la propagande raciste, la ségrégation raciale et l'apartheid, et d'encourager la diffusion des connaissances et des résultats des recherches appropriées en sciences naturelles et sociales sur les causes et la prévention des préjugés raciaux et des attitudes racistes, tenant dûment compte des principes formulés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

3. Etant donné que la législation proscrivant la discrimination raciale ne saurait suffire, il appartient également à l'Etat de la compléter par un appareil administratif chargé d'enquêter de façon systématique sur les cas de discrimination raciale, par un ensemble complet de recours juridiques contre les actes de discrimination raciale, par des programmes d'éducation et de recherche de grande portée destinés à lutter contre les préjugés raciaux et la discrimination raciale, ainsi que par des programmes de mesures positives d'ordre politique, social, éducatif et culturel propres à promouvoir un véritable respect mutuel entre les groupes humains. Lorsque les circonstances le justifient, des programmes spéciaux doivent être mis en oeuvre pour promouvoir l'amélioration de la situation des groupes défavorisés et, lorsqu'il s'agit de nationaux, leur participation effective au processus de prise des décisions de la communauté.

Article 7

A côté des mesures politiques, économiques et sociales, le droit constitue l'un des principaux moyens permettant d'assurer l'égalité, en dignité et en droits, des individus et de réprimer toute propagande, toute organisation et toute pratique qui s'inspirent d'idées ou de théories fondées sur la prétendue supériorité de groupes raciaux ou ethniques ou qui prétendent justifier ou encourager toute forme de haine et de discrimination raciales. Les Etats devraient prendre des mesures juridiques appropriées et assurer leur mise en oeuvre et leur application par tous leurs services, tenant dûment compte des principes formulés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme. Ces mesures juridiques doivent s'insérer dans un cadre politique, économique et social propre à favoriser leur application. Les individus et les autres entités juridiques, publiques ou privées, doivent s'y conformer et contribuer par tous les moyens appropriés à leur compréhension et à leur mise en oeuvre par l'ensemble de la population.

Article 8

1. Ayant le droit à ce que règne sur le plan national et international un ordre économique, social, culturel et juridique tel qu'il puisse exercer toutes ses facultés à entière égalité de droits et de chances, l'individu a les devoirs correspondants envers ses semblables, envers la société dans laquelle il vit et envers la communauté internationale. Il a donc le devoir de promouvoir l'harmonie entre les peuples, de lutter contre le racisme et les préjugés raciaux, et de contribuer par tous les moyens dont il dispose à l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

2. Dans le domaine des préjugés, comportements et pratiques racistes, les spécialistes des sciences exactes et naturelles, des sciences sociales et des études culturelles, ainsi que les organisations et associations scientifiques, sont appelés à entreprendre des recherches objectives sur des bases largement interdisciplinaires; tous les Etats doivent les y encourager.

3. Il incombe, en particulier, à ces spécialistes de veiller, par tous les moyens à leur disposition à ce que leurs travaux ne fassent pas l'objet d'une présentation frauduleuse et à aider le public à en comprendre les enseignements.

Article 9

1. Le principe de l'égalité en dignité et en droits de tous les êtres humains et de tous les peuples, quelles que soient leur race, leur couleur et leur origine, est un principe généralement accepté et reconnu en droit international. En conséquence, toute forme de discrimination raciale pratiquée par l'Etat constitue une violation du droit international qui entraîne sa responsabilité internationale.

2. Des mesures spéciales doivent être prises en vue d'assurer l'égalité en dignité et en droits des individus et des groupes humains partout où cela est nécessaire en évitant de leur donner un caractère qui pourrait paraître discriminatoire sur le plan racial. A cet égard, une attention particulière doit être accordée aux groupes raciaux ou ethniques socialement ou économiquement défavorisés afin de leur assurer, en pleine égalité et sans discrimination ni restriction, la protection des lois et règlements, ainsi que le bénéfice des mesures sociales en vigueur, notamment en matière de logement, d'emploi et de santé, de respecter l'authenticité de leur culture et de leurs valeurs, et de faciliter, en particulier par l'éducation, leur promotion sociale et professionnelle.

3. Les groupes de la population d'origine étrangère, notamment les travailleurs migrants et leurs familles, qui contribuent au développement du pays d'accueil, devront bénéficier de mesures adéquates destinées à leur assurer la sécurité et le respect de leur dignité et de leurs valeurs culturelles et à leur faciliter l'adaptation au milieu d'accueil et la promotion professionnelle en vue de leur réinsertion ultérieure dans leur pays d'origine et de leur contribution à son développement; la possibilité pour leurs enfants de recevoir un enseignement de leur langue maternelle devrait être favorisée.

4. Les déséquilibres existant dans les relations économiques internationales contribuent à exacerber le racisme et les préjugés raciaux; en conséquence, tous les Etats devraient s'efforcer de contribuer à restructurer l'économie internationale sur la base d'une plus grande équité.

Article 10

Les organisations internationales, universelles ou régionales, gouvernementales et non gouvernementales, sont invitées à coopérer et à aider, dans les limites de leurs compétences respectives et de leurs moyens, à la réalisation pleine et entière des principes énoncés dans la présente déclaration, contribuant ainsi à la lutte légitime de tous les hommes, nés égaux en dignité et en droits, contre la tyrannie et l'oppression du racisme, et de la ségrégation raciale, de l'apartheid et du génocide, afin que tous les peuples du monde soient libérés à tout jamais de ces fléaux.



Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction


Proclamée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 25 novembre 1981 (résolution 36/55)

L'Assemblée générale,

Considérant qu'un des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies est celui de la dignité et de l'égalité inhérentes à tous les êtres humains et que tous les Etats Membres se sont engagés à agir, tant conjointement que séparément, en coopération avec l'Organisation des Nations Unies en vue de développer et d'encourager le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans discrimination de race, de sexe, de langue ou de religion,

Considérant que la Déclaration universelle des droits de l'homme et les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme proclament les principes de non-discrimination et d'égalité devant la loi et le droit à la liberté de pensée, de conscience, de religion ou de conviction,

Considérant que le mépris et la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en particulier du droit à la liberté de pensée, de conscience, de religion ou de conviction, quelle qu'elle soit, sont directement ou indirectement à l'origine de guerres et de grandes souffrances infligées à l'humanité, spécialement dans les cas où ils servent de moyen d'ingérence étrangère dans les affaires intérieures d'autres Etats et équivalent à attiser la haine entre les peuples et les nations,

Considérant que la religion ou la conviction constitue pour celui qui la professe un des éléments fondamentaux de sa conception de la vie et que la liberté de religion ou de conviction doit être intégralement respectée et garantie,

Considérant qu'il est essentiel de contribuer à la compréhension, à la tolérance et au respect en ce qui concerne la liberté de religion ou de conviction et de faire en sorte que l'utilisation de la religion ou de la conviction à des fins incompatibles avec la Charte, les autres instruments pertinents de l'Organisation des Nations Unies et les buts et principes de la présente Déclaration ne soit pas admissible,

Convaincue que la liberté de religion ou de conviction devrait également contribuer à la réalisation des buts de paix mondiale, de justice sociale et d'amitié entre les peuples et à l'élimination des idéologies ou pratiques du colonialisme et de la discrimination raciale,

Prenant note avec satisfaction de l'adoption, sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies et des institutions spécialisées, de plusieurs conventions et de l'entrée en vigueur de certaines d'entre elles, visant à éliminer diverses formes de discrimination,

Préoccupée par les manifestations d'intolérance et par l'existence de discrimination en matière de religion ou de conviction que l'on constate encore dans certaines parties du monde,

Résolue à prendre toutes les mesures nécessaires pour éliminer rapidement toutes les formes et manifestations de cette intolérance et à prévenir et combattre toute discrimination fondée sur la religion ou la conviction,

Proclame la présente Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction:

Article premier

1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit implique la liberté d'avoir une religion ou n'importe quelle conviction de son choix, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou en commun, tant en public qu'en privé, par le culte et l'accomplissement des rites, les pratiques et l'enseignement.

2. Nul ne subira de contrainte pouvant porter atteinte à sa liberté d'avoir une religion ou une conviction de son choix.

3. La liberté de manifester sa religion ou sa conviction ne peut faire l'objet que des seules restrictions qui sont prévues par la loi et qui sont nécessaires à la protection de la sécurité publique, de l'ordre public, de la santé ou de la morale ou des libertés et droits fondamentaux d'autrui.

Article 2

1. Nul ne peut faire l'objet de discrimination de la part d'un Etat, d'une institution, d'un groupe ou d'un individu quelconque en raison de sa religion ou de sa conviction.

2. Aux fins de la présente Déclaration, on entend par les termes "intolérance et discrimination fondées sur la religion ou la conviction" toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondées sur la religion ou la conviction et ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou de limiter la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice des droits de l'homme et des libertés fondamentales sur une base d'égalité.

Article 3

La discrimination entre les êtres humains pour des motifs de religion ou de conviction constitue une offense à la dignité humaine et un désaveu des principes de la Charte des Nations Unies et doit être condamnée comme une violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales proclamés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et énoncés en détail dans les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme, et comme un obstacle aux relations amicales et pacifiques entre les nations.

Article 4

1. Tous les Etats prendront des mesures efficaces pour prévenir et éliminer toute discrimination fondée sur la religion ou la conviction, dans la reconnaissance, l'exercice et la jouissance des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans tous les domaines de la vie civile, économique, politique, sociale et culturelle.

2. Tous les Etats s'efforceront d'adopter des mesures législatives ou de rapporter celles qui sont en vigueur, selon le cas, à l'effet d'interdire toute discrimination de ce genre, et de prendre toutes mesures appropriées pour combattre l'intolérance fondée sur la religion ou la conviction en la matière.

Article 5

1. Les parents ou, le cas échéant, les tuteurs légaux de l'enfant ont le droit d'organiser la vie au sein de la famille conformément à leur religion ou leur conviction et en tenant compte de l'éducation morale conformément à laquelle ils estiment que l'enfant doit être élevé.

2. Tout enfant jouit du droit d'accéder, en matière de religion ou de conviction, à une éducation conforme aux voeux de ses parents ou, selon le cas, de ses tuteurs légaux, et ne peut être contraint de recevoir un enseignement relatif à une religion ou une conviction contre les voeux de ses parents ou de ses tuteurs légaux, l'intérêt de l'enfant étant le principe directeur.

3. L'enfant doit être protégé contre toute forme de discrimination fondée sur la religion ou la conviction. Il doit être élevé dans un esprit de compréhension, de tolérance, d'amitié entre les peuples, de paix et de fraternité universelle, de respect de la liberté de religion ou de conviction d'autrui et dans la pleine conscience que son énergie et ses talents doivent être consacrés au service de ses semblables.

4. Dans le cas d'un enfant qui n'est sous la tutelle ni de ses parents ni de tuteurs légaux, les voeux exprimés par ceux-ci, ou toute autre preuve recueillie sur leurs voeux en matière de religion ou de conviction, seront dûment pris en considération, l'intérêt de l'enfant étant le principe directeur.

5. Les pratiques d'une religion ou d'une conviction dans lesquelles un enfant est élevé ne doivent porter préjudice ni à sa santé physique ou mentale ni à son développement complet, compte tenu du paragraphe 3 de l'article premier de la présente Déclaration.

Article 6

Conformément à l'article premier de la présente Déclaration et sous réserve des dispositions du paragraphe 3 dudit article, le droit à la liberté de pensée, de conscience, de religion ou de conviction implique, entre autres, les libertés suivantes:

a) La liberté de pratiquer un culte et de tenir des réunions se rapportant à une religion ou à une conviction et d'établir et d'entretenir des lieux à ces fins;

b) La liberté de fonder et d'entretenir des institutions charitables ou humanitaires appropriées;

c) La liberté de confectionner, d'acquérir et d'utiliser, en quantité adéquate, les objets et le matériel requis par les rites ou les usages d'une religion ou d'une conviction;

d) La liberté d'écrire, d'imprimer et de diffuser des publications sur ces sujets;

e) La liberté d'enseigner une religion ou une conviction dans les lieux convenant à cette fin;

f) La liberté de solliciter et de recevoir des contributions volontaires, financières et autres, de particuliers et d'institutions;

g) La liberté de former, de nommer, d'élire ou de désigner par succession les dirigeants appropriés, conformément aux besoins et aux normes de toute religion ou conviction;

h) La liberté d'observer les jours de repos et de célébrer les fêtes et cérémonies conformément aux préceptes de sa religion ou de sa conviction;

i) La liberté d'établir et de maintenir des communications avec des individus et des communautés en matière de religion ou de conviction aux niveaux national et international.

Article 7

Les droits et libertés proclamés dans la présente Déclaration sont accordés dans la législation nationale d'une manière telle que chacun soit en mesure de jouir desdits droits et libertés dans la pratique.

Article 8

Aucune disposition de la présente Déclaration ne sera interprétée comme constituant une restriction ou une dérogation à un droit énoncé dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et dans les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme.


Les droits de l’homme dans l’administration de la justice

Code de conduite pour les responsables de l'application des lois

Adopté par l'Assemblée générale des Nations Unies le 17 décembre 1979 (résolution 34/169)

Article premier

Les responsables de l'application des lois doivent s'acquitter en tout temps du devoir que leur impose la loi en servant la collectivité et en protégeant toutes les personnes contre les actes illégaux, conformément au haut degré de responsabilité qu'exige leur profession.

Commentaire:

a) L'expression "responsables de l'application des lois" englobe tous les représentants de la loi, qu'ils soient désignés ou élus, qui exercent des pouvoirs de police et en particulier des pouvoirs d'arrestation ou de détention.

b) Dans les pays où des pouvoirs de police sont exercés par des autorités militaires, en uniforme ou en civil, ou par des forces de sécurité de l'Etat, la définition des responsables de l'application de la loi s'étend également aux agents de ces services.

c) Le service de la collectivité désigne en particulier l'assistance fournie aux membres de la collectivité qui, dans des situations d'urgence, d'ordre personnel, économique, social ou autre, ont besoin d'une aide immédiate.

d) La présente disposition vise non seulement tous les actes de violence et de déprédation et autres actes préjudiciables, mais également la totalité des actes interdits par la législation pénale. Elle est également applicable aux actes commis par des personnes non susceptibles d'encourir une responsabilité pénale.

Article 2

Dans l'accomplissement de leur devoir, les responsables de l'application des lois doivent respecter et protéger la dignité humaine et défendre et protéger les droits fondamentaux de toute personne.

Commentaire:

a) Les droits fondamentaux en question sont définis et protégés par le droit national et le droit international. Les instruments internationaux pertinents comprennent notamment la Déclaration universelle des droits de l'homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Déclaration des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid, la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus et la Convention de Vienne sur les relations consulaires.

b) Dans les commentaires nationaux sur cette disposition, il conviendrait que soient identifiées les dispositions régionales ou nationales qui définissent et protègent ces droits.

Article 3

Les responsables de l'application des lois peuvent recourir à la force seulement lorsque cela est strictement nécessaire et dans la mesure exigée par l'accomplissement de leurs fonctions.

Commentaire:

a) Cette disposition souligne que les responsables de l'application des lois ne doivent qu'exceptionnellement avoir recours à la force; quoique cette disposition implique que les responsables de l'application des lois peuvent être autorisés à recourir à la force, dans la mesure où cela est raisonnablement considéré comme nécessaire vu les circonstances, pour empêcher un crime, ou pour arrêter ou aider à arrêter légalement des délinquants ou des suspects, il ne peut être recouru à la force au- delà de cette limite.

b) Le droit national restreint généralement le recours à la force par les responsables de l'application de la loi, conformément à un principe de proportionnalité. Il est entendu que l'interprétation de la présente disposition doit tenir compte de ces principes nationaux de proportionnalité. La présente disposition ne doit en aucun cas être interprétée comme autorisant un usage de la force hors de proportion avec le but légitime poursuivi.

c) L'emploi d'armes à feu est considéré comme un moyen extrême. Tout devrait être entrepris pour exclure l'emploi d'armes à feu, spécialement contre des enfants. D'une manière générale, il ne faut pas avoir recours aux armes à feu, si ce n'est lorsqu'un délinquant présumé oppose une résistance armée ou, de toute autre manière, met en danger la vie d'autrui, et lorsque des moyens moins radicaux ne suffisent pas pour maîtriser ou appréhender le délinquant présumé. Chaque fois qu'une arme à feu a été utilisée, le cas doit être signalé promptement aux autorités compétentes.

Article 4

Les renseignements de caractère confidentiel qui sont en la possession des responsables de l'application des lois doivent être tenus secrets, à moins que l'accomplissement de leurs fonctions ou les besoins de la justice n'exigent absolument le contraire.

Commentaire:

De par leurs fonctions, les responsables de l'application des lois recueillent des renseignements qui peuvent avoir trait à la vie privée d'autres personnes ou être susceptibles de nuire aux intérêts, et en particulier à la réputation, de ces personnes. On doit apporter le plus grand soin à la préservation et à l'utilisation de ces renseignements, qui ne doivent être divulgués que pour les besoins du service et dans l'intérêt de la justice. Toute divulgation faite à d'autres fins est totalement abusive.

Article 5

Aucun responsable de l'application des lois ne peut infliger, susciter ou tolérer un acte de torture ou quelque autre peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant, ni ne peut invoquer un ordre de ses supérieurs ou des circonstances exceptionnelles telles qu'un état de guerre ou une menace de guerre, une menace contre la sécurité nationale, l'instabilité politique intérieure ou tout autre état d'exception pour justifier la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Commentaire:

a) Cette interdiction découle de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée par l'Assemblée générale et aux termes de laquelle:

"[Cet acte constitue] un outrage à la dignité humaine et doit être condamné comme un reniement des buts de la Charte des Nations Unies et comme une violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales proclamés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme [et d'autres instruments internationaux en matière de droits de l'homme]."

b) Dans ladite Déclaration, la torture est définie comme suit:

"Le terme "torture" désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont délibérément infligées à une personne par des agents de la fonction publique ou à leur instigation, aux fins notamment d'obtenir d'elle ou d'un tiers des renseignements ou des aveux, de la punir d'un acte qu'elle a commis ou qu'elle est soupçonnée d'avoir commis, ou de l'intimider ou d'intimider d'autres personnes. Ce terme ne s'étend pas à la douleur ou aux souffrances résultant uniquement de sanctions légitimes, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées par elles, dans une mesure compatible avec l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus."

c) L'expression "peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant" n'a pas été définie par l'Assemblée générale, mais doit être interprétée de façon à assurer une protection aussi large que possible contre tous abus, qu'ils aient un caractère physique ou mental.

Article 6

Les responsables de l'application des lois doivent veiller à ce que la santé des personnes dont ils ont la garde soit pleinement protégée et, en particulier, prendre immédiatement des mesures pour que des soins médicaux leur soient dispensés chaque fois que cela s'impose.

Commentaire:

a) Les "soins médicaux", expression qui désigne les services rendus par le personnel médical, y compris les médecins agréés et le personnel paramédical, doivent être assurés lorsqu'ils sont nécessaires ou demandés.

b) Bien que le personnel médical soit généralement rattaché au service de l'application des lois, les responsables de l'application des lois doivent déférer à l'avis de ce personnel lorsque celui-ci recommande que la personne placée sous leur garde reçoive un traitement approprié appliqué par du personnel médical ne dépendant pas du service de l'application des lois, ou en consultation avec un tel personnel médical.

c) Il est entendu que les responsables de l'application des lois doivent assurer également des soins médicaux aux victimes de violations de la loi ou d'accidents en résultant.

Article 7

Les responsables de l'application des lois ne doivent commettre aucun acte de corruption. Ils doivent aussi s'opposer vigoureusement à tous actes de ce genre et les combattre.

Commentaire:

a) Tout acte de corruption, de même que tout autre abus d'autorité, est incompatible avec les fonctions de responsable de l'application des lois. La loi doit être pleinement appliquée à l'égard de tout responsable de l'application des lois qui commet un acte de corruption, étant donné que les gouvernements ne sauraient espérer appliquer la loi à leurs ressortissants, s'ils ne peuvent ou ne veulent l'appliquer à leurs propres agents et au sein de leurs propres services.

b) Bien que la définition de la corruption doive être du ressort du droit interne, elle devrait s'entendre comme englobant tout acte de commission ou d'omission accompli par le responsable dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions en échange de dons, de promesses ou d'avantages exigés ou acceptés, ou le fait de recevoir ceux-ci indûment, une fois l'acte considéré accompli.

c) L'expression "acte de corruption" mentionné ci-dessus comprend la tentative de corruption.

Article 8

Les responsables de l'application des lois doivent respecter la loi et le présent Code. De même, ils doivent empêcher toute violation de la loi ou du présent Code et s'y opposer vigoureusement au mieux de leurs capacités.

Les responsables de l'application des lois qui ont des raisons de penser qu'une violation du présent Code s'est produite ou est sur le point de se produire signalent le cas à leurs supérieurs et, au besoin, à d'autres autorités ou instances de contrôle ou de recours compétentes.

Commentaire:

a) Le présent Code doit être observé chaque fois qu'il a été incorporé dans la législation ou dans la pratique nationale. Si la législation ou la pratique contient des dispositions plus strictes que celles du présent Code, ces dispositions plus strictes seront observées.

b) Le présent article vise à maintenir l'équilibre entre la discipline nécessaire au sein du service dont dépend dans une large mesure la sécurité publique, d'une part, et la nécessité de prendre des mesures en cas de violation des droits fondamentaux de la personne humaine, d'autre part. Les responsables de l'application des lois doivent signaler les violations par la voie hiérarchique et ne prendre d'autres mesures licites que s'il n'y a pas d'autres recours ou si les recours sont inefficaces. Il est entendu que les responsables de l'application des lois ne sont pas passibles de sanctions administratives ou autres pour avoir signalé qu'une violation du présent Code s'est produite ou est sur le point de se produire.

c) L'expression "autorités ou instances de contrôle ou de recours compétentes" désigne toute autorité ou toute instance créée conformément à la législation nationale, qu'elle relève du service responsable de l'application des lois ou en soit indépendante, et dotée du pouvoir statutaire, coutumier ou autre de connaître des plaintes et griefs relatifs à une violation des règles visées dans le présent Code.

d) Dans certains pays, les moyens de communication de masse peuvent être considérés comme remplissant des fonctions de contrôle analogues à celles qui sont décrites à l'alinéa c ci-dessus. Les responsables de l'application des lois peuvent alors être fondés à porter des violations de cet ordre à la connaissance de l'opinion publique, par l'intermédiaire des moyens de communication de masse, en dernier recours et conformément aux lois et coutumes de leur propre pays et aux dispositions de l'article 4 du présent Code.

e) Les responsables de l'application des lois qui se conforment aux dispositions du présent Code méritent le respect, le soutien moral actif et le concours de la collectivité dans laquelle ils exercent leurs fonctions ainsi que ceux du service auquel ils appartiennent et de leurs pairs.


Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Adoptée et ouverte à la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'Assemblée générale dans sa résolution 39/46 du 10 décembre 1984
Entrée en vigueur: le 26 juin 1987, conformément aux dispositions de l'article 27 (1)

Les Etats parties à la présente Convention,

Considérant que, conformément aux principes proclamés dans la Charte des Nations Unies, la reconnaissance des droits égaux et inaliénables de tous les membres de la famille humaine est le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde,

Reconnaissant que ces droits procèdent de la dignité inhérente à la personne humaine,

Considérant que les Etats sont tenus, en vertu de la Charte, en particulier de l'Article 55, d'encourager le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

Tenant compte de l'article 5 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et de l'article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui prescrivent tous deux que nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Tenant compte également de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée par l'Assemblée générale le 9 décembre 1975,

Désireux d'accroître l'efficacité de la lutte contre la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dans le monde entier,

Sont convenus de ce qui suit:

Première partie

Article premier

1. Aux fins de la présente Convention, le terme "torture" désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment d'obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d'avoir commis, de l'intimider ou de faire pression sur elle ou d'intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu'elle soit, lorsqu'une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite. Ce terme ne s'étend pas à la douleur ou aux souffrances résultant uniquement de sanctions légitimes, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées par elles.

2. Cet article est sans préjudice de tout instrument international ou de toute loi nationale qui contient ou peut contenir des dispositions de portée plus large.

Article 2

1. Tout Etat partie prend des mesures législatives, administratives, judiciaires et autres mesures efficaces pour empêcher que des actes de torture soient commis dans tout territoire sous sa juridiction.

2. Aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit, qu'il s'agisse de l'état de guerre ou de menace de guerre, d'instabilité politique intérieure ou de tout autre état d'exception, ne peut être invoquée pour justifier la torture.

3. L'ordre d'un supérieur ou d'une autorité publique ne peut être invoqué pour justifier la torture.

Article 3

1. Aucun Etat partie n'expulsera, ne refoulera, ni n'extradera une personne vers un autre Etat où il y a des motifs sérieux de croire qu'elle risque d'être soumise à la torture.

2. Pour déterminer s'il y a de tels motifs, les autorités compétentes tiendront compte de toutes les considérations pertinentes, y compris, le cas échéant, de l'existence, dans l'Etat intéressé, d'un ensemble de violations systématiques des droits de l'homme, graves, flagrantes ou massives.

Article 4

1. Tout Etat partie veille à ce que tous les actes de torture constituent des infractions au regard de son droit pénal. Il en est de même de la tentative de pratiquer la torture ou de tout acte commis par n'importe quelle personne qui constitue une complicité ou une participation à l'acte de torture.

2. Tout Etat partie rend ces infractions passibles de peines appropriées qui prennent en considération leur gravité.

Article 5

1. Tout Etat partie prend les mesures nécessaires pour établir sa compétence aux fins de connaître des infractions visées à l'article 4 dans les cas suivants:

a) Quand l'infraction a été commise sur tout territoire sous la juridiction dudit Etat ou à bord d'aéronefs ou de navires immatriculés dans cet Etat;

b) Quand l'auteur présumé de l'infraction est un ressortissant dudit Etat;

c) Quand la victime est un ressortissant dudit Etat et que ce dernier le juge approprié.

2. Tout Etat partie prend également les mesures nécessaires pour établir sa compétence aux fins de connaître desdites infractions dans le cas où l'auteur présumé de celles-ci se trouve sur tout territoire sous sa juridiction et où ledit Etat ne l'extrade pas conformément à l'article 8 vers l'un des Etats visés au paragraphe 1 du présent article.

3. La présente Convention n'écarte aucune compétence pénale exercée conformément aux lois nationales.

Article 6

1. S'il estime que les circonstances le justifient, après avoir examiné les renseignements dont il dispose, tout Etat partie sur le territoire duquel se trouve une personne soupçonnée d'avoir commis une infraction visée à l'article 4 assure la détention de cette personne ou prend toutes autres mesures juridiques nécessaires pour assurer sa présence. Cette détention et ces mesures doivent être conformes à la législation dudit Etat; elles ne peuvent être maintenues que pendant le délai nécessaire à l'engagement et poursuites pénales ou d'une procédure d'extradition.

2. Ledit Etat procède immédiatement à une enquête préliminaire en vue d'établir les faits.

3. Toute personne détenue en application du paragraphe 1 du présent article peut communiquer immédiatement avec le plus proche représentant qualifié de l'Etat dont elle a la nationalité ou, s'il s'agit d'une personne apatride, avec le représentant de l'Etat où elle réside habituellement.

4. Lorsqu'un Etat a mis une personne en détention, conformément aux dispositions du présent article, il avise immédiatement de cette détention et des circonstances qui la justifient les Etats visés au paragraphe 1 de l'article 5. L'Etat qui procède à l'enquête préliminaire visée au paragraphe 2 du présent article en communique rapidement les conclusions auxdits Etats et leur indique s'il entend exercer sa compétence.

Article 7

1. L'Etat partie sur le territoire sous la juridiction duquel l'auteur présumé d'une infraction visée à l'article 4 est découvert, s'il n'extrade pas ce dernier, soumet l'affaire, dans les cas visés à l'article 5, à ses autorités compétentes pour l'exercice de l'action pénale.

2. Ces autorités prennent leur décision dans les mêmes conditions que pour toute infraction de droit commun de caractère grave en vertu du droit de cet Etat. Dans les cas visés au paragraphe 2 de l'article 5, les règles de preuve qui s'appliquent aux poursuites et à la condamnation ne sont en aucune façon moins rigoureuses que celles qui s'appliquent dans les cas visés au paragraphe 1 de l'article 5.

3. Toute personne poursuivie pour l'une quelconque des infractions visées à l'article 4 bénéficie de la garantie d'un traitement équitable à tous les stades de la procédure.

Article 8

1. Les infractions visées à l'article 4 sont de plein droit comprises dans tout traité d'extradition conclu entre Etats parties. Les Etats parties s'engagent à comprendre lesdites infractions dans tout traité d'extradition à conclure entre eux.

2. Si un Etat partie qui subordonne l'extradition à l'existence d'un traité est saisi d'une demande d'extradition par un autre Etat partie avec lequel il n'est pas lié par un traité d'extradition, il peut considérer la présente Convention comme constituant la base juridique de l'extradition en ce qui concerne lesdites infractions. L'extradition est subordonnée aux autres conditions prévues par le droit de l'Etat requis.

3. Les Etats parties qui ne subordonnent pas l'extradition à l'existence d'un traité reconnaissent lesdites infractions comme cas d'extradition entre eux dans les conditions prévues par le droit de l'Etat requis.

4. Entre Etats parties lesdites infractions sont considérées aux fins d'extradition comme ayant été commises tant au lieu de leur perpétration que sur le territoire sous la juridiction des Etats tenus d'établir leur compétence en vertu du paragraphe 1 de l'article 5.

Article 9

1. Les Etats parties s'accordent l'entraide judiciaire la plus large possible dans toute procédure pénale relative aux infractions visées à l'article 4, y compris en ce qui concerne la communication de tous les éléments de preuve dont ils disposent et qui sont nécessaires aux fins de la procédure.

2. Les Etats parties s'acquittent de leurs obligations en vertu du paragraphe 1 du présent article en conformité avec tout traité d'entraide judiciaire qui peut exister entre eux.

Article 10

1. Tout Etat partie veille à ce que l'enseignement et l'information concernant l'interdiction de la torture fassent partie intégrante de la formation du personnel civil ou militaire chargé de l'application des lois, du personnel médical, des agents de la fonction publique et des autres personnes qui peuvent intervenir dans la garde, l'interrogatoire ou le traitement de tout individu arrêté, détenu ou emprisonné de quelque façon que ce soit.

2. Tout Etat partie incorpore ladite interdiction aux règles ou instructions édictées en ce qui concerne les obligations et les attributions de telles personnes.

Article 11

Tout Etat partie exerce une surveillance systématique sur les règles, instructions, méthodes et pratiques d'interrogatoire et sur les dispositions concernant la garde et le traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées de quelque façon que ce soit sur tout territoire sous sa juridiction, en vue d'éviter tout cas de torture.

Article 12

Tout Etat partie veille à ce que les autorités compétentes procèdent immédiatement à une enquête impartiale chaque fois qu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'un acte de torture a été commis sur tout territoire sous sa juridiction.

Article 13

Tout Etat partie assure à toute personne qui prétend avoir été soumise à la torture sur tout territoire sous sa juridiction le droit de porter plainte devant les autorités compétentes dudit Etat qui procéderont immédiatement et impartialement à l'examen de sa cause. Des mesures seront prises pour assurer la protection du plaignant et des témoins contre tout mauvais traitement ou toute intimidation en raison de la plainte déposée ou de toute déposition faite.

Article 14

1. Tout Etat partie garantit, dans son système juridique, à la victime d'un acte de torture, le droit d'obtenir réparation et d'être indemnisée équitablement et de manière adéquate, y compris les moyens nécessaires à sa réadaptation la plus complète possible. En cas de mort de la victime résultant d'un acte de torture, les ayants cause de celle-ci ont doit à indemnisation.

2. Le présent article n'exclut aucun droit à indemnisation qu'aurait la victime ou toute autre personne en vertu des lois nationales.

Article 15

Tout Etat partie veille à ce que toute déclaration dont il est établi qu'elle a été obtenue par la torture ne puisse être invoquée comme un élément de preuve dans une procédure, si ce n'est contre la personne accusée de torture pour établir qu'une déclaration a été faite.

Article 16

1. Tout Etat partie s'engage à interdire dans tout territoire sous sa juridiction d'autres actes constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui ne sont pas des actes de torture telle qu'elle est définie à l'article premier lorsque de tels actes sont commis par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel, ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite. En particulier, les obligations énoncées aux articles 10, 11, 12 et 13 sont applicables moyennant le remplacement de la mention de la torture par la mention d'autres formes de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

2. Les dispositions de la présente Convention sont sans préjudice des dispositions de tout autre instrument international ou de la loi nationale qui interdisent les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou qui ont trait à l'extradition ou à l'expulsion.

Deuxième partie

Article 17

1. Il est institué un Comité contre la torture (ci-après dénommé le Comité) qui a les fonctions définies ci-après. Le Comité est composé de dix experts de haute moralité et possédant une compétence reconnue dans le domaine des droits de l'homme, qui siègent à titre personnel. Les experts sont élus par les Etats parties, compte tenu d'une répartition géographique équitable et de l'intérêt que présente la participation aux travaux du Comité de quelques personnes ayant une expérience juridique.

2. Les membres du Comité sont élus au scrutin secret sur une liste de candidats désignés par les Etats parties. Chaque Etat partie peut désigner un candidat choisi parmi ses ressortissants. Les Etats parties tiennent compte de l'intérêt qu'il y a à désigner des candidats qui soient également membres du Comité des droits de l'homme institué en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et qui soient disposés à siéger au Comité contre la torture.

3. Les membres du Comité sont élus au cours de réunions biennales des Etats parties convoquées par le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. A ces réunions, où le quorum est constitué par les deux tiers des Etats parties, sont élus membres du Comité les candidats qui obtiennent le plus grand nombre de voix et la majorité absolue des votes des représentants des Etats parties présents et votants.

4. La première élection aura lieu au plus tard six mois après la date d'entrée en vigueur de la présente Convention. Quatre mois au moins avant la date de chaque élection, le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies envoie une lettre aux Etats parties pour les inviter à présenter leurs candidatures dans un délai de trois mois. Le Secrétaire général dresse une liste par ordre alphabétique de tous les candidats ainsi désignés, avec indication des Etats parties qui les ont désignés, et la communique aux Etats parties.

5. Les membres du Comité sont élus pour quatre ans. Ils sont rééligibles s'ils sont présentés à nouveau. Toutefois, le mandat de cinq des membres élus lors de la première élection prendra fin au bout de deux ans; immédiatement après la première élection, le nom de ces cinq membres sera tiré au sort par le président de la réunion mentionnée au paragraphe 3 du présent article.

6. Si un membre du Comité décède, se démet de ses fonctions ou n'est plus en mesure pour quelque autre raison de s'acquitter de ses attributions au Comité, l'Etat partie qui l'a désigné nomme parmi ses ressortissants un autre expert qui siège au Comité pour la partie du mandat restant à courir, sous réserve de l'approbation de la majorité des Etats parties. Cette approbation est considérée comme acquise à moins que la moitié des Etats parties ou davantage n'émettent une opinion défavorable dans un délai de six semaines à compter du moment où ils ont été informés par le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies de la nomination proposée.

7. Les Etats parties prennent à leur charge les dépenses des membres du Comité pour la période où ceux-ci s'acquittent de fonctions au Comité.

Article 18

1. Le Comité élit son bureau pour une période de deux ans. Les membres du bureau sont rééligibles.

2. Le Comité établit lui-même son règlement intérieur; celui-ci doit, toutefois, contenir notamment les dispositions suivantes:

a) Le quorum est de six membres;

b) Les décisions du Comité sont prises à la majorité des membres présents.

3. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies met à la disposition du Comité le personnel et les installations matérielles qui lui sont nécessaires pour s'acquitter efficacement des fonctions qui lui sont confiées en vertu de la présente Convention.

4. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies convoque les membres du Comité pour la première réunion. Après sa première réunion, le Comité se réunit à toute occasion prévue par son règlement intérieur.

5. Les Etats parties prennent à leur charge les dépenses occasionnées par la tenue de réunions des Etats parties et du Comité, y compris le remboursement à l'Organisation des Nations Unies de tous frais, tels que dépenses de personnel et coût d'installations matérielles, que l'Organisation aura engagés conformément au paragraphe 3 du présent article.

Article 19

1. Les Etats parties présentent au Comité, par l'entremise du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, des rapports sur les mesures qu'ils ont prises pour donner effet à leurs engagements en vertu de la présente Convention, dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la Convention pour l'Etat partie intéressé. Les Etats parties présentent ensuite des rapports complémentaires tous les quatre ans sur toutes nouvelles mesures prises, et tous autres rapports demandés par le Comité.

2. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies transmet les rapports à tous les Etats parties.

3. Chaque rapport est étudié par le Comité, qui peut faire les commentaires d'ordre général sur le rapport qu'il estime appropriés et qui transmet lesdits commentaires à l'Etat partie intéressé. Cet Etat partie peut communiquer en réponse au Comité toutes observations qu'il juge utiles.

4. Le Comité peut, à sa discrétion, décider de reproduire dans le rapport annuel qu'il établit conformément à l'article 24 tous commentaires formulés par lui en vertu du paragraphe 3 du présent article, accompagnés des observations reçues à ce sujet de l'Etat partie intéressé. Si l'Etat partie intéressé le demande, le Comité peut aussi reproduire le rapport présenté au titre du paragraphe 1 du présent article.

Article 20

1. Si le Comité reçoit des renseignements crédibles qui lui semblent contenir des indications bien fondées que la torture est pratiquée systématiquement sur le territoire d'un Etat partie, il invite ledit Etat à coopérer dans l'examen des renseignements et, à cette fin, à lui faire part de ses observations à ce sujet.

2. En tenant compte de toutes observations éventuellement présentées par l'Etat partie intéressé et de tous autres renseignements pertinents dont il dispose, le Comité peut, s'il juge que cela se justifie, charger un ou plusieurs de ses membres de procéder à une enquête confidentielle et de lui faire rapport d'urgence.

3. Si une enquête est faite en vertu du paragraphe 2 du présent article, le Comité recherche la coopération de l'Etat partie intéressé. En accord avec cet Etat partie, l'enquête peut comporter une visite sur son territoire.

4. Après avoir examiné les conclusions du membre ou des membres qui lui sont soumises conformément au paragraphe 2 du présent article, le Comité transmet ces conclusions à l'Etat partie intéressé, avec tous commentaires ou suggestions qu'il juge appropriés compte tenu de la situation.

5. Tous les travaux du Comité dont il est fait mention aux paragraphes 1 à 4 du présent article sont confidentiels et, à toutes les étapes des travaux, on s'efforce d'obtenir la coopération de l'Etat partie. Une fois achevés ces travaux relatifs à une enquête menée en vertu du paragraphe 2, le Comité peut, après consultations avec l'Etat partie intéressé, décider de faire figurer un compte rendu succinct des résultats des travaux dans le rapport annuel qu'il établit conformément à l'article 24.

Article 21

1. Tout Etat partie à la présente Convention peut, en vertu du présent article, déclarer à tout moment qu'il reconnaît la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications dans lesquelles un Etat partie prétend qu'un autre Etat partie ne s'acquitte pas de ses obligations au titre de la présente Convention. Ces communications ne peuvent être reçues et examinées conformément au présent article que si elles émanent d'un Etat partie qui a fait une déclaration reconnaissant, en ce qui le concerne, la compétence du Comité. Le Comité ne reçoit aucune communication intéressant un Etat partie qui n'a pas fait une telle déclaration. La procédure ci-après s'applique à l'égard des communications reçues en vertu du présent article:

a) Si un Etat partie à la présente Convention estime qu'un autre Etat également partie à la Convention n'en applique pas les dispositions, il peut appeler, par communication écrite, l'attention de cet Etat sur la question. Dans un délai de trois mois à compter de la date de réception de la communication, l'Etat destinataire fera tenir à l'Etat qui a adressé la communication des explications ou toutes autres déclarations écrites élucidant la question, qui devront comprendre, dans toute la mesure possible et utile, des indications sur ses règles de procédure et sur les moyens de recours, soit déjà utilisés, soit en instance, soit encore ouverts;

b) Si, dans un délai de six mois à compter de la date de réception de la communication originale par l'Etat destinataire, la question n'est pas réglée à la satisfaction des deux Etats parties intéressés, l'un comme l'autre auront le droit de la soumettre au Comité, en adressant une notification au Comité, ainsi qu'à l'autre Etat intéressé;

c) Le Comité ne peut connaître d'une affaire qui lui est soumise en vertu du présent article qu'après s'être assuré que tous les recours internes disponibles ont été utilisés et épuisés, conformément aux principes de droit international généralement reconnus. Cette règle ne s'applique pas dans les cas où les procédures de recours excèdent des délais raisonnables ni dans les cas où il est peu probable que les procédures de recours donneraient satisfaction à la personne qui est la victime de la violation de la présente Convention;

d) Le Comité tient ses séances à huis clos lorsqu'il examine les communications prévues au présent article;

e) Sous réserve des dispositions de l'alinéa c, le Comité met ses bons offices à la disposition des Etats parties intéressés, afin de parvenir à une solution amiable de la question, fondée sur le respect des obligations prévues par la présente Convention. A cette fin, le Comité peut, s'il l'estime opportun, établir une commission de conciliation ad hoc;

f) Dans toute l'affaire qui lui est soumise en vertu du présent article, le Comité peut demander aux Etats parties intéressés, visés à l'alinéa b, de lui fournir tout renseignement pertinent;

g) Les Etats parties intéressés, visés à l'alinéa b, ont le droit de se faire représenter lors de l'examen de l'affaire par le Comité et de présenter des observations oralement ou par écrit, ou sous l'une et l'autre forme;

h) Le Comité doit présenter un rapport dans un délai de douze mois à compter du jour où il a reçu la notification visée à l'alinéa b:

i) Si une solution a pu être trouvée conformément aux dispositions de l'alinéa e, le Comité se borne dans son rapport à un bref exposé des faits et de la solution intervenue;

ii) Si une solution n'a pu être trouvée conformément aux dispositions de l'alinéa e, le Comité se borne, dans son rapport, à un bref exposé des faits; le texte des observations écrites et le procès-verbal des observations orales présentées par les Etats parties intéressés sont joints au rapport. Pour chaque affaire, le rapport est communiqué aux Etats parties intéressés.

2. Les dispositions du présent article entreront en vigueur lorsque cinq Etats parties à la présente Convention auront fait la déclaration prévue au paragraphe 1 du présent article. Ladite déclaration est déposée par l'Etat partie auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, qui en communique copie aux autres Etats parties. Une déclaration peut être retirée à tout moment au moyen d'une notification adressée au Secrétaire général. Ce retrait est sans préjudice de l'examen de toute question qui fait l'objet d'une communication déjà transmise en vertu du présent article; aucune autre communication d'un Etat partie ne sera reçue en vertu du présent article après que le Secrétaire général aura reçu notification du retrait de la déclaration, à moins que l'Etat partie intéressé ait fait une nouvelle déclaration.

Article 22

1. Tout Etat partie à la présente Convention peut, en vertu du présent article, déclarer à tout moment qu'il reconnaît la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications présentées par ou pour le compte de particuliers relevant de sa juridiction qui prétendent être victimes d'une violation, par un Etat partie, des dispositions de la Convention. Le Comité ne reçoit aucune communication intéressant un Etat partie qui n'a pas fait une telle déclaration.

2. Le Comité déclare irrecevable toute communication soumise en vertu du présent article qui est anonyme ou qu'il considère être un abus du droit de soumettre de telles communications, ou être incompatible avec les dispositions de la présente Convention.

3. Sous réserve des dispositions du paragraphe 2, le Comité porte toute communication qui lui est soumise en vertu du présent article à l'attention de l'Etat partie à la présente Convention qui a fait une déclaration en vertu du paragraphe 1 et a prétendument violé l'une quelconque des dispositions de la Convention. Dans les six mois qui suivent, ledit Etat soumet par écrit au Comité des explications ou déclarations éclaircissant la question et indiquant le cas échéant, les mesures qu'il pourrait avoir prises pour remédier à la situation.

4. Le Comité examine les communications reçues en vertu du présent article en tenant compte de toutes les informations qui lui sont soumises par ou pour le compte du particulier et par l'Etat partie intéressé.

5. Le Comité n'examinera aucune communication d'un particulier conformément au présent article sans s'être assuré que:

a) La même question n'a pas été et n'est pas en cours d'examen devant une autre instance internationale d'enquête ou de règlement;

b) Le particulier a épuisé tous les recours internes disponibles; cette règle ne s'applique pas si les procédures de recours excèdent des délais raisonnables ou s'il est peu probable qu'elles donneraient satisfaction au particulier qui est la victime d'une violation de la présente Convention.

6. Le Comité tient ses séances à huis clos lorsqu'il examine les communications prévues dans le présent article.

7. Le Comité fait part de ses constatations à l'Etat partie intéressé et au particulier.

8. Les dispositions du présent article entreront en vigueur lorsque cinq Etats parties à la présente Convention auront fait la déclaration prévue au paragraphe 1 du présent article. Ladite déclaration est déposée par l'Etat partie auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, qui en communique copie aux autres Etats parties. Une déclaration peut être retirée à tout moment au moyen d'une notification adressée au Secrétaire général. Ce retrait est sans préjudice de l'examen de toute question qui fait l'objet d'une communication déjà transmise en vertu du présent article; aucune autre communication soumise par ou pour le compte d'un particulier ne sera reçue en vertu du présent article après que le Secrétaire général aura reçu notification du retrait de la déclaration, à moins que l'Etat partie intéressé ait fait une nouvelle déclaration.

Article 23

Les membres du Comité et les membres des commissions de conciliation ad hoc qui pourraient être nommés conformément à l'alinéa e du paragraphe 1 de l'article 21 ont droit aux facilités, privilèges et immunités reconnus aux experts en mission pour l'Organisation des Nations Unies, tels qu'ils sont énoncés dans les sections pertinentes de la Convention sur les privilèges et les immunités des Nations Unies.

Article 24

Le Comité présente aux Etats parties et à l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies un rapport annuel sur les activités qu'il aura entreprises en application de la présente Convention.

Troisième partie

Article 25

1. La présente Convention est ouverte à la signature de tous les Etats.

2. La présente Convention est sujette à ratification. Les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article 26

Tous les Etats peuvent adhérer à la présente Convention. L'adhésion se fera par le dépôt d'un instrument d'adhésion auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article 27

1. La présente Convention entrera en vigueur le trentième jour après la date du dépôt auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies du vingtième instrument de ratification ou d'adhésion.

2. Pour tout Etat qui ratifiera la présente Convention ou y adhérera après le dépôt du vingtième instrument de ratification ou d'adhésion, la Convention entrera en vigueur le trentième jour après la date du dépôt par cet Etat de son instrument de ratification ou d'adhésion.

Article 28

1. Chaque Etat pourra, au moment où il signera ou ratifiera la présente Convention ou y adhérera, déclarer qu'il ne reconnaît pas la compétence accordée au Comité aux termes de l'article 20.

2. Tout Etat partie qui aura formulé une réserve conformément aux dispositions du paragraphe 1 du présent article pourra à tout moment lever cette réserve par une notification adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article 29

1. Tout Etat partie à la présente Convention pourra proposer un amendement et déposer sa proposition auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. Le Secrétaire général communiquera la proposition d'amendement aux Etats parties en leur demandant de lui faire savoir s'ils sont favorables à l'organisation d'une conférence d'Etats parties en vue de l'examen de la proposition et de sa mise aux voix. Si, dans les quatre mois qui suivent la date d'une telle communication, le tiers au moins des Etats parties se prononcent en faveur de la tenue de ladite conférence, le Secrétaire général organisera la conférence sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies. Tout amendement adopté par la majorité des Etats parties présents et votants à la conférence sera soumis par le Secrétaire général à l'acceptation de tous les Etats parties.

2. Un amendement adopté selon les dispositions du paragraphe 1 du présent article entrera en vigueur lorsque les deux tiers des Etats parties à la présente Convention auront informé le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies qu'ils l'ont accepté conformément à la procédure prévue par leurs constitutions respectives.

3. Lorsque les amendements entreront en vigueur, ils auront force obligatoire pour les Etats parties qui les auront acceptés, les autres Etats parties demeurant liés par les dispositions de la présente Convention et par tous amendements antérieurs qu'ils auront acceptés.

Article 30

1. Tout différend entre deux ou plus des Etats parties concernant l'interprétation ou l'application de la présente Convention qui ne peut pas être réglé par voie de négociation est soumis à l'arbitrage à la demande de l'un d'entre eux. Si, dans les six mois qui suivent la date de la demande d'arbitrage, les parties ne parviennent pas à se mettre d'accord sur l'organisation de l'arbitrage, l'une quelconque d'entre elles peut soumettre le différend à la Cour internationale de Justice en déposant une requête conformément au Statut de la Cour.

2. Chaque Etat pourra, au moment où il signera ou ratifiera la présente Convention ou y adhérera, déclarer qu'il ne se considère pas lié par les dispositions du paragraphe 1 du présent article. Les autres Etats parties ne seront pas liés par lesdites dispositions envers tout Etat partie qui aura formulé une telle réserve.

3. Tout Etat partie qui aura formulé une réserve conformément aux dispositions du paragraphe 2 du présent article pourra à tout moment lever cette réserve par une notification adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article 31

1. Un Etat partie pourra dénoncer la présente Convention par notification écrite adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. La dénonciation prend effet un an après la date à laquelle la notification aura été reçue par le Secrétaire général.

2. Une telle dénonciation ne libérera pas l'Etat partie des obligations qui lui incombent en vertu de la présente Convention en ce qui concerne tout acte ou toute omission commis avant la date à laquelle la dénonciation prendra effet; elle ne fera nullement obstacle à la poursuite de l'examen de toute question dont le Comité était déjà saisi à la date à laquelle la dénonciation a pris effet.

3. Après la date à laquelle la dénonciation par un Etat partie prend effet, le Comité n'entreprend l'examen d'aucune question nouvelle concernant cet Etat.

Article 32

Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies notifiera à tous les Etats Membres de l'Organisation des Nations Unies et à tous les Etats qui auront signé la présente Convention ou y auront adhéré:

a) Les signatures, les ratifications et les adhésions reçues en application des articles 25 et 26;

b) La date d'entrée en vigueur de la Convention en application de l'article 27 et de la date d'entrée en vigueur de tout amendement en application de l'article 29;

c) Les dénonciations reçues en application de l'article 31.

Article 33

1. La présente Convention, dont les textes anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe font également foi, sera déposée auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

2. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies fera tenir une copie certifiée conforme de la présente Convention à tous les Etats.


Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Nations Unies A/RES/57/199
Assemblée générale Distr. générale
9 janvier 2003
Cinquante-septième session
Point 109, a, de l’ordre du jour
02 55149

Résolution adoptée par l’Assemblée générale [sur le rapport de la Troisième Commission (A/57/556/Add.1)]

57/199. Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

L’Assemblée générale,

Rappelant l’article 5 de la Déclaration universelle des droits de l’homme1 , l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques 2, la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants3 et sa résolution 39/46 du 10 décembre 1984, par laquelle elle a adopté et ouvert à la signature, à la ratification et à l’adhésion la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que toutes ses résolutions ultérieures sur la question,

Réaffirmant que le droit d’être à l’abri de la torture est un droit qui doit être protégé en toutes circonstances,

Considérant que la Conférence mondiale sur les droits de l’homme, tenue à Vienne du 14 au 25 juin 1993, a déclaré avec fermeté que les efforts tendant à éliminer
la torture devaient avant tout être centrés sur la prévention et a lancé un appel en vue de l’adoption rapide d’un protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, visant à mettre en place un système préventif de visites régulières sur les lieux de détention,

Accueillant avec satisfaction l’adoption du projet de protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants par la Commission des droits de l’homme dans sa résolution 2002/33 du 22 avril 20024 et par le Conseil économique et social dans sa
résolution 2002/27 du 24 juillet 2002, où le Conseil a recommandé à l’Assemblée générale d’adopter le projet de protocole facultatif,

1. Adopte le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qui figure en annexe à la présente résolution, et prie le Secrétaire général de l’ouvrir à la signature, à la ratification et à l’adhésion au Siège de l’Organisation des Nations Unies à New York à partir du 1er janvier 2003 ;
2. Invite tous les États qui ont signé et ratifié la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ou qui y ont adhéré, à signer et ratifier le Protocole facultatif ou à y adhérer.
_______________
1 Résolution 217 A (III).
2 Voir résolution 2200 A (XXI), annexe.
3 Résolution 3452 (XXX), annexe.
4 Voir Documents officiels du Conseil économique et social, 2002, Supplément no 3 (E/2002/23), chap. II, sect. A.
_______________

77e séance plénière
18 décembre 2002
Annexe
Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Préambule

Les États Parties au présent Protocole,

Réaffirmant que la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants sont interdits et constituent des violations graves des droits de l’homme,
Convaincus que d’autres mesures sont nécessaires pour atteindre les objectifs de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants (ci-après dénommée la Convention) et renforcer la protection des personnes privées de liberté contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Rappelant les articles 2 et 16 de la Convention, qui font obligation à tout État Partie de prendre des mesures efficaces pour empêcher que des actes de torture et
autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants soient commis dans tout territoire sous sa juridiction,

Conscients qu’il incombe au premier chef aux États d’appliquer ces articles, que le renforcement de la protection des personnes privées de liberté et le plein respect de leurs droits de l’homme sont une responsabilité commune partagée par tous, et que les organes internationaux chargés de veiller à l’application de ces
principes complètent et renforcent les mesures prises à l’échelon national,

Rappelant que la prévention efficace de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants requiert un programme d’éducation et un ensemble de mesures diverses, législatives, administratives, judiciaires et autres,

Rappelant également que la Conférence mondiale sur les droits de l’homme a déclaré avec fermeté que les efforts tendant à éliminer la torture devaient, avant tout, être centrés sur la prévention et a lancé un appel en vue de l’adoption d’un protocole facultatif se rapportant à la Convention, visant à mettre en place un système préventif de visites régulières sur les lieux de détention,

Convaincus que la protection des personnes privées de liberté contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants peut être renforcée
par des moyens non judiciaires à caractère préventif, fondés sur des visites régulières sur les lieux de détention,

Sont convenus de ce qui suit :

Première partie
Principes généraux

Article premier

Le présent Protocole a pour objectif l’établissement d’un système de visites régulières, effectuées par des organismes internationaux et nationaux indépendants, sur les lieux où se trouvent des personnes privées de liberté, afin de prévenir la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Article 2

1. Il est constitué un Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du Comité contre la torture (ci-après dénommé le Sous-Comité de la prévention), qui exerce les fonctions définies dans le présent Protocole.
2. Le Sous-Comité de la prévention conduit ses travaux dans le cadre de la Charte des Nations Unies et s’inspire des buts et principes qui y sont énoncés, ainsi
que des normes de l’Organisation des Nations Unies relatives au traitement des personnes privées de liberté.
3. Le Sous-Comité de la prévention s’inspire également des principes de confidentialité, d’impartialité, de non-sélectivité, d’universalité et d’objectivité.
4. Le Sous-Comité de la prévention et les États Parties coopèrent en vue de l’application du présent Protocole.

Article 3

Chaque État Partie met en place, désigne ou administre, à l’échelon national, un ou plusieurs organes de visite chargés de prévenir la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants (ci-après dénommés mécanisme national de prévention).

Article 4

1. Chaque État Partie autorise les mécanismes visés aux articles 2 et 3 à effectuer des visites, conformément au présent Protocole, dans tout lieu placé sous sa
juridiction ou sous son contrôle où se trouvent ou pourraient se trouver des personnes privées de liberté sur l’ordre d’une autorité publique ou à son instigation,
ou avec son consentement exprès ou tacite (ci-après dénommé lieu de détention). Ces visites sont effectuées afin de renforcer, s’il y a lieu, la protection desdites
personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
2. Aux fins du présent Protocole, on entend par privation de liberté toute forme de détention ou d’emprisonnement, ou le placement d’une personne dans un
établissement public ou privé de surveillance dont elle n’est pas autorisée à sortir à son gré, ordonné par une autorité judiciaire ou administrative ou toute autre autorité publique.

Deuxième partie
Sous-Comité de la prévention

Article 5

1. Le Sous-Comité de la prévention se compose de dix membres. Lorsque le nombre des ratifications ou adhésions au présent Protocole aura atteint cinquante,
celui des membres du Sous-Comité de la prévention sera porté à vingt-cinq.
2. Les membres du Sous-Comité de la prévention sont choisis parmi des personnalités de haute moralité ayant une expérience professionnelle reconnue dans le domaine de l’administration de la justice, en particulier en matière de droit pénal et d’administration pénitentiaire ou policière, ou dans les divers domaines ayant un rapport avec le traitement des personnes privées de liberté.
3. Dans la composition du Sous-Comité de la prévention, il est dûment tenu compte de la nécessité d’assurer une répartition géographique équitable ainsi que la
représentation des diverses formes de civilisation et systèmes juridiques des États Parties.
4. Dans la composition du Sous-Comité de la prévention, il est également tenu compte de la nécessité d’assurer une représentation respectueuse de l’équilibre entre les sexes, sur la base des principes d’égalité et de non-discrimination.
5. Le Sous-Comité de la prévention ne peut comprendre plus d’un ressortissant d’un même État.
6. Les membres du Sous-Comité de la prévention siègent à titre individuel, agissent en toute indépendance et impartialité et doivent être disponibles pour exercer efficacement leurs fonctions au sein du Sous-Comité de la prévention.

Article 6

1. Chaque État Partie peut désigner, conformément au paragraphe 2 ci-après, deux candidats au plus, possédant les qualifications et satisfaisant aux exigences énoncées à l’article 5, et fournit à ce titre des informations détaillées sur les qualifications des candidats.
2. a) Les candidats désignés doivent avoir la nationalité d’un État Partie au présent Protocole ;
b) L’un des deux candidats au moins doit avoir la nationalité de l’État Partie auteur de la désignation ;
c) Il ne peut être désigné comme candidats plus de deux ressortissants d’un même État Partie ;
d) Tout État Partie doit, avant de désigner un candidat ressortissant d’un autre État Partie, demander et obtenir le consentement dudit État Partie.
3. Cinq mois au moins avant la date de la réunion des États Parties au cours de laquelle aura lieu l’élection, le Secrétaire général de l’Organisation des Nations
Unies envoie une lettre aux États Parties pour les inviter à présenter leurs candidats dans un délai de trois mois. Le Secrétaire général dresse la liste par ordre
alphabétique de tous les candidats ainsi désignés, avec indication des États Parties qui les ont désignés.

Article 7

1. Les membres du Sous-Comité de la prévention sont élus selon la procédure suivante :
a) Il est tenu compte au premier chef des exigences et critères énoncés à l’article 5 du présent Protocole ;
b) La première élection aura lieu au plus tard six mois après la date d’entrée en vigueur du présent Protocole ;
c) Les membres du Sous-Comité de la prévention sont élus par les États Parties au scrutin secret ;
d) Les membres du Sous-Comité de la prévention sont élus au cours de réunions biennales des États Parties, convoquées par le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. À ces réunions, où le quorum est constitué par les deux tiers des États Parties, sont élus membres du Sous-Comité de la prévention les candidats qui obtiennent le plus grand nombre de voix et la majorité absolue des voix des représentants des États Parties présents et votants.
2. Si, au cours de l’élection, il s’avère que deux ressortissants d’un État Partie remplissent les conditions requises pour être élus membres du Sous-Comité de la
prévention, c’est le candidat qui obtient le plus grand nombre de voix qui est élu. Si les deux candidats obtiennent le même nombre de voix, la procédure est la
suivante :
a) Si l’un seulement des candidats a été désigné par l’État Partie dont il est ressortissant, il est élu membre du Sous-Comité de la prévention ;
b) Si les deux candidats ont été désignés par l’État Partie dont ils sont ressortissants, un vote séparé au scrutin secret a lieu pour déterminer celui qui est élu ;
c) Si aucun des deux candidats n’a été désigné par l’État Partie dont il est ressortissant, un vote séparé au scrutin secret a lieu pour déterminer celui qui est élu.

Article 8

Si un membre du Sous-Comité de la prévention décède, se démet de ses fonctions ou n’est plus en mesure pour quelque autre raison de s’acquitter de ses
attributions au Sous-Comité de la prévention, l’État Partie qui l’a désigné propose, en tenant compte de la nécessité d’assurer un équilibre adéquat entre les divers
domaines de compétence, un autre candidat possédant les qualifications et satisfaisant aux exigences énoncées à l’article 5, qui siège jusqu’à la réunion
suivante des États Parties, sous réserve de l’approbation de la majorité des États Parties. Cette approbation est considérée comme acquise à moins que la moitié des États Parties ou davantage n’émettent une opinion défavorable dans un délai de six semaines à compter du moment où ils ont été informés par le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies de la nomination proposée.

Article 9

Les membres du Sous-Comité de la prévention sont élus pour quatre ans. Ils sont rééligibles une fois si leur candidature est présentée de nouveau. Le mandat de
la moitié des membres élus lors de la première élection prend fin au bout de deux ans ; immédiatement après la première élection, le nom de ces membres est tiré au sort par le Président de la réunion visée à l’alinéa d du paragraphe 1 de l’article 7.

Article 10

1. Le Sous-Comité de la prévention élit son bureau pour une période de deux ans. Les membres du bureau sont rééligibles.
2. Le Sous-Comité de la prévention établit son règlement intérieur, qui doit contenir notamment les dispositions suivantes :
a) Le quorum est de la moitié des membres plus un ;
b) Les décisions du Sous-Comité de la prévention sont prises à la majorité des membres présents ;
c) Le Sous-Comité de la prévention se réunit à huis clos.
3. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies convoque la première réunion du Sous-Comité de la prévention. Après sa première réunion, le Sous-Comité de la prévention se réunit à toute occasion prévue par son règlement intérieur. Les sessions du Sous-Comité de la prévention et du Comité contre la
torture ont lieu simultanément au moins une fois par an.

Troisième partie
Mandat du Sous-Comité de la prévention

Article 11

Le Sous-Comité de la prévention :
a) Effectue les visites mentionnées à l’article 4 et formule, à l’intention des États Parties, des recommandations concernant la protection des personnes privées de liberté contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
b) En ce qui concerne les mécanismes nationaux de prévention :
i) Offre des avis et une assistance aux États Parties, le cas échéant, aux fins de la mise en place desdits mécanismes ;
ii) Entretient avec lesdits mécanismes des contacts directs, confidentiels s’il y a lieu, et leur offre une formation et une assistance technique en vue de renforcer leurs capacités ;
iii) Leur offre des avis et une assistance pour évaluer les besoins et les moyens nécessaires afin de renforcer la protection des personnes privées de liberté contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
iv) Formule des recommandations et observations à l’intention des États Parties en vue de renforcer les capacités et le mandat des mécanismes nationaux de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
c) Coopère, en vue de prévenir la torture, avec les organes et mécanismes compétents de l’Organisation des Nations Unies ainsi qu’avec les organisations ou
organismes internationaux, régionaux et nationaux qui oeuvrent en faveur du renforcement de la protection de toute les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Article 12

Afin que le Sous-Comité de la prévention puisse s’acquitter du mandat défini à l’article 11, les États Parties s’engagent :
a) À recevoir le Sous-Comité de la prévention sur leur territoire et à lui donner accès aux lieux de détention visés à l’article 4 du présent Protocole ;
b) À communiquer au Sous-Comité de la prévention tous les renseignements pertinents qu’il pourrait demander pour évaluer les besoins et les mesures à prendre pour renforcer la protection des personnes privées de liberté contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
c) À encourager et à faciliter les contacts entre le Sous-Comité de la prévention et les mécanismes nationaux de prévention ;
d) À examiner les recommandations du Sous-Comité de la prévention et à engager le dialogue avec lui au sujet des mesures qui pourraient être prises pour les mettre en oeuvre.

Article 13

1. Le Sous-Comité de la prévention établit, d’abord par tirage au sort, un programme de visites régulières dans les États Parties en vue de s’acquitter de son mandat tel qu’il est défini à l’article 11.
2. Après avoir procédé à des consultations, le Sous-Comité de la prévention communique son programme aux États Parties afin qu’ils puissent prendre, sans délai, les dispositions d’ordre pratique nécessaires pour que les visites puissent avoir lieu.
3. Les visites sont conduites par au moins deux membres du Sous-Comité de la prévention. Ceux-ci peuvent être accompagnés, si besoin est, d’experts ayant une
expérience et des connaissances professionnelles reconnues dans les domaines visés dans le présent Protocole, qui sont choisis sur une liste d’experts établie sur la base des propositions des États Parties, du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et du Centre des Nations Unies pour la prévention internationale du crime. Pour établir la liste d’experts, les États Parties intéressés proposent le nom de cinq experts nationaux au plus. L’État Partie intéressé peut s’opposer à l’inscription sur la liste d’un expert déterminé, à la suite de quoi le Sous-Comité de la prévention propose le nom d’un autre expert.
4. Le Sous-Comité de la prévention peut, s’il le juge approprié, proposer une brève visite pour faire suite à une visite régulière.

Article 14

1. Pour permettre au Sous-Comité de la prévention de s’acquitter de son mandat, les États Parties au présent Protocole s’engagent à lui accorder :
a) L’accès sans restriction à tous les renseignements concernant le nombre de personnes se trouvant privées de liberté dans les lieux de détention visés à l’article 4, ainsi que le nombre de lieux de détention et leur emplacement ;
b) L’accès sans restriction à tous les renseignements relatifs au traitement de ces personnes et à leurs conditions de détention ;
c) Sous réserve du paragraphe 2 ci-après, l’accès sans restriction à tous les lieux de détention et à leurs installations et équipements ;
d) La possibilité de s’entretenir en privé avec les personnes privées de liberté, sans témoins, soit directement, soit par le truchement d’un interprète si cela paraît nécessaire, ainsi qu’avec toute autre personne dont le Sous-Comité de la prévention pense qu’elle pourrait fournir des renseignements pertinents ;
e) La liberté de choisir les lieux qu’il visitera et les personnes qu’il rencontrera.
2. Il ne peut être fait objection à la visite d’un lieu de détention déterminé que pour des raisons pressantes et impérieuses liées à la défense nationale, à la sécurité
publique, à des catastrophes naturelles ou à des troubles graves là où la visite doit avoir lieu, qui empêchent provisoirement que la visite ait lieu. Un État Partie ne
saurait invoquer l’existence d’un état d’urgence pour faire objection à une visite.

Article 15

Aucune autorité publique ni aucun fonctionnaire n’ordonnera, n’appliquera, n’autorisera ou ne tolérera de sanction à l’encontre d’une personne ou d’une organisation qui aura communiqué des renseignements, vrais ou faux, au Sous-Comité de la prévention ou à ses membres, et ladite personne ou organisation ne subira de préjudice d’aucune autre manière.

Article 16

1. Le Sous-Comité de la prévention communique ses recommandations et observations à titre confidentiel à l’État Partie et, le cas échéant, au mécanisme national de prévention.
2. Le Sous-Comité de la prévention publie son rapport, accompagné d’éventuelles observations de l’État Partie intéressé, à la demande de ce dernier. Si l’État Partie rend publique une partie du rapport, le Sous-Comité de la prévention peut le publier, en tout ou en partie. Toutefois, aucune donnée personnelle n’est publiée sans le consentement exprès de la personne concernée.
3. Le Sous-Comité de la prévention présente chaque année au Comité contre la torture un rapport public sur ses activités.
4. Si l’État Partie refuse de coopérer avec le Sous-Comité de la prévention conformément aux dispositions des articles 12 et 14, ou de prendre des mesures pour améliorer la situation à la lumière des recommandations du Sous-Comité de la prévention, le Comité contre la torture peut, à la demande du Sous-Comité de la
prévention, décider à la majorité de ses membres, après que l’État Partie aura eu la possibilité de s’expliquer, de faire une déclaration publique à ce sujet ou de publier le rapport du Sous-Comité de la prévention.

Quatrième partie
Mécanismes nationaux de prévention

Article 17

Chaque État Partie administre, désigne ou met en place au plus tard un an après l’entrée en vigueur ou la ratification du présent Protocole, ou son adhésion au dit Protocole, un ou plusieurs mécanismes nationaux de prévention indépendants en vue de prévenir la torture à l’échelon national. Les mécanismes mis en place par des entités décentralisées pourront être désignés comme mécanismes nationaux de prévention aux fins du présent Protocole, s’ils sont conformes à ses dispositions.

Article 18

1. Les États Parties garantissent l’indépendance des mécanismes nationaux de prévention dans l’exercice de leurs fonctions et l’indépendance de leur personnel.
2. Les États Parties prennent les mesures nécessaires pour veiller à ce que les experts du mécanisme national de prévention possèdent les compétences et les
connaissances professionnelles requises. Ils s’efforcent d’assurer l’équilibre entre les sexes et une représentation adéquate des groupes ethniques et minoritaires du pays.
3. Les États Parties s’engagent à dégager les ressources nécessaires au fonctionnement des mécanismes nationaux de prévention.
4. Lorsqu’ils mettent en place les mécanismes nationaux de prévention, les États Parties tiennent dûment compte des Principes concernant le statut des institutions
nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme.

Article 19

Les mécanismes nationaux de prévention sont investis à tout le moins des attributions suivantes :
a) Examiner régulièrement la situation des personnes privées de liberté se trouvant dans les lieux de détention visés à l’article 4, en vue de renforcer, le cas échéant, leur protection contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
b) Formuler des recommandations à l’intention des autorités compétentes afin d’améliorer le traitement et la situation des personnes privées de liberté et de prévenir la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, compte tenu des normes pertinentes de l’Organisation des Nations Unies ;
c) Présenter des propositions et des observations au sujet de la législation en vigueur ou des projets de loi en la matière.

Article 20

Pour permettre aux mécanismes nationaux de prévention de s’acquitter de leur mandat, les États Parties au présent Protocole s’engagent à leur accorder :
a) L’accès à tous les renseignements concernant le nombre de personnes privées de liberté se trouvant dans les lieux de détention visés à l’article 4, ainsi que le nombre de lieux de détention et leur emplacement ;
b) L’accès à tous les renseignements relatifs au traitement de ces personnes et à leurs conditions de détention ;
c) L’accès à tous les lieux de détention et à leurs installations et équipements ;
d) La possibilité de s’entretenir en privé avec les personnes privées de liberté, sans témoins, soit directement, soit par le truchement d’un interprète si cela paraît nécessaire, ainsi qu’avec toute autre personne dont le mécanisme national de prévention pense qu’elle pourrait fournir des renseignements pertinents ;
e) La liberté de choisir les lieux qu’ils visiteront et les personnes qu’ils rencontreront ;
f) Le droit d’avoir des contacts avec le Sous-Comité de la prévention, de lui communiquer des renseignements et de le rencontrer.

Article 21

1. Aucune autorité publique ni aucun fonctionnaire n’ordonnera, n’appliquera, n’autorisera ou ne tolérera de sanction à l’encontre d’une personne ou d’une organisation qui aura communiqué des renseignements, vrais ou faux, au mécanisme national de prévention, et ladite personne ou organisation ne subira de préjudice d’aucune autre manière.
2. Les renseignements confidentiels recueillis par le mécanisme national de prévention seront protégés. Aucune donnée personnelle ne sera publiée sans le consentement exprès de la personne concernée.

Article 22

Les autorités compétentes de l’État Partie intéressé examinent les recommandations du mécanisme national de prévention et engagent le dialogue avec lui au sujet des mesures qui pourraient être prises pour les mettre en oeuvre.

Article 23

Les États Parties au présent Protocole s’engagent à publier et à diffuser les rapports annuels des mécanismes nationaux de prévention.

Cinquième partie
Déclaration

Article 24

1. Au moment de la ratification, les États Parties peuvent faire une déclaration indiquant qu’ils ajournent l’exécution des obligations qui leur incombent en vertu de
la troisième ou de la quatrième partie du présent Protocole.
2. Cet ajournement vaut pour un maximum de trois ans. À la suite de représentations dûment formulées par l’État Partie et après consultation du Sous-Comité de la prévention, le Comité contre la torture peut proroger cette période de deux ans encore.

Sixième partie
Dispositions financières

Article 25

1. Les dépenses résultant des travaux du Sous-Comité de la prévention créé en vertu du présent Protocole sont prises en charge par l’Organisation des Nations Unies.
2. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies met à la disposition du Sous-Comité de la prévention le personnel et les installations qui lui sont
nécessaires pour s’acquitter efficacement des fonctions qui lui sont confiées en vertu du présent Protocole.

Article 26

1. Il est établi, conformément aux procédures pertinentes de l’Assemblée générale, un fonds spécial, qui sera administré conformément au règlement financier et aux règles de gestion financière de l’Organisation des Nations Unies, pour aider à financer l’application des recommandations que le Sous-Comité de la prévention adresse à un État Partie à la suite d’une visite, ainsi que les programmes d’éducation des mécanismes nationaux de prévention.
2. Le Fonds spécial peut être financé par des contributions volontaires versées par les gouvernements, les organisations intergouvernementales et non gouvernementales et d’autres entités privées ou publiques.

Septième partie
Dispositions finales

Article 27

1. Le présent Protocole est ouvert à la signature de tout État qui a signé la Convention.
2. Le présent Protocole est soumis à la ratification de tout État qui a ratifié la Convention ou y a adhéré. Les instruments de ratification seront déposés auprès du
Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.
3. Le présent Protocole est ouvert à l’adhésion de tout État qui a ratifié la Convention ou qui y a adhéré.
4. L’adhésion se fera par le dépôt d’un instrument d’adhésion auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.
5. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies informera tous les États qui auront signé le présent Protocole ou qui y auront adhéré du dépôt de chaque instrument de ratification ou d’adhésion.

Article 28

1. Le présent Protocole entrera en vigueur le trentième jour suivant la date du dépôt auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies du vingtième instrument de ratification ou d’adhésion.
2. Pour chaque État qui ratifiera le présent Protocole ou y adhérera après le dépôt auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies du vingtième
instrument de ratification ou d’adhésion, le présent Protocole entrera en vigueur le trentième jour suivant la date du dépôt par cet État de son instrument de ratification ou d’adhésion.

Article 29

Les dispositions du présent Protocole s’appliquent, sans limitation ni exception aucune, à toutes les unités constitutives des États fédéraux.

Article 30

Il ne sera admis aucune réserve au présent Protocole.

Article 31

Les dispositions du présent Protocole sont sans effet sur les obligations contractées par les États Parties en vertu d’une convention régionale instituant un système de visite des lieux de détention. Le Sous-Comité de la prévention et les organes établis en vertu de telles conventions régionales sont invités à se consulter et à coopérer afin d’éviter les doubles emplois et de promouvoir efficacement la réalisation des objectifs du présent Protocole.

Article 32

Les dispositions du présent Protocole sont sans effet sur les obligations qui incombent aux États Parties en vertu des quatre Conventions de Genève du 12 août 1949 et des Protocoles additionnels du 8 juin 1977 s’y rapportant, ou sur la possibilité qu’a tout État Partie d’autoriser le Comité international de la Croix-Rouge à se rendre sur des lieux de détention dans des cas non prévus par le droit international humanitaire.

Article 33

1. Tout État Partie peut dénoncer le présent Protocole à tout moment, par notification écrite adressée au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, qui en informe alors les autres États Parties au Protocole et à la Convention. La dénonciation prend effet un an après la date à laquelle la notification est reçue par le Secrétaire général.
2. Une telle dénonciation ne libère pas l’État Partie des obligations qui lui incombent en vertu du présent Protocole en ce qui concerne tout acte ou toute situation qui se sera produit avant la date à laquelle la dénonciation prendra effet, ou toute mesure que le Sous-Comité de la prévention aura décidé ou pourra décider d’adopter à l’égard de l’État Partie concerné ; elle ne fera nullement obstacle à la poursuite de l’examen de questions dont le Sous-Comité de la prévention était déjà saisi avant la date à laquelle la dénonciation a pris effet.
3. Après la date à laquelle la dénonciation par un État Partie prend effet, le Sous- Comité de la prévention n’entreprend l’examen d’aucune question nouvelle concernant cet État.

Article 34

1. Tout État Partie au présent Protocole peut proposer un amendement et déposer sa proposition auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. Le Secrétaire général communique la proposition d’amendement aux États Parties au présent Protocole en leur demandant de lui faire savoir s’ils sont favorables à l’organisation d’une conférence d’États Parties en vue de l’examen de la proposition et de sa mise aux voix. Si, dans les quatre mois qui suivent la date d’une telle communication, le tiers au moins des États Parties se prononcent en faveur de la tenue de ladite conférence, le Secrétaire général organise la conférence sous les auspices de l’Organisation des Nations Unies. Tout amendement adopté à la majorité des deux tiers des États Parties présents et votants à la conférence est soumis par le Secrétaire général à l’acceptation de tous les États Parties.
2. Un amendement adopté selon les dispositions du paragraphe 1 du présent article entre en vigueur lorsque les deux tiers des États Parties au présent Protocole l’ont accepté conformément à la procédure prévue par leurs constitutions respectives.
3. Lorsque les amendements entrent en vigueur, ils ont force obligatoire pour les États Parties qui les ont acceptés, les autres États Parties demeurant liés par les
dispositions du présent Protocole et par tout amendement antérieur qu’ils auraient accepté.

Article 35

Les membres du Sous-Comité de la prévention et des mécanismes nationaux de prévention jouissent des privilèges et immunités qui leur sont nécessaires pour
exercer leurs fonctions en toute indépendance. Les membres du Sous-Comité de la prévention jouissent des privilèges et immunités prévus à la section 22 de la
Convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies, du 13 février 1946, sous réserve des dispositions de la section 23 de ladite Convention.

Article 36

Lorsqu’ils se rendent dans un État Partie, les membres du Sous-Comité de la prévention doivent, sans préjudice des dispositions et des buts du présent Protocole
ni des privilèges et immunités dont ils peuvent jouir :
a) Respecter les lois et règlements en vigueur dans l’État où ils se rendent ;
b) S’abstenir de toute action ou activité incompatible avec le caractère impartial et international de leurs fonctions.

Article 37

1. Le présent Protocole, dont les textes anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe font également foi, sera déposé auprès du Secrétaire général de
l’Organisation des Nations Unies.
2. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies fera tenir une copie certifiée conforme du présent Protocole à tous les États.



Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement

Adopté par l'Assemblée générale dans sa résolution 43/173 du 9 décembre 1988

Portée de l'Ensemble de principes

Les présents principes s'appliquent à la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement,

Emploi des termes

Aux fins de l'Ensemble de principes:

a) Le terme "arrestation" s'entend de l'acte qui consiste à appréhender une personne du chef d'une prétendue infraction ou par le fait d'une autorité quelconque;

b) Le terme "personne détenue" s'entend de toute personne privée de la liberté individuelle sauf à la suite d'une condamnation pour infraction;

c) Le terme "personne emprisonnée" s'entend de toute personne privée de la liberté individuelle à la suite d'une condamnation pour infraction;

d) Le terme "détention" s'entend de la condition des personnes détenues telle qu'elle est définie ci-dessus;

e) Le terme "emprisonnement" s'entend de la condition des personnes emprisonnées telle qu'elle est définie ci-dessus;

f) L'expression "une autorité judiciaire ou autre" s'entend d'une autorité judiciaire ou autre habilitée par la loi et dont le statut et la durée du mandat offrent les garanties les plus solides possibles de compétence, d'impartialité et d'indépendance.

Principe premier

Toute personne soumise à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement est traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine.

Principe 2

Les mesures d'arrestation, de détention ou d'emprisonnement ne sont appliquées qu'en stricte conformité avec les dispositions de la loi et par les autorités compétentes ou les personnes habilitées à cet effet.

Principe 3

Si une personne est soumise à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement, il ne peut être admis à son égard aucune restriction ou dérogation aux droits de l'homme reconnus ou en vigueur dans un Etat en application de lois, de conventions, de règlements ou de coutumes, sous prétexte que le présent Ensemble de principes ne les reconnaît pas ou les reconnaît à un moindre degré.

Principe 4

Toute forme de détention ou d'emprisonnement et toute mesure mettant en cause les droits individuels d'une personne soumise à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement doivent être décidées soit par une autorité judiciaire ou autre, soit sous son contrôle effectif.

Principe 5

1. Les présents principes s'appliquent à toutes les personnes se trouvant sur le territoire d'un Etat donné, sans distinction aucune, qu'elle soit fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion ou les croyances religieuses, les opinions politiques ou autres, l'origine nationale, ethnique ou sociale, la fortune, la naissance ou sur tout autre critère.

2. Les mesures appliquées conformément à la loi et destinées exclusivement à protéger les droits et la condition particulière des femmes, surtout des femmes enceintes et des mères d'enfants en bas âge, des enfants, des adolescents et des personnes âgées, malades ou handicapées ne sont pas réputées être des mesures discriminatoires. La nécessité de ces mesures et leur application pourront toujours faire l'objet d'un examen par une autorité judiciaire ou autre.

Principe 6

Aucune personne soumise à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement ne sera soumise à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants*. Aucune circonstance quelle qu'elle soit ne peut être invoquée pour justifier la torture ou toute autre peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant.

Principe 7

1. Les Etats devraient édicter des lois interdisant tous actes qui violeraient les droits et devoirs énoncés dans les présents principes, prévoir des sanctions appropriées contre les auteurs de ces actes et enquêter impartialement en cas de plainte.

2. Les fonctionnaires qui ont des raisons de croire qu'une violation du présent Ensemble de principes s'est produite ou est sur le point de se produire signalent le cas à leurs supérieurs et, au besoin, aux autres autorités ou instances de contrôle ou de recours compétentes.

3. Toute autre personne qui a lieu de croire qu'une violation du présent Ensemble de principes s'est produite ou est sur le point de se produire a le droit de signaler le cas aux supérieurs des fonctionnaires en cause ainsi qu'aux autres autorités ou instances de contrôle ou de recours compétentes.

Principe 8

Les personnes détenues sont soumises à un régime approprié à leur condition de personnes non condamnées. Elles sont donc, chaque fois que possible, séparées des personnes emprisonnées.

Principe 9

Les autorités qui arrêtent une personne, la maintiennent en détention ou instruisent l'affaire doivent exercer strictement les pouvoirs qui leur sont conférés par la loi, et l'exercice de ces pouvoirs doit pouvoir faire l'objet d'un recours devant une autorité judiciaire ou autre.

Principe 10

Toute personne arrêtée sera informée des raisons de cette mesure au moment de son arrestation et sera avisée sans délai de toute accusation portée contre elle.

Principe 11

1. Une personne ne sera pas maintenue en détention sans avoir la possibilité effective de se faire entendre sans délai par une autorité judiciaire ou autre. Une personne détenue a le droit d'assurer sa propre défense ou d'être assistée d'un conseil conformément à la loi.

2. La personne détenue et, le cas échéant, son conseil reçoivent sans délai et intégralement communication de l'ordre de détention ainsi que des raisons l'ayant motivé.

3. Une autorité judiciaire ou autre sera habilitée à contrôler, selon qu'il conviendra, le maintien de la détention.

Principe 12

1. Seront dûment consignés:

a) Les motifs de l'arrestation;

b) L'heure de l'arrestation, l'heure à laquelle la personne arrêtée a été conduite dans un lieu de détention et celle de sa première comparution devant une autorité judiciaire ou autre;

c) L'identité des responsables de l'application des lois concernés;

d) Des indications précises quant au lieu de détention.

2. Ces renseignements seront communiqués à la personne détenue ou, le cas échéant, à son conseil, dans les formes prescrites par la loi.

Principe 13

Toute personne se verra fournir, au moment de l'arrestation et au début de la détention ou de l'emprisonnement ou peu après, par les autorités responsables de l'arrestation, de la détention ou de l'emprisonnement, selon le cas, des renseignements et des explications au sujet de ses droits ainsi que de la manière dont elle peut les faire valoir.

Principe 14

Toute personne qui ne comprend ou ne parle pas suffisamment bien la langue utilisée par les autorités responsables de son arrestation, de sa détention ou de son emprisonnement a le droit de recevoir sans délai, dans une langue qu'elle comprend, les renseignements visés dans le principe 10, le paragraphe 2 du principe 11, le paragraphe 1 du principe 12 et le principe 13 et de bénéficier de l'assistance, gratuite si besoin est, d'un interprète dans le cadre de la procédure judiciaire qui fait suite à son arrestation.

Principe 15

Nonobstant les exceptions prévues au paragraphe 4 du principe 16 et au paragraphe 3 du principe 18, la communication de la personne détenue ou emprisonnée avec le monde extérieur, en particulier avec sa famille ou son conseil, ne peut être refusée pendant plus de quelques jours.

Principe 16

1. Dans les plus brefs délais après l'arrestation et après chaque transfert d'un lieu de détention ou d'emprisonnement à un autre, la personne détenue ou emprisonnée pourra aviser ou requérir l'autorité compétente d'aviser les membres de sa famille ou, s'il y a lieu, d'autres personnes de son choix, de son arrestation, de sa détention ou de son emprisonnement, ou de son transfert et du lieu où elle est détenue.

2. S'il s'agit d'une personne étrangère, elle sera aussi informée sans délai de son droit de communiquer par des moyens appropriés avec un poste consulaire ou la mission diplomatique de l'Etat dont elle a la nationalité ou qui est autrement habilité à recevoir cette communication conformément au droit international, ou avec le représentant de l'organisation internationale compétente si cette personne est réfugiée ou est, d'autre façon, sous la protection d'une organisation intergouvernementale.

3. Dans le cas d'un adolescent ou d'une personne incapable de comprendre quels sont ses droits, l'autorité compétente devra, de sa propre initiative, procéder à la notification visée dans le présent principe. Elle veillera spécialement à aviser les parents ou tuteurs.

4. La notification visée dans le présent principe sera faite ou autorisée sans délai. L'autorité compétente pourra néanmoins différer une notification pendant une période raisonnable si des besoins exceptionnels de l'enquête l'exigent.

Principe 17

1. Toute personne détenue pourra bénéficier de l'assistance d'un avocat. L'autorité compétente l'informera de ce droit promptement après son arrestation et lui fournira des facilités raisonnables pour l'exercer.

2. Si une personne détenue n'a pas choisi d'avocat, elle aura le droit de s'en voir désigner un par une autorité judiciaire ou autre dans tous les cas où l'intérêt de la justice l'exige, et ce sans frais si elle n'a pas les moyens de le rémunérer.

Principe 18

1. Toute personne détenue ou emprisonnée doit être autorisée à communiquer avec son avocat et à le consulter.

2. Toute personne détenue ou emprisonnée doit disposer du temps et des facilités nécessaires pour s'entretenir avec son avocat.

3. Le droit de la personne détenue ou emprisonnée de recevoir la visite de son avocat, de le consulter et de communiquer avec lui sans délai ni censure et en toute confidence ne peut faire l'objet d'aucune suspension ni restriction en dehors de circonstances exceptionnelles, qui seront spécifiées par la loi ou les règlements pris conformément à la loi, dans lesquelles une autorité judiciaire ou autre l'estimera indispensable pour assurer la sécurité et maintenir l'ordre.

4. Les entretiens entre la personne détenue ou emprisonnée et son avocat peuvent se dérouler à portée de la vue, mais non à portée de l'ouïe, d'un responsable de l'application des lois.

5. Les communications entre une personne détenue ou emprisonnée et son avocat, mentionnées dans le présent principe, ne peuvent être retenues comme preuves contre la personne détenue ou emprisonnée, sauf si elles se rapportent à une infraction continue ou envisagée.

Principe 19

Toute personne détenue ou emprisonnée a le droit de recevoir des visites, en particulier de membres de sa famille, et de correspondre, en particulier avec eux, et elle doit disposer de possibilités adéquates de communiquer avec le monde extérieur, sous réserve des conditions et restrictions raisonnables que peuvent spécifier la loi ou les règlements pris conformément à la loi.

Principe 20

Si une personne détenue ou emprisonnée en fait la demande, elle sera placée, si possible, dans un lieu de détention ou d'emprisonnement raisonnablement proche de son lieu de résidence habituel.

Principe 21

1. Il est interdit d'abuser de la situation d'une personne détenue ou emprisonnée pour la contraindre à avouer, à s'incriminer de quelque autre façon ou à témoigner contre toute autre personne.

2. Aucune personne détenue ne sera soumise, pendant son interrogatoire, à des actes de violence, des menaces ou des méthodes d'interrogatoire de nature à compromettre sa capacité de décision ou son discernement.

Principe 22

Aucune personne détenue ou emprisonnée ne pourra, même si elle y consent, faire l'objet d'expériences médicales ou scientifiques de nature à nuire à sa santé.

Principe 23

1. La durée de tout interrogatoire auquel sera soumise une personne détenue ou emprisonnée et des intervalles entre les interrogatoires ainsi que le nom des agents qui y auront procédé et de toute autre personne y ayant assisté seront consignés et authentifiés dans les formes prescrites par la loi.

2. La personne détenue ou emprisonnée ou son conseil, lorsque la loi le prévoit, auront accès aux renseignements visés au paragraphe 1 du présent principe.

Principe 24

Toute personne détenue ou emprisonnée se verra offrir un examen médical approprié dans un délai aussi bref que possible après son entrée dans le lieu de détention ou d'emprisonnement; par la suite, elle bénéficiera de soins et traitements médicaux chaque fois que le besoin s'en fera sentir. Ces soins et traitements seront gratuits.

Principe 25

Toute personne détenue ou emprisonnée ou son conseil a, sous la seule réserve des conditions raisonnablement nécessaires pour assurer la sécurité et le maintien de l'ordre dans le lieu de détention ou d'emprisonnement, le droit de demander à une autorité judiciaire ou autre un deuxième examen médical ou une deuxième opinion médicale.

Principe 26

Le fait qu'une personne détenue ou emprisonnée a subi un examen médical, le nom du médecin et les résultats de l'examen seront dûment consignés. L'accès à ces renseignements sera assuré, et ce conformément aux règles pertinentes du droit interne.

Principe 27

Le non-respect des présents principes dans l'obtention de preuves sera pris en compte pour déterminer si des preuves produites contre une personne détenue ou emprisonnée sont admissibles.

Principe 28

Toute personne détenue ou emprisonnée a le droit d'obtenir, dans les limites des ressources disponibles, si elles proviennent de sources publiques, une quantité raisonnable de matériel éducatif, culturel et d'information, sous réserve des conditions raisonnablement nécessaires pour assurer la sécurité et le maintien de l'ordre dans le lieu de détention ou d'emprisonnement.

Principe 29

1. Afin d'assurer le strict respect des lois et règlements pertinents, les lieux de détention doivent être inspectés régulièrement par des personnes qualifiées et expérimentées, nommées par une autorité compétente distincte de l'autorité directement chargée de l'administration du lieu de détention ou d'emprisonnement et responsables devant elle.

2. Toute personne détenue ou emprisonnée a le droit de communiquer librement et en toute confidence avec les personnes qui inspectent les lieux de détention ou d'emprisonnement conformément au paragraphe 1 du présent principe, sous réserve des conditions raisonnablement nécessaires pour assurer la sécurité et le maintien de l'ordre dans lesdits lieux.

Principe 30

1. Les types de comportement qui constituent, de la part d'une personne détenue ou emprisonnée, des infractions disciplinaires durant la détention ou l'emprisonnement, le genre et la durée des sanctions disciplinaires qui peuvent être appliquées et les autorités compétentes pour imposer ces sanctions doivent être spécifiés par la loi ou les règlements pris conformément à la loi et être dûment publiés.

2. Toute personne détenue ou emprisonnée a le droit d'être entendue avant que des mesures d'ordre disciplinaire soient prises à son égard. Elle a le droit d'intenter un recours contre ces mesures devant l'autorité supérieure.

Principe 31

Les autorités compétentes s'efforceront de fournir, si besoin est, conformément au droit interne, une assistance aux membres à charge, notamment aux membres mineurs, de la famille des personnes détenues ou emprisonnées et elles se soucieront en particulier d'assurer, dans de bonnes conditions, la garde des enfants laissés sans surveillance.

Principe 32

1. La personne détenue ou son conseil aura le droit d'introduire à tout moment un recours, conformément au droit interne, devant une autorité judiciaire ou autre afin de contester la légalité de la mesure de détention et d'obtenir sa mise en liberté sans délai, si cette mesure est irrégulière.

2. La procédure mentionnée au paragraphe 1 du présent principe doit être simple et rapide et elle doit être gratuite pour les personnes détenues impécunieuses. L'autorité responsable de la détention doit présenter sans retard déraisonnable la personne détenue devant l'autorité saisie du recours.

Principe 33

1. Toute personne détenue ou emprisonnée, ou son conseil, a le droit de présenter une requête ou une plainte au sujet de la façon dont elle est traitée, en particulier dans le cas de tortures ou d'autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, aux autorités chargées de l'administration du lieu de détention et aux autorités supérieures, et, si nécessaire, aux autorités de contrôle ou de recours compétentes.

2. Lorsque ni la personne détenue ou emprisonnée ni son conseil n'a la possibilité d'exercer les droits visés au paragraphe 1 du présent principe, un membre de la famille de la personne détenue ou emprisonnée ou toute autre personne qui connaît l'affaire peut exercer ces droits.

3. Le caractère confidentiel de la requête ou de la plainte est maintenu si le demandeur le requiert.

4. Toute requête ou plainte doit être examinée sans retard et une réponse doit être donnée sans retard injustifié. En cas de rejet de la requête ou de la plainte ou en cas de retard excessif, le demandeur est autorisé à saisir une autorité judiciaire ou autre. Ni la personne détenue ou emprisonnée ni aucun demandeur aux termes du paragraphe 1 du présent principe ne doit subir de préjudice pour avoir présenté une requête ou une plainte.

Principe 34

Si une personne détenue ou emprisonnée vient à décéder ou à disparaître pendant la période de sa détention ou de son emprisonnement, une autorité judiciaire ou autre ordonnera une enquête sur les causes du décès ou de la disparition, soit de sa propre initiative, soit à la requête d'un membre de la famille de cette personne ou de toute personne qui a connaissance de l'affaire. Si les circonstances le justifient, une enquête sera conduite dans les mêmes conditions de procédure lorsque le décès ou la disparition survient peu après la fin de la période de détention ou d'emprisonnement. Les résultats ou le rapport d'enquête seront rendus disponibles si la demande en est faite, à moins qu'une telle décision ne compromette une instruction criminelle en cours.

Principe 35

1. Les préjudices subis à la suite d'actes ou d'omissions commis par un agent de la fonction publique en violation des droits énoncés dans les présents principes seront indemnisés conformément aux règles applicables en vertu du droit interne.

2. Les renseignements devant être consignés en vertu des présents principes devront être accessibles conformément aux procédures prévues par le droit interne aux fins des demandes d'indemnisation présentées en vertu du présent principe.

Principe 36

1. Toute personne détenue soupçonnée ou inculpée d'une infraction pénale est présumée innocente et doit être traitée en conséquence jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d'un procès public pour lequel elle aura reçu toutes les garanties nécessaires à sa défense.

2. Toute personne ainsi soupçonnée ou inculpée ne peut être arrêtée ou détenue en attendant l'ouverture de l'instruction et du procès que pour les besoins de l'administration de la justice, pour les motifs, sous les conditions et conformément aux procédures prévues par la loi. Sont interdites les contraintes imposées à une telle personne qui ne seraient pas strictement nécessaires soit aux fins de la détention, soit pour empêcher qu'il ne soit fait obstacle au déroulement de l'instruction ou à l'administration de la justice, soit pour assurer la sécurité et le maintien de l'ordre dans le lieu de détention.

Principe 37

Toute personne détenue du chef d'une infraction pénale est, après son arrestation, traduite dans les meilleurs délais devant une autorité judiciaire ou autre, prévue par la loi. Cette autorité statue sans retard sur la légalité et la nécessité de la détention. Nul ne peut être maintenu en détention en attendant l'ouverture de l'instruction ou du procès si ce n'est sur l'ordre écrit de ladite autorité. Toute personne détenue, lorsqu'elle est traduite devant cette autorité, a le droit de faire une déclaration concernant la façon dont elle a été traitée alors qu'elle était en état d'arrestation.

Principe 38

Toute personne détenue du chef d'une infraction pénale devra être jugée dans un délai raisonnable ou mise en liberté en attendant l'ouverture du procès.

Principe 39

Sauf dans des cas particuliers prévus par la loi, une personne détenue du chef d'une infraction pénale est en droit, à moins qu'une autorité judiciaire ou autre n'en décide autrement dans l'intérêt de l'administration de la justice, d'être mise en liberté en attendant l'ouverture du procès, sous réserve des conditions qui peuvent être imposées conformément à la loi. Ladite autorité maintient à l'étude la question de la nécessité de la détention.

Clause générale

Aucune disposition du présent Ensemble de principes ne sera interprétée comme constituant une restriction ou une dérogation à l'un quelconque des droits énoncés dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

* L'expression "peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant" doit être interprétée de façon à assurer une protection aussi large que possible contre tous sévices, qu'ils aient un caractère physique ou mental, y compris le fait de soumettre une personne détenue ou emprisonnée à des conditions qui la privent temporairement ou en permanence de l'usage de l'un quelconque de ses sens, tels que la vue ou l'ouïe, ou de la conscience du lieu où elle se trouve et du passage du temps.


Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus

Adopté par le premier Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, tenu à Genève en 1955 et approuvé par le Conseil économique et social dans ses résolutions 663 C (XXIV) du 31 juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13 mai 1977

Observations préliminaires

1. Les règles suivantes n'ont pas pour objet de décrire en détail un système pénitentiaire modèle. Elles ne visent qu'à établir, en s'inspirant des conceptions généralement admises de nos jours et des éléments essentiels des systèmes contemporains les plus adéquats, les principes et les règles d'une bonne organisation pénitentiaire et de la pratique du traitement des détenus.

2. Il est évident que toutes les règles ne peuvent pas être appliquées en tout lieu et en tout temps, étant donné la grande variété de conditions juridiques, sociales, économiques et géographiques que l'on rencontre dans le monde. Elles devraient cependant servir à stimuler l'effort constant visant à leur application, en ayant à l'esprit le fait qu'elles représentent, dans leur ensemble, les conditions minima qui sont admises par les Nations Unies.

3. D'autre part, ces règles se rapportent à des domaines dans lesquels la pensée est en évolution constante. Elles ne tendent pas à exclure la possibilité d'expériences et de pratiques, pourvu que celles-ci soient en accord avec les principes et les objectifs qui se dégagent du texte de l'Ensemble de règles. Dans cet esprit, l'administration pénitentiaire centrale sera toujours fondée à autoriser des exceptions aux règles.

4. 1) La première partie de l'Ensemble de règles traite des règles concernant l'administration générale des établissements pénitentiaires et est applicable à toutes les catégories de détenus, criminels ou civils, prévenus ou condamnés, y compris les détenus, faisait l'objet d'une mesure de sûreté ou d'une mesure rééducative ordonnée par le juge.

2) La deuxième partie contient des règles qui ne sont applicables qu'aux catégories de détenus visés par chaque section. Toutefois, les règles de la section A, applicables aux détenus condamnés, seront également applicables aux catégories de détenus visés dans les sections B, C et D, pourvu qu'elles ne soient pas contradictoires avec les règles qui les régissent et à condition qu'elles soient profitables à ces détenus.

5. 1) Ces règles n'ont pas pour dessein de déterminer l'organisation des établissements pour jeunes délinquants (établissements Borstal, instituts de rééducation, etc.). Cependant, d'une façon générale, la première partie de l'Ensemble de règles peut être considérée comme applicable également à ces établissements.

2) La catégorie des jeunes détenus doit comprendre en tout cas les mineurs qui relèvent des juridictions pour enfants. En règle générale, ces jeunes délinquants ne devraient pas être condamnés à des peines de prison.

Première partie

Règles d'application générale

Principe fondamental

6. 1) Les règles qui suivent doivent être appliquées impartialement. Il ne doit pas être fait de différence de traitement basée sur un préjugé, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.

2) Par contre, il importe de respecter les croyances religieuses et les préceptes moraux du groupe auquel le détenu appartient.

Registre

7. 1) Dans tout endroit où des personnes sont détenues, il faut tenir à jour un registre relié et coté indiquant pour chaque détenu :

a) Son identité;

b) Les motifs de sa détention et l'autorité compétente qui l'a décidée;

c) Le jour et l'heure de l'admission et de la sortie.

2) Aucune personne ne peut être admise dans un établissement sans un titre de détention valable, dont les détails auront été consignés auparavant dans le registre.

Séparation des catégories

8. Les différentes catégories de détenus doivent être placées dans des établissements ou quartiers d'établissements distincts, en tenant compte de leur sexe, de leur âge, de leurs antécédents, des motifs de leur détention et des exigences de leur traitement. C'est ainsi que :

a) Les hommes et les femmes doivent être détenus dans la mesure du possible dans des établissements différents; dans un établissement recevant à la fois des hommes et des femmes, l'ensemble des locaux destinés aux femmes doit être entièrement séparé;

b) Les détenus en prévention doivent être séparés des condamnés;

c) Les personnes emprisonnées pour dettes ou condamnées à une autre forme d'emprisonnement civil doivent être séparées des détenus pour infraction pénale;

d) Les jeunes détenus doivent être séparés des adultes.

Locaux de détention

9. 1) Les cellules ou chambres destinées à l'isolement nocturne ne doivent être occupées que par un seul détenu. Si pour des raisons spéciales, telles qu'un encombrement temporaire, il devient nécessaire pour l'administration pénitentiaire centrale de faire des exceptions à cette règle, on devra éviter de loger deux détenus par cellule ou chambre individuelle.

2) Lorsqu'on recourt à des dortoirs, ceux-ci doivent être occupés par des détenus soigneusement sélectionnés et reconnus aptes à être logés dans ces conditions. La nuit, ils seront soumis à une surveillance régulière, adaptée au type d'établissement considéré.

10. Les locaux de détention et, en particulier, ceux qui sont destinés au logement des détenus pendant la nuit, doivent répondre aux exigences de l'hygiène, compte tenu du climat, notamment en ce qui concerne le cubage d'air, la surface minimum, l'éclairage, le chauffage et la ventilation.

11. Dans tout local où les détenus doivent vivre ou travailler,

a) Les fenêtres doivent être suffisamment grandes pour que le détenu puisse lire et travailler à la lumière naturelle; l'agencement de ces fenêtres doit permettre l'entrée d'air frais, et ceci qu'il y ait ou non une ventilation artificielle;

b) La lumière artificielle doit être suffisante pour permettre au détenu de lire ou de travailler sans altérer sa vue.

12. Les installations sanitaires doivent permettre au détenu de satisfaire aux besoins naturels au moment voulu, d'une manière propre et décente.

13. Les installations de bain et de douche doivent être suffisantes pour que chaque détenu puisse être mis à même et tenu de les utiliser, à une température adaptée au climat et aussi fréquemment que l'exige l'hygiène générale selon la saison et la région géographique, mais au moins une fois par semaine sous un climat tempéré.

14. Tous les locaux fréquentés régulièrement par les détenus doivent être maintenus en parfait état d'entretien et de propreté.

Hygiène personnelle

15. On doit exiger des détenus la propreté personnelle; à cet effet, ils doivent disposer d'eau et des articles de toilette nécessaires à leur santé et à leur propreté.

16. Afin de permettre aux détenus de se présenter de façon convenable et de conserver le respect d'eux-mêmes, des facilités doivent être prévues pour le bon entretien de la chevelure et de la barbe; les hommes doivent pouvoir se raser régulièrement.

Vêtements et literie

17. 1) Tout détenu qui n'est pas autorisé à porter ses vêtements personnels doit recevoir un trousseau qui soit approprié au climat et suffisant pour le maintenir en bonne santé. Ces vêtements ne doivent en aucune manière être dégradants ou humiliants.

2) Tous les vêtements doivent être propres et maintenus en bon état. Les sous-vêtements doivent être changés et lavés aussi fréquemment qu'il est nécessaire pour le maintien de l'hygiène.

3) Dans des circonstances exceptionnelles, quand le détenu s'éloigne de l'établissement à des fins autorisées, il doit lui être permis de porter ses vêtements personnels ou des vêtements n'attirant pas l'attention.

18. Lorsque les détenus sont autorisés à porter leurs vêtements personnels, des dispositions doivent être prises au moment de l'admission à l'établissement pour assurer que ceux-ci soient propres et utilisables.

19. Chaque détenu doit disposer, en conformité des usages locaux ou nationaux, d'un lit individuel et d'une literie individuelle suffisante, entretenue convenablement et renouvelée de façon à en assurer la propreté.

Alimentation

20. 1) Tout détenu doit recevoir de l'administration aux heures usuelles une alimentation de bonne qualité, bien préparée et servie, ayant une valeur nutritive suffisant au maintien de sa santé et de ses forces.

2) Chaque détenu doit avoir la possibilité de se pourvoir d'eau potable lorsqu'il en a besoin.

Exercice physique

21. 1) Chaque détenu qui n'est pas occupé à un travail en plein air doit avoir, si le temps le permet, une heure au moins par jour d'exercice physique approprié en plein air.

2) Les jeunes détenus et les autres détenus dont l'âge et la condition physique le permettent doivent recevoir pendant la période réservée à l'exercice une éducation physique et récréative. A cet effet, le terrain, les installations et l'équipement devraient être mis à leur disposition.

Services médicaux

22. 1) Chaque établissement pénitentiaire doit disposer au moins des services d'un médecin qualifié, qui devrait avoir des connaissances en psychiatrie. Les services médicaux devraient être organisés en relation étroite avec l'administration générale du service de santé de la communauté ou de la nation. Ils doivent comprendre un service psychiatrique pour le diagnostic et, s'il y a lieu, le traitement des cas d'anomalie mentale.

2) Pour les malades qui ont besoin de soins spéciaux, il faut prévoir le transfert vers des établissements pénitentiaires spécialisés ou vers des hôpitaux civils. Lorsque le traitement hospitalier est organisé dans l'établissement, celui-ci doit être pourvu d'un matériel, d'un outillage et des produits pharmaceutiques permettant de donner les soins et le traitement convenables aux détenus malades, et le personnel doit avoir une formation professionnelle suffisante.

3) Tout détenu doit pouvoir bénéficier des soins d'un dentiste qualifié.

23. 1) Dans les établissements pour femmes, il doit y avoir les installations spéciales nécessaires pour le traitement des femmes enceintes, relevant de couches et convalescentes. Dans toute la mesure du possible, des dispositions doivent être prises pour que l'accouchement ait lieu dans hôpital civil. Si l'enfant est né en prison, il importe que l'acte de naissance n'en fasse pas mention.

2) Lorsqu'il est permis aux mères détenues de conserver leurs nourrissons, des dispositions doivent être prises pour organiser une crèche, dotée d'un personnel qualifié, où les nourrissons seront placés durant les moments où ils ne sont pas laissés aux soins de leurs mères.

24. Le médecin doit examiner chaque détenu aussitôt que possible après son admission et aussi souvent que cela est nécessaire ultérieurement, particulièrement en vue de déceler l'existence possible d'une maladie physique ou mentale, et de prendre toutes les mesures nécessaires; d'assurer la séparation des détenus suspects d'être atteints de maladies infectieuses ou contagieuses; de relever les déficiences physiques ou mentales qui pourraient être un obstacle au reclassement et de déterminer la capacité physique de travail de chaque détenu.

25. 1) Le médecin est chargé de surveiller la santé physique et mentale des détenus. Il devrait voir chaque jour tous les détenus malades, tous ceux qui se plaignent d'être malades, et tous ceux sur lesquels son attention est particulièrement attirée.

2) Le médecin doit présenter un rapport au directeur chaque fois qu'il estime que la santé physique ou mentale d'un détenu a été ou sera affectée par la prolongation ou par une modalité quelconque de la détention.

26. 1) Le médecin doit faire des inspections régulières et conseiller le directeur en ce qui concerne :

a) La quantité, la qualité, la préparation et la distribution des aliments;

b) L'hygiène et la propreté de l'établissement et des détenus;

c) Les installations sanitaires, le chauffage, l'éclairage et la ventilation de l'établissement;

d) La qualité et la propreté des vêtements et de la literie des détenus;

e) L'observation des règles concernant l'éducation physique et sportive lorsque celle-ci est organisée par un personnel non spécialisé.

2) Le directeur doit prendre en considération les rapports et conseils du médecin visés aux règles 25, paragraphe 2, et 26 et, en cas d'accord, prendre immédiatement les mesures voulues pour que ses recommandations soient suivies; en cas de désaccord ou si la matière n'est pas de sa compétence, il transmettra immédiatement le rapport médical et ses propres commentaires à l'autorité supérieure.

Discipline et punitions

27. L'ordre et la discipline doivent être maintenus avec fermeté, mais sans apporter plus de restrictions qu'il n'est nécessaire pour le maintien de la sécurité et d'une vie communautaire bien organisée.

28. 1) Aucun détenu ne pourra remplir dans les services de l'établissement un emploi comportant un pouvoir disciplinaire.

2) Cette règle ne saurait toutefois faire obstacle au bon fonctionnement des systèmes à base de self-government. Ces systèmes impliquent en effet que certaines activités ou responsabilités d'ordre social, éducatif ou sportif soient confiées, sous contrôle, à des détenus groupés en vue de leur traitement.

29. Les points suivants doivent toujours être déterminés soit par la loi, soit par un règlement de l'autorité administrative compétente :

a) La conduite qui constitue une infraction disciplinaire;

b) Le genre et la durée des sanctions disciplinaires qui peuvent être infligées;

c) L'autorité compétente pour prononcer ces sanctions.

30. 1) Aucun détenu ne peut être puni que conformément aux dispositions d'une telle loi ou d'un tel règlement, et jamais deux fois pour la même infraction.

2) Aucun détenu ne peut être puni sans être informé de l'infraction qu'on lui reproche et sans qu'il ait eu l'occasion de présenter sa défense. L'autorité compétente doit procéder à un examen complet du cas.

3) Dans la mesure où cela est nécessaire et réalisable, il faut permettre au détenu de présenter sa défense par l'intermédiaire d'un interprète.

31. Les peines corporelles, la mise au cachot obscur ainsi que toute sanction cruelle, inhumaine ou dégradante doivent être complètement défendues comme sanctions disciplinaires.

32. 1) Les peines de l'isolement et de la réduction de nourriture ne peuvent jamais être infligées sans que le médecin ait examiné le détenu et certifié par écrit que celui-ci est capable de les supporter.

2) Il en est de même pour toutes autres mesures punitives qui risqueraient d'altérer la santé physique ou mentale des détenus. En tout cas, de telles mesures ne devront jamais être contraires au principe posé par la règle 31, ni s'en écarter.

3) Le médecin doit visiter tous les jours les détenus qui subissent de telles sanctions disciplinaires et doit faire rapport au directeur s'il estime nécessaire de terminer ou modifier la sanction pour des raisons de santé physique ou mentale.

Moyens de contrainte

33. Les instruments de contrainte tels que menottes, chaînes, fers et camisoles de force ne doivent jamais être appliqués en tant que sanctions. Les chaînes et les fers ne doivent pas non plus être utilisés en tant que moyens de contrainte. Les autres instruments de contrainte ne peuvent être utilisés que dans les cas suivants :

a) Par mesure de précaution contre une évasion pendant un transfèrement, pourvu qu'ils soient enlevés dès que le détenu comparaît devant une autorité judiciaire ou administrative;

b) Pour des raisons médicales sur indication du médecin;

c) Sur ordre du directeur, si les autres moyens de maîtriser un détenu ont échoué, afin de l'empêcher de porter préjudice à lui-même ou à autrui ou de causer des dégâts; dans ce cas le directeur doit consulter d'urgence le médecin et faire rapport à l'autorité administrative supérieure.

34. Le modèle et le mode d'emploi des instruments de contrainte doivent être déterminés par l'administration pénitentiaire centrale. Leur application ne doit pas être prolongée au-delà du temps strictement nécessaire.

Information et droit de plainte des détenus

35. 1) Lors de son admission, chaque détenu doit recevoir des informations écrites au sujet du régime des détenus de sa catégorie, des règles disciplinaires de l'établissement, des moyens autorisés pour obtenir des renseignements et formuler des plaintes, et de tous autres points qui peuvent être nécessaires pour lui permettre de connaître ses droits et ses obligations et de s'adapter à la vie de l'établissement.

2) Si le détenu est illettré, ces informations doivent lui être fournies oralement.

36. 1) Tout détenu doit avoir chaque jour ouvrable l'occasion de présenter des requêtes et des plaintes au directeur de l'établissement ou au fonctionnaire autorisé à le représenter.

2) Des requêtes ou plaintes pourront être présentées à l'inspecteur des prisons au cours d'une inspection. Le détenu pourra s'entretenir avec l'inspecteur ou tout autre fonctionnaire chargé d'inspecter hors la présence du directeur ou des autres membres du personnel de l'établissement.

3) Tout détenu doit être autorisé à adresser, sans censure quant au fond mais en due forme, une requête ou plainte à l'administration pénitentiaire centrale, à l'autorité judiciaire ou à d'autres autorités compétentes, par la voie prescrite.

4) A moins qu'une requête ou plainte soit de toute évidence téméraire ou dénuée de fondement, elle doit être examinée sans retard et une réponse donnée au détenu en temps utile.

Contact avec le monde extérieur

37. Les détenus doivent être autorisés, sous la surveillance nécessaire, à communiquer avec leur famille et ceux de leurs amis auxquels on peut faire confiance, à intervalles réguliers tant par correspondance qu'en recevant des visites.

38. 1) Des facilités raisonnables pour communiquer avec leurs représentants diplomatiques et consulaires doivent être accordées aux détenus ressortissants d'un pays étranger.

2) En ce qui concerne les détenus ressortissants des Etats qui n'ont pas de représentants diplomatiques ou consulaires dans le pays ainsi que les réfugiés et les apatrides, les mêmes facilités doivent leur être accordées de s'adresser au représentant diplomatique de l'Etat qui est chargé de leurs intérêts ou à toute autorité nationale ou internationale qui a pour tâche de les protéger.

39. Les détenus doivent être tenus régulièrement au courant des événements les plus importants, soit par la lecture de journaux quotidiens, de périodiques ou de publications pénitentiaires spéciales, soit par des émissions radiophoniques, des conférences ou tout autre moyen analogue, autorisés ou contrôlés par l'administration.

Bibliothèque

40. Chaque établissement doit avoir une bibliothèque à l'usage de toutes les catégories de détenus et suffisamment pourvue de livres instructifs et récréatifs. Les détenus doivent être encouragés à l'utiliser le plus possible.

Religion

41. 1) Si l'établissement contient un nombre suffisant de détenus appartenant à la même religion, un représentant qualifié de cette religion doit être nommé ou agréé. Lorsque le nombre de détenus le justifie et que les circonstances le permettent, l'arrangement devrait être prévu à plein temps.

2) Le représentant qualifié, nommé et agréé selon le paragraphe 1, doit être autorisé à organiser périodiquement des services religieux et à faire, chaque fois qu'il est indiqué, des visites pastorales en particulier aux détenus de sa religion.

3) Le droit d'entrer en contact avec un représentant qualifié d'une religion ne doit jamais être refusé à aucun détenu. Par contre, si un détenu s'oppose à la visite d'un représentant d'une religion, il faut pleinement respecter son attitude.

42. Chaque détenu doit être autorisé, dans la mesure du possible, à satisfaire aux exigences de sa vie religieuse, en participant aux services organisés dans l'établissement et en ayant en sa possession des livres d'édification et d'instruction religieuse de sa confession.

Dépôt des objets appartenant aux détenus

43. 1) Lorsque le règlement n'autorise pas le détenu à conserver en sa possession l'argent, les objets de valeur, vêtements et autres effets qui lui appartiennent, ceux-ci doivent être placés en lieu sûr, lors de son admission à l'établissement. Un inventaire de ces objets doit être dressé et il doit être signé par le détenu. Des mesures doivent être prises pour conserver ces objets en bon état.

2) Ces objets et l'argent doivent lui être rendus à sa libération, à l'exception de l'argent qu'il a été autorisé à dépenser, des objets qu'il a pu envoyer à l'extérieur ou des vêtements qui ont dû être détruits par raison d'hygiène. Le détenu doit donner décharge des objets et de l'argent qui lui ont été restitués.

3) Les valeurs ou objets envoyés de l'extérieur au détenu sont soumis aux mêmes règles.

4) Si le détenu est porteur de médicaments ou de stupéfiants au moment de son admission, le médecin décidera de l'usage à en faire.

Notification de décès, maladie, transfèrement, etc.

44. 1) En cas de décès ou de maladie grave, d'accident grave ou de placement du détenu dans un établissement pour malades mentaux, le directeur doit en informer immédiatement le conjoint si le détenu est marié, ou le parent le plus proche et en tout cas toute autre personne que le détenu a demandé d'informer.

2) Un détenu doit être informé immédiatement du décès ou de la maladie grave d'un proche parent. En cas de maladie dangereuse d'une telle personne, lorsque les circonstances le permettent, le détenu devrait être autorisé à se rendre à son chevet, soit sous escorte, soit librement.

3) Tout détenu aura le droit d'informer immédiatement sa famille de sa détention ou de son transfèrement à un autre établissement.

Transfèrement des détenus

45. 1) Lorsque les détenus sont amenés à l'établissement ou en sont extraits, ils doivent être exposés aussi peu que possible à la vue du public, et des dispositions doivent être prises pour les protéger des insultes, de la curiosité du public et de toute espèce de publicité.

2) Le transport des détenus dans de mauvaises conditions d'aération ou de lumière, ou par tout moyen leur imposant une souffrance physique, doit être interdit.

3) Le transport des détenus doit se faire aux frais de l'administration et sur un pied d'égalité pour tous.

Personnel pénitentiaire

46. 1) L'administration pénitentiaire doit choisir avec soin le personnel de tout grade, car c'est de son intégrité, de son humanité, de son aptitude personnelle et de ses capacités professionnelles que dépend une bonne gestion des établissements pénitentiaires.

2) L'administration pénitentiaire doit s'efforcer constamment d'éveiller et de maintenir dans l'esprit du personnel et de l'opinion publique la conviction que cette mission est un service social d'une grande importance; à cet effet, tous les moyens appropriés pour éclairer le public devraient être utilisés.

3) Afin que les buts précités puissent être réalisés, les membres du personnel doivent être employés à plein temps en qualité de fonctionnaires pénitentiaires de profession, ils doivent posséder le statut des agents de l'Etat et être assurés en conséquence d'une sécurité d'emploi ne dépendant que de leur bonne conduite, de l'efficacité de leur travail et de leur aptitude physique. La rémunération doit être suffisante pour qu'on puisse recruter et maintenir en service des hommes et des femmes capables; les avantages de la carrière et les conditions de service doivent être déterminés en tenant compte de la nature pénible du travail.

47. 1) Le personnel doit être d'un niveau intellectuel suffisant.

2) Il doit suivre, avant d'entrer en service, un cours de formation générale et spéciale et satisfaire à des épreuves d'ordre théorique et pratique.

3) Après son entrée en service et au cours de sa carrière, le personnel devra maintenir et améliorer ses connaissances et sa capacité professionnelle en suivant des cours de perfectionnement qui seront organisés périodiquement.

48. Tous les membres du personnel doivent en toute circonstance se conduire et accomplir leur tâche de telle manière que leur exemple ait une bonne influence sur les détenus et suscite leur respect.

49. 1) On doit adjoindre au personnel, dans toute la mesure du possible, un nombre suffisant de spécialistes tels que psychiatres, psychologues, travailleurs sociaux, instituteurs, instructeurs techniques.

2) Les services des travailleurs sociaux, des instituteurs et des instructeurs techniques doivent être assurés d'une façon permanente, mais sans exclure les services des auxiliaires à temps partiel ou bénévoles.

50. 1) Le directeur d'un établissement doit être suffisamment qualifié pour sa tâche par son caractère, ses capacités administratives, une formation appropriée et son expérience dans ce domaine.

2) Il doit consacrer tout son temps à sa fonction officielle; celle-ci ne peut être accessoire.

3) Il doit habiter l'établissement ou à proximité immédiate de celui-ci.

4) Lorsque deux ou plusieurs établissements sont sous l'autorité d'un seul directeur, celui-ci doit les visiter chacun à de fréquents intervalles. Chacun de ces établissements doit avoir à sa tête un fonctionnaire résident responsable.

51. 1) Le directeur, son adjoint et la majorité des autres membres du personnel de l'établissement doivent parler la langue de la plupart des détenus, ou une langue comprise par la plupart de ceux-ci.

2) On doit recourir aux services d'un interprète chaque fois que cela est nécessaire.

52. 1) Dans les établissements suffisamment grands pour exiger le service d'un ou de plusieurs médecins consacrant tout leur temps à cette tâche, un de ceux-ci au moins doit habiter l'établissement ou à proximité immédiate de celui-ci.

2) Dans les autres établissements, le médecin doit faire des visites chaque jour et habiter suffisamment près pour être à même d'intervenir sans délai dans les cas d'urgence.

53. 1) Dans un établissement mixte, la section des femmes doit être placée sous la direction d'un fonctionnaire féminin responsable qui doit avoir la garde de toutes les clefs de cette section de l'établissement.

2) Aucun fonctionnaire du sexe masculin ne doit pénétrer dans la section des femmes sans être accompagné d'un membre féminin du personnel.

3) Seuls des fonctionnaires féminins doivent assurer la surveillance des femmes détenues. Ceci n'exclut pas cependant que, pour des raisons professionnelles, des fonctionnaires du sexe masculin, notamment des médecins et des instituteurs, exercent leurs fonctions dans les établissements ou sections réservés aux femmes.

54. 1) Les fonctionnaires des établissements ne doivent, dans leurs rapports avec les détenus, utiliser la force qu'en cas de légitime défense, de tentative d'évasion ou de résistance par la force ou par l'inertie physique à un ordre fondé sur la loi ou les règlements. Les fonctionnaires qui recourent à la force doivent en limiter l'emploi au strict nécessaire et faire immédiatement rapport de l'incident au directeur de l'établissement.

2) Les membres du personnel pénitentiaire doivent subir un entraînement physique spécial qui leur permette de maîtriser les détenus violents.

3) Sauf circonstances spéciales, les agents qui assurent un service les mettant en contact direct avec les détenus ne doivent pas être armés. Par ailleurs on ne doit jamais confier une arme à un membre du personnel sans que celui-ci ait été entraîné à son maniement.

Inspection

55. Des inspecteurs qualifiés et expérimentés, nommés par une autorité compétente, devront procéder à l'inspection régulière des établissements et services pénitentiaires. Ils veilleront en particulier à ce que ces établissements soient administrés conformément aux lois et règlements en vigueur et dans le but d'atteindre les objectifs des services pénitentiaires et correctionnels.

Deuxième partie

Règles applicables à des catégories spéciales

A. -- Détenus condamnés

Principes directeurs

56. Les principes directeurs qui suivent ont pour but de définir l'esprit dans lequel les systèmes pénitentiaires doivent être administrés et les objectifs auxquels ils doivent tendre, conformément à la déclaration faite dans l'observation préliminaire 1 du présent texte.

57. L'emprisonnement et les autres mesures qui ont pour effet de retrancher un délinquant du monde extérieur sont afflictives par le fait même qu'elles dépouillent l'individu du droit de disposer de sa personne en le privant de sa liberté. Sous réserve des mesures de ségrégation justifiées ou du maintien de la discipline, le système pénitentiaire ne doit donc pas aggraver les souffrances inhérentes à une telle situation.

58. Le but et la justification des peines et mesures privatives de liberté sont en définitive de protéger la société contre le crime. Un tel but ne sera atteint que si la période de privation de liberté est mise à profit pour obtenir, dans toute la mesure du possible, que le délinquant, une fois libéré, soit non seulement désireux, mais aussi capable de vivre en respectant la loi et de subvenir à ses besoins.

59. A cette fin, le régime pénitentiaire doit faire appel à tous les moyens curatifs, éducatifs, moraux et spirituels et autres et à toutes les formes d'assistance dont il peut disposer, en cherchant à les appliquer conformément aux besoins du traitement individuel des délinquants.

60. 1) Le régime de l'établissement doit chercher à réduire les différences qui peuvent exister entre la vie en prison et la vie libre dans la mesure où ces différences tendent à établir le sens de la responsabilité du détenu ou le respect de la dignité de sa personne.

2) Avant la fin de l'exécution d'une peine ou mesure, il est désirable que les mesures nécessaires soient prises pour assurer au détenu un retour progressif à la vie dans la société. Ce but pourra être atteint, selon les cas, par un régime préparatoire à la libération, organisé dans l'établissement même ou dans un autre établissement approprié, ou par une libération à l'épreuve sous un contrôle qui ne doit pas être confié à la police, mais qui comportera une assistance sociale efficace.

61. Le traitement ne doit pas mettre l'accent sur l'exclusion des détenus de la société, mais au contraire sur le fait qu'ils continuent à en faire partie. A cette fin, il faut recourir, dans la mesure du possible, à la coopération d'organismes de la communauté pour aider le personnel de l'établissement dans sa tâche de reclassement des détenus. Des assistants sociaux collaborant avec chaque établissement doivent avoir pour mission de maintenir et d'améliorer les relations du détenu avec sa famille et avec les organismes sociaux qui peuvent lui être utiles. Des démarches doivent être faites en vue de sauvegarder, dans toute la mesure compatible avec la loi et la peine à subir, les droits relatifs aux intérêts civils, le bénéfice des droits de la sécurité sociale et d'autres avantages sociaux des détenus.

62. Les services médicaux de l'établissement s'efforceront de découvrir et devront traiter toutes déficiences ou maladies physiques ou mentales qui pourraient être un obstacle au reclassement d'un détenu. Tout traitement médical, chirurgical et psychiatrique jugé nécessaire doit être appliqué à cette fin.

63. 1) La réalisation de ces principes exige l'individualisation du traitement et, à cette fin, un système souple de classification des détenus en groupes; il est donc désirable que ces groupes soient placés dans des établissements distincts où chaque groupe puisse recevoir le traitement nécessaire.

2) Ces établissements ne doivent pas présenter la même sécurité pour chaque groupe. Il est désirable de prévoir des degrés de sécurité selon les besoins des différents groupes. Les établissements ouverts, par le fait même qu'ils ne prévoient pas de mesures de sécurité physique contre les évasions mais s'en remettent à cet égard à l'autodiscipline des détenus, fournissent à des détenus soigneusement choisis les conditions les plus favorables à leur reclassement.

3) Il est désirable que, dans les établissements fermés, l'individualisation du traitement ne soit pas gênée par le nombre trop élevé des détenus. Dans certains pays, on estime que la population de tels établissements ne devrait pas dépasser 500. Dans les établissements ouverts, la population doit être aussi réduite que possible.

4) Par contre, il est peu désirable de maintenir des établissements qui soient trop petits pour qu'on puisse y organiser un régime convenable.

64. Le devoir de la société ne cesse pas à la libération d'un détenu. Il faudrait donc disposer d'organismes gouvernementaux ou privés capables d'apporter au détenu libéré une aide postpénitentiaire efficace, tendant à diminuer les préjugés à son égard et lui permettant de se reclasser dans la communauté.

Traitement

65. Le traitement des individus condamnés à une peine ou mesure privative de liberté doit avoir pour but, autant que la durée de la condamnation le permet, de créer en eux la volonté et les aptitudes qui les mettent à même, après leur libération, de vivre en respectant la loi et de subvenir à leurs besoins. Ce traitement doit être de nature à encourager le respect d'eux-mêmes et à développer leur sens de la responsabilité.

66. 1) A cet effet, il faut recourir notamment aux soins religieux dans les pays où cela est possible, à l'instruction, à l'orientation et à la formation professionnelles, aux méthodes de l'assistance sociale individuelle, au conseil relatif à l'emploi, au développement physique et à l'éducation du caractère moral, en conformité des besoins individuels de chaque détenu. Il convient de tenir compte du passé social et criminel du condamné, de ses capacités et aptitudes physiques et mentales, de ses dispositions personnelles, de la durée de la condamnation et de ses perspectives de reclassement.

2) Pour chaque détenu condamné à une peine ou mesure d'une certaine durée, le directeur de l'établissement doit recevoir, aussitôt que possible après l'admission de celui-ci, des rapports complets sur les divers aspects mentionnés au paragraphe précédent. Ces rapports doivent toujours comprendre celui d'un médecin, si possible spécialisé en psychiatrie, sur la condition physique et mentale du détenu.

3) Les rapports et autres pièces pertinentes seront placés dans un dossier individuel. Ce dossier sera tenu à jour et classé de telle sorte qu'il puisse être consulté par le personnel responsable, chaque fois que le besoin s'en fera sentir.

Classification et individualisation

67. Les buts de la classification doivent être :

a) D'écarter les détenus qui, en raison de leur passé criminel ou de leurs mauvaises dispositions, exerceraient une influence fâcheuse sur leurs codétenus; b) De répartir les détenus en groupes afin de faciliter leur traitement en vue de leur réadaptation sociale.

68. Il faut disposer, dans la mesure du possible, d'établissements séparés ou de quartiers distincts d'un établissement pour le traitement des différents groupes de détenus.

69. Dès que possible après l'admission et après une étude de la personnalité de chaque détenu condamné à une peine ou mesure d'une certaine durée, un programme de traitement doit être préparé pour lui, à la lumière des données dont on dispose sur ses besoins individuels, ses capacités et son état d'esprit.

Privilèges

70. Il faut instituer dans chaque établissement un système de privilèges adapté aux différents groupes de détenus et aux différentes méthodes de traitement, afin d'encourager la bonne conduite, de développer le sens de la responsabilité et de stimuler l'intérêt et la coopération des détenus à leur traitement.

Travail

71. 1) Le travail pénitentiaire ne doit pas avoir un caractère afflictif.

2) Tous les détenus condamnés sont soumis à l'obligation du travail, compte tenu de leur aptitude physique et mentale telle qu'elle sera déterminée par le médecin.

3) Il faut fournir aux détenus un travail productif suffisant pour les occuper pendant la durée normale d'une journée de travail.

4) Ce travail doit être, dans la mesure du possible, de nature à maintenir ou à augmenter leur capacité de gagner honnêtement leur vie après la libération.

5) Il faut donner une formation professionnelle utile aux détenus qui sont à même d'en profiter et particulièrement aux jeunes.

6) Dans les limites compatibles avec une sélection professionnelle rationnelle et avec les exigences de l'administration et de la discipline pénitentiaire, les détenus doivent pouvoir choisir le genre de travail qu'ils désirent accomplir.

72. 1) L'organisation et les méthodes de travail pénitentiaire doivent se rapprocher autant que possible de celles qui régissent un travail analogue hors de l'établissement, afin de préparer les détenus aux conditions normales du travail libre.

2) Cependant, l'intérêt des détenus et de leur formation professionnelle ne doit pas être subordonné au désir de réaliser un bénéfice au moyen du travail pénitentiaire.

73. 1) Les industries et fermes pénitentiaires doivent de préférence être dirigées par l'administration et non par des entrepreneurs privés.

2) Lorsque les détenus sont utilisés pour des travaux qui ne sont pas contrôlés par l'administration, ils doivent toujours être placés sous la surveillance du personnel pénitentiaire. A moins que le travail soit accompli pour d'autres départements de l'Etat, les personnes auxquelles ce travail est fourni doivent payer à l'administration le salaire normal exigible pour ce travail, en tenant compte toutefois du rendement des détenus.

74. 1) Les précautions prescrites pour protéger la sécurité et la santé des travailleurs libres doivent également être prises dans les établissements pénitentiaires.

2) Des dispositions doivent être prises pour indemniser les détenus pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, à des conditions égales à celles que la loi accorde aux travailleurs libres.

75. 1) Le nombre maximum d'heures de travail des détenus par jour et par semaine doit être fixé par la loi ou par un règlement administratif, compte tenu des règlements ou usages locaux suivis en ce qui concerne l'emploi des travailleurs libres.

2) Les heures ainsi fixées doivent laisser un jour de repos par semaine et suffisamment de temps pour l'instruction et les autres activités prévues pour le traitement et la réadaptation des détenus.

76. 1) Le travail des détenus doit être rémunéré d'une façon équitable.

2) Le règlement doit permettre aux détenus d'utiliser au moins une partie de leur rémunération pour acheter des objets autorisés qui sont destinés à leur usage personnel et d'en envoyer une autre partie à leur famille.

3) Le règlement devrait prévoir également qu'une partie de la rémunération soit réservée par l'administration afin de constituer un pécule qui sera remis au détenu au moment de sa libération.

Instruction et loisirs

77. 1) Des dispositions doivent être prises pour développer l'instruction de tous les détenus capables d'en profiter, y compris l'instruction religieuse dans les pays où cela est possible. L'instruction des analphabètes et des jeunes détenus doit être obligatoire, et l'administration devra y veiller attentivement.

2) Dans la mesure du possible, l'instruction des détenus doit être coordonnée avec le système de l'instruction publique afin que ceux-ci puissent poursuivre leur formation sans difficulté après la libération.

78. Pour le bien-être physique et mental des détenus, des activités récréatives et culturelles doivent être organisées dans tous les établissements.

Relations sociales, aide postpénitentiaire

79. Une attention particulière doit être apportée au maintien et à l'amélioration des relations entre le détenu et sa famille, lorsque celles-ci sont désirables dans l'intérêt des deux parties.

80. Il faut tenir compte, dès le début de la condamnation, de l'avenir du détenu après sa libération. Celui-ci doit être encouragé à maintenir ou à établir des relations avec des personnes ou des organismes de l'extérieur qui puissent favoriser les intérêts de sa famille ainsi que sa propre réadaptation sociale.

81. 1) Les services et organismes, officiels ou non, qui aident les détenus libérés à retrouver leur place dans la société doivent, dans la mesure du possible, procurer aux détenus libérés les documents et pièces d'identité nécessaires, leur assurer un logement, du travail, des vêtements convenables et appropriés au climat et à la saison, ainsi que les moyens nécessaires pour arriver à destination et pour subsister pendant la période qui suit immédiatement la libération.

2) Les représentants agréés de ces organismes doivent avoir accès à l'établissement et auprès des détenus. Leur avis sur les projets de reclassement d'un détenu doit être demandé dès le début de la condamnation.

3) Il est désirable que l'activité de ces organismes soit autant que possible centralisée ou coordonnée, afin qu'on puisse assurer la meilleure utilisation de leurs efforts.

B. -- Détenus aliénés et anormaux mentaux

82. 1) Les aliénés ne doivent pas être détenus dans les prisons, et des dispositions doivent être prises pour les transférer aussitôt que possible dans des établissements pour malades mentaux.

2) Les détenus atteints d'autres affections ou anormalités mentales doivent être observés et traités dans des institutions spécialisées, placées sous une direction médicale.

3) Pendant la durée de leur séjour en prison, ces personnes doivent être placées sous la surveillance spéciale d'un médecin.

4) Le service médical ou psychiatrique des établissements pénitentiaires doit assurer le traitement psychiatrique de tous les autres détenus qui ont besoin d'un tel traitement.

83. Il est désirable que les dispositions soient prises d'accord avec les organismes compétents, pour que le traitement psychiatrique soit continué si nécessaire après la libération et qu'une assistance sociale postpénitentiaire à caractère psychiatrique soit assurée.

C. -- Personnes arrêtées ou en détention préventive

84. 1) Tout individu arrêté ou incarcéré en raison d'une infraction à la loi pénale et qui se trouve détenu soit dans des locaux de police soit dans une maison d'arrêt, mais n'a pas encore été jugé, est qualifié de "prévenu" dans les dispositions qui suivent.

2) Le prévenu jouit d'une présomption d'innocence et doit être traité en conséquence.

3) Sans préjudice des dispositions légales relatives à la protection de la liberté individuelle ou fixant la procédure à suivre à l'égard des prévenus, ces derniers bénéficieront d'un régime spécial dont les règles ci-après se bornent à fixer les points essentiels.

85. 1) Les prévenus doivent être séparés des détenus condamnés.

2) Les jeunes prévenus doivent être séparés des adultes. En principe, ils doivent être détenus dans des établissements distincts.

86. Les prévenus doivent être logés dans des chambres individuelles, sous réserve d'usages locaux différents eu égard au climat.

87. Dans les limites compatibles avec le bon ordre de l'établissement, les prévenus peuvent, s'ils le désirent, se nourrir à leurs frais en se procurant leur nourriture de l'extérieur par l'intermédiaire de l'administration, de leur famille ou de leurs amis. Sinon, l'administration doit pourvoir à leur alimentation.

88. 1) Un prévenu doit être autorisé à porter ses vêtements personnels si ceux-ci sont propres et convenables.

29 S'il porte l'uniforme de l'établissement, celui-ci doit être différent de l'uniforme des condamnés.

89. La possibilité doit toujours être donnée au prévenu de travailler, mais il ne peut y être obligé. S'il travaille, il doit être rémunéré.

90. Tout prévenu doit être autorisé à se procurer, à ses frais ou aux frais de tiers, des livres, des journaux, le matériel nécessaire pour écrire, ainsi que d'autres moyens d'occupation, dans les limites compatibles avec l'intérêt de l'administration de la justice et avec la sécurité et le bon ordre de l'établissement.

91. Un prévenu doit être autorisé à recevoir la visite et les soins de son propre médecin ou dentiste si sa demande est raisonnablement fondée et s'il est capable d'en assurer la dépense.

92. Un prévenu doit immédiatement pouvoir informer sa famille de sa détention et se voir attribuer toutes les facilités raisonnables pour pouvoir communiquer avec celle-ci et ses amis et recevoir des visites de ces personnes, sous la seule réserve des restrictions et de la surveillance qui sont nécessaires dans l'intérêt de l'administration de la justice, de la sécurité et du bon ordre de l'établissement.

93. Un prévenu doit être autorisé à demander la désignation d'un avocat d'office, lorsque cette assistance est prévue, et à recevoir des visites de son avocat en vue de sa défense. Il doit pouvoir préparer et remettre à celui-ci des instructions confidentielles. A cet effet, on doit lui donner, s'il le désire, du matériel pour écrire. Les entrevues entre le prévenu et son avocat peuvent être à portée de la vue, mais ne peuvent pas être à la portée d'ouïe d'un fonctionnaire de la police ou de l'établissement.

D. -- Condamnés pour dettes et à la prison civile

94. Dans les pays où la législation prévoit l'emprisonnement pour dettes ou d'autres formes d'emprisonnement prononcées par décision judiciaire à la suite d'une procédure non pénale, ces détenus ne doivent pas être soumis à plus de restrictions ni être traités avec plus de sévérité qu'il n'est nécessaire pour assurer la sécurité et pour maintenir l'ordre. Leur traitement ne doit pas être moins favorable que celui des prévenus, sous réserve toutefois de l'obligation éventuelle de travailler.

E. -- Personnes arrêtées ou incarcérées sans avoir été inculpées

95. Sans préjudice des dispositions de l'article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, les personnes arrêtées ou incarcérées sans avoir été inculpées jouissent de la protection garantie par la première partie et par la section C de la deuxième partie. Les dispositions pertinentes de la section A de la deuxième partie sont également applicables lorsque leur application peut être profitable à cette catégorie spéciale de détenus, pourvu qu'il ne soit pris aucune mesure impliquant que des mesures de rééducation ou de réadaptation puissent être applicables en quoi que ce soit à des personnes qui ne sont convaincues d'aucune infraction.


Garanties pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort

Approuvées par le Conseil économique et social dans sa résolution 1984/50 du 25 mai 1984

 1. Dans les pays qui n'ont pas encore aboli la peine capitale, la peine de mort ne peut être imposée que pour les crimes les plus graves, étant entendu qu'il s'agira au moins de crimes intentionnels ayant des conséquences fatales ou d'autres conséquences extrêmement graves.

2. La peine capitale ne peut être imposée que pour un crime pour lequel la peine de mort était prescrite au moment où celui-ci a été commis, étant entendu que si, après que le crime a été commis, la loi prévoit l'imposition d'une peine moins grave, le criminel bénéficiera de cette disposition.

3. Les personnes âgées de moins de 18 ans au moment où elles commettent un crime ne sont pas condamnées à mort, et la sentence de mort ne sera pas exécutée dans le cas d'une femme enceinte, de la mère d'un jeune enfant ou de personnes frappées d'aliénation mentale.

4. La peine capitale ne peut être exécutée que lorsque la culpabilité de la personne accusée d'un crime repose sur des preuves claires et convaincantes ne laissant place à aucune autre interprétation des faits.

5. La peine capitale ne peut être exécutée qu'en vertu d'un jugement final rendu par un tribunal compétent après une procédure juridique offrant toutes les garanties possibles pour assurer un procès équitable, garanties égales au moins à celles énoncées à l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, y compris le droit de toute personne suspectée ou accusée d'un crime passible de la peine de mort de bénéficier d'une assistance judiciaire appropriée à tous les stades de la procédure.

6. Toute personne condamnée à mort a le droit de faire appel à une juridiction supérieure, et des mesures devraient être prises pour que ces appels soient obligatoires.

7. Toute personne condamnée à mort a le droit de se pourvoir en grâce ou de présenter une pétition en commutation de peine; la grâce ou la commutation de peine peut être accordée dans tous les cas de condamnation à mort.

8. La peine capitale ne sera pas exécutée pendant une procédure d'appel ou toute autre procédure de recours ou autre pourvoi en vue d'obtenir une grâce ou une commutation de peine.

9. Lorsque la peine capitale est appliquée, elle est exécutée de manière à causer le minimum de souffrances possibles.


Principes d'éthique médicale applicables au rôle du personnel de santé, en particulier des médecins, dans la protection des prisonniers et des détenus contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Adoptés par l'Assemblée générale des Nations Unies le 18 décembre 1982 (résolution 37/194)

Principe premier

Les membres du personnel de santé, en particulier les médecins, chargés de dispenser des soins médicaux aux prisonniers et aux détenus sont tenus d'assurer la protection de leur santé physique et mentale et, en cas de maladie, de leur dispenser un traitement de la même qualité et répondant aux mêmes normes que celui dont bénéficient les personnes qui ne sont pas emprisonnées ou détenues.

Principe 2

Il y a violation flagrante de l'éthique médicale et délit au regard des instruments internationaux applicables si des membres du personnel de santé, en particulier des médecins, se livrent, activement ou passivement, à des actes par lesquels ils se rendent coauteurs, complices ou instigateurs de tortures et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants ou qui constituent une tentative de perpétration1.

Principe 3

Il y a violation de l'éthique médicale si les membres du personnel de santé, en particulier des médecins, ont avec des prisonniers ou des détenus des relations d'ordre professionnel qui n'ont pas uniquement pour objet d'évaluer, de protéger ou d'améliorer leur santé physique et mentale.

Principe 4

Il y a violation de l'éthique médicale si des membres du personnel de santé en particulier des médecins:

a) Font usage de leurs connaissances et de leurs compétences pour aider à soumettre des prisonniers ou détenus à un interrogatoire qui risque d'avoir des effets néfastes sur la santé physique ou mentale ou sur l'état physique ou mental desdits prisonniers ou détenus et qui n'est pas conforme aux instruments internationaux pertinents2.

b) Certifient, ou contribuent à ce qu'il soit certifié, que des prisonniers ou des détenus sont aptes à subir une forme quelconque de traitement ou de châtiment qui peut avoir des effets néfastes sur leur santé physique ou mentale et qui n'est pas conforme aux instruments internationaux pertinents, ou participent, de quelque manière que ce soit, à un tel traitement ou châtiment non conforme aux instruments internationaux pertinents.

Principe 5

Il y a violation de l'éthique médicale si des membres du personnel de santé, en particulier des médecins, participent, de quelque manière que ce soit, à la contention de prisonniers ou de détenus, à moins que celle-ci ne soit jugée, sur la base de critères purement médicaux, nécessaire pour la protection de la santé physique ou mentale ou pour la sécurité du prisonnier ou du détenu lui-même, des autres prisonniers ou détenus, ou de ses gardiens et ne présente aucun danger pour sa santé physique et mentale.

Principe 6

Il ne peut être dérogé aux principes susmentionnés sous aucun prétexte, même pour des raisons d'ordre public.

__________

1 Voir la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants [résolution 3452 (XXX), annexe].

2 En particulier, la Déclaration universelle des droits de l'homme [résolution 217 A (III)], les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme [résolution 2200 A (XXI), annexe], la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants [résolution 3452 (XXX), annexe] et l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus [Premier Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants: rapport présenté par le Secrétariat (publication des Nations Unies, numéro de vente: F.1956.IV.4), annexe I.A].


Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus

Adoptés par l'Assemblée générale dans sa résolution 45/111 du 14 décembre 1990

1. Tous les détenus sont traités avec le respect dû à la dignité et à la valeur inhérentes à l'être humain.

2. Il ne sera fait aucune distinction fondée sur des raisons de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou autre, d'origine nationale ou sociale, de richesse, de naissance ou de situation.

3. Il est toutefois souhaitable de respecter les convictions religieuses et préceptes culturels du groupe auquel appartiennent les détenus, dans tous les cas où les conditions locales l'exigent.

4. Les prisons s'acquittent de leurs responsabilités en ce qui concerne la garde des détenus et la protection de la société contre la criminalité, conformément aux autres objectifs sociaux d'un Etat et aux responsabilités fondamentales qui lui incombent pour promouvoir le bien-être et l'épanouissement de tous les membres de la société.

5. Sauf pour ce qui est des limitations qui sont évidemment rendues nécessaires par leur incarcération, tous les détenus doivent continuer à jouir des droits de l'homme et des libertés fondamentales énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et, lorsque l'Etat concerné y est partie, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Protocole facultatif qui l'accompagne, ainsi que de tous les autres droits énoncés dans d'autres pactes des Nations Unies.

6. Tous les détenus ont le droit de participer à des activités culturelles et de bénéficier d'un enseignement visant au plein épanouissement de la personnalité humaine.

7. Des efforts tendant à l'abolition du régime cellulaire ou à la restriction du recours à cette peine doivent être entrepris et encouragés.

8. Il faut réunir les conditions qui permettent aux détenus de prendre un emploi utile et rémunéré, lequel facilitera leur réintégration sur le marché du travail du pays et leur permettra de contribuer à subvenir à leurs propres besoins financiers et à ceux de leur famille.

9. Les détenus ont accès aux services de santé existant dans le pays, sans discrimination aucune du fait de leur statut juridique.

10. Avec la participation et l'aide de la collectivité et des institutions sociales et en tenant dûment compte des intérêts des victimes, il faut instaurer un climat favorable à la réinsertion de l'ancien détenu dans la société dans les meilleures conditions possibles.

11. Les Principes ci-dessus sont appliqués de manière impartiale.


Liberté d’association

Convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical
Convention (No 87) concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical

Adoptée par la Conférence générale de l'Organisation internationale du Travail à sa trente et unième session, le 9 juillet 1948
Entrée en vigueur : le 4 juillet 1950, conformément aux dispositions de l'article 15

La Conférence générale de l'Organisation internationale du Travail,

Convoquée à San Francisco par le Conseil d'administration du Bureau international du Travail, et s'y étant réunie le 17 juin 1948, en sa trente et unième session,

Après avoir décidé d'adopter sous forme d'une convention diverses propositions relatives à la liberté syndicale et à la protection du droit syndical, question qui constitue le septième point à l'ordre du jour de la session,

Considérant que le Préambule de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail énonce, parmi les moyens susceptibles d'améliorer la condition des travailleurs et d'assurer la paix, "l'affirmation du principe de la liberté syndicale",

Considérant que la Déclaration de Philadelphie a proclamé de nouveau que "la liberté d'expression et d'association est une condition indispensable d'un progrès soutenu",

Considérant que la Conférence internationale du Travail, à sa trentième session, a adopté à l'unanimité les principes qui doivent être à la base de la réglementation internationale,

Considérant que l'Assemblée générale des Nations Unies, à sa deuxième session, a fait siens ces principes et a invité l'Organisation internationale du Travail à poursuivre tous ses efforts afin qu'il soit possible d'adopter une ou plusieurs conventions internationales,

Adopte, ce neuvième jour de juillet mil neuf cent quarante-huit, la convention ci-après, qui sera dénommée Convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 :

Partie I -- Liberté syndicale

Article premier

Tout Membre de l'Organisation internationale du Travail pour lequel la présente Convention est en vigueur s'engage à donner effet aux dispositions suivantes.

Article 2

Les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières.

Article 3

1. Les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit d'élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d'action.

2. Les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal.

Article 4

Les organisations de travailleurs et d'employeurs ne sont pas sujettes à dissolution ou à suspension par voie administrative.

Article 5

Les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit de constituer des fédérations et des confédérations ainsi que celui de s'y affilier, et toute organisation, fédération ou confédération a le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs et d'employeurs.

Article 6

Les dispositions des articles 2, 3 et 4 ci-dessus s'appliquent aux fédérations et aux confédérations des organisations de travailleurs et d'employeurs.

Article 7

L'acquisition de la personnalité juridique par les organisations de travailleurs et d'employeurs, leurs fédérations et confédérations, ne peut pas être subordonnée à des conditions de nature à mettre en cause l'application des dispositions des articles 2, 3 et 4 ci-dessus.

Article 8

1. Dans l'exercice des droits qui leur sont reconnus par la présente Convention, les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives sont tenus, à l'instar des autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la légalité.

2. La législation nationale ne devra porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la présente Convention.

Article 9

1. La mesure dans laquelle les garanties prévues par la présente Convention s'appliqueront aux forces armées et à la police sera déterminée par la législation nationale.

2. Conformément aux principes établis par le paragraphe 8 de l'article 19 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, la ratification de cette Convention par un Membre ne devra pas être considérée comme affectant toute loi, toute sentence, toute coutume ou tout accord déjà existants qui accordent aux membres des forces armées et de la police des garanties prévues par la présente Convention.

Article 10

Dans la présente Convention, le terme "organisation" signifie toute organisation de travailleurs ou d'employeurs ayant pour but de promouvoir et de défendre les intérêts des travailleurs ou des employeurs.

Partie II -- Protection du droit syndical

Article 11

Tout Membre de l'Organisation internationale du Travail pour lequel la présente Convention est en vigueur s'engage à prendre toutes mesures nécessaires et appropriées en vue d'assurer aux travailleurs et aux employeurs le libre exercice du droit syndical.

Partie III -- Mesures diverses

Article 12

1. En ce qui concerne les territoires mentionnés par l'article 35 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail telle qu'elle a été amendée par l'Instrument d'amendement à la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, 1946, à l'exclusion des territoires visés par les paragraphes 4 et 5 dudit article ainsi amendé, tout Membre de l'Organisation qui ratifie la présente Convention doit communiquer au Directeur général du Bureau international du Travail, en même temps que sa ratification, ou dans le plus bref délai possible après sa ratification, une déclaration faisant connaître :

a) Les territoires pour lesquels il s'engage à ce que les dispositions de la Convention soient appliquées sans modification;

b) Les territoires pour lesquels il s'engage à ce que les dispositions de la Convention soient appliquées avec des modifications, et en quoi consistent lesdites modifications;

c) Les territoires auxquels la Convention est inapplicable et, dans ces cas, les raisons pour lesquelles elle est inapplicable;

d) Les territoires pour lesquels il réserve sa décision.

2. Les engagements mentionnés aux alinéas a et b du premier paragraphe du présent article seront réputés parties intégrantes de la ratification et porteront des effets identiques.

3. Tout Membre pourra renoncer par une nouvelle déclaration à tout ou partie des réserves contenues dans sa déclaration antérieure en vertu des alinéas b, c et d du paragraphe 1 du présent article.

4. Tout Membre pourra, pendant les périodes au cours desquelles la présente Convention peut être dénoncée conformément aux dispositions de l'article 16, communiquer au Directeur général une nouvelle déclaration modifiant à tout autre égard les termes de toute déclaration antérieure et faisant connaître la situation dans les territoires déterminés.

Article 13

1. Lorsque les questions traitées par la présente Convention entrent dans le cadre de la compétence propre des autorités d'un territoire non métropolitain, le Membre responsable des relations internationales de ce territoire, en accord avec le gouvernement dudit territoire, pourra communiquer au Directeur général du Bureau international du Travail une déclaration d'acceptation, au nom de ce territoire, des obligations de la présente Convention.

2. Une déclaration d'acceptation des obligations de la présente Convention peut être communiquée au Directeur général du Bureau international du Travail :

a) Par deux ou plusieurs Membres de l'Organisation pour un territoire placé sous leur autorité conjointe;

b) Par tout autorité internationale responsable de l'administration d'un territoire en vertu des dispositions de la Charte des Nations Unies ou de toute autre disposition en vigueur, à l'égard de ce territoire.

3. Les déclarations communiquées au Directeur général du Bureau international du Travail conformément aux dispositions des paragraphes précédents du présent article doivent indiquer si les dispositions de la Convention seront appliquées dans le territoire avec ou sans modification; lorsque la déclaration indique que les dispositions de la Convention s'appliquent sous réserve de modifications, elle doit spécifier en quoi consistent lesdites modifications.

4. Le Membre ou les Membres ou l'autorité internationale intéressés pourront renoncer entièrement ou partiellement par une déclaration ultérieure au droit d'invoquer une modification indiquée dans une déclaration antérieure.

5. Le Membre ou les Membres ou l'autorité internationale intéressés pourront, pendant les périodes au cours desquelles la Convention peut être dénoncée conformément aux dispositions de l'article 16, communiquer au Directeur général du Bureau international du Travail une nouvelle déclaration modifiant à tout autre égard les termes de toute déclaration antérieure et faisant connaître la situation en ce qui concerne l'application de cette Convention.

Partie IV -- Dispositions finales

Article 14

Les ratifications formelles de la présente Convention seront communiquées au Directeur général du Bureau international du Travail et par lui enregistrées.

Article 15

1. La présente Convention ne liera que les Membres de l'Organisation internationale du Travail dont la ratification aura été enregistrée par le Directeur général.

2. Elle entrera en vigueur douze mois après que les ratifications de deux Membres auront été enregistrées par le Directeur général.

3. Par la suite, cette Convention entrera en vigueur pour chaque Membre douze mois après la date où sa ratification aura été enregistrée.

Article 16

1. Tout Membre ayant ratifié la présente Convention peut la dénoncer à l'expiration d'une période de dix années après la date de la mise en vigueur initiale de la Convention, par un acte communiqué au Directeur général du Bureau international du Travail et par lui enregistré. La dénonciation ne prendra effet qu'une année après avoir été enregistrée.

2. Tout Membre ayant ratifié la présente Convention qui, dans le délai d'une année après l'expiration de la période de dix années mentionnée au paragraphe précédent, ne fera pas usage de la faculté de dénonciation prévue par le présent article sera lié pour un nouvelle période de dix années et, par la suite, pourra dénoncer la présente Convention à l'expiration de chaque période de dix années dans les conditions prévues au présent article.

Article 17

1. Le Directeur général du Bureau international du Travail notifiera à tous les Membres de l'Organisation internationale du Travail l'enregistrement de toutes les ratifications, déclarations et dénonciations qui lui seront communiquées par les Membres de l'Organisation.

2. En notifiant aux Membres de l'Organisation l'enregistrement de la deuxième ratification qui lui aura été communiquée, le Directeur général appellera l'attention des Membres de l'Organisation sur la date à laquelle la présente Convention entrera en vigueur.

Article 18

Le Directeur général du Bureau international du Travail communiquera au Secrétaire général des Nations Unies aux fins d'enregistrement, conformément à l'Article 102 de la Charte des Nations Unies, des renseignements complets au sujet de toutes ratifications, de toutes déclarations et de tous actes de dénonciation qu'il aura enregistrés conformément aux articles précédents.

Article 19

A l'expiration de chaque période de dix années à compter de l'entrée en vigueur de la présente Convention, le Conseil d'administration du Bureau international du Travail devra présenter à la Conférence générale un rapport sur l'application de la présente Convention et décidera s'il y a lieu d'inscrire à l'ordre du jour de la Conférence la question de sa révision totale ou partielle.

Article 20

1. Au cas où la Conférence adopterait une nouvelle convention portant révision totale ou partielle de la présente Convention, et à moins que la nouvelle convention ne dispose autrement :

a) La ratification par un Membre de la nouvelle convention portant révision entraînerait de plein droit, nonobstant l'article 16 ci-dessus, dénonciation immédiate de la présente Convention, sous réserve que la nouvelle convention portant révision soit entrée en vigueur;

b) A partir de la date de l'entrée en vigueur de la nouvelle convention portant révision, la présente Convention cesserait d'être ouverte à la ratification des Membres.

2. La présente Convention demeurerait en tout cas en vigueur dans sa forme et sa teneur pour les Membres qui l'auraient ratifiée et qui ne ratifieraient pas la convention portant révision.

Article 21

Les versions française et anglaise du texte de la présente Convention font également foi.

Le texte qui précède est le texte authentique de la Convention dûment adoptée par la Conférence générale de l'Organisation internationale du Travail dans sa trente et unième session qui s'est tenue à San Francisco et qui a été déclarée close le dix juillet 1948.

En foi de quoi ont apposé leurs signatures, ce trente et unième jour d'août 1948.


Documents du Conseil de l’Europe

  Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales

Rome, 4.XI.1950

"Le texte de la Convention avait été amendé conformément aux dispositions du Protocole n° 3 (STE n° 45), entré en vigueur le 21 septembre 1970, du Protocole n° 5 (STE n° 55), entré en vigueur le 20 décembre 1971 et du Protocole n° 8 (STE n° 118), entré en vigueur le 1er janvier 1990, et comprenait en outre le texte du Protocole n° 2 (STE n° 44) qui, conformément à son article 5, paragraphe 3, avait fait partie intégrante de la Convention depuis son entrée en vigueur le 21 septembre 1970. Toutes les dispositions qui avaient été amendées ou ajoutées par ces Protocoles sont remplacées par le Protocole n° 11 (STE n° 155), à compter de la date de son entrée en vigueur le 1er novembre 1998. A compter de cette date, le Protocole n° 9 (STE n° 140), entré en vigueur le 1er octobre 1994, est abrogé et le Protocole n° 10 (STE n° 146), qui n’est pas entré en vigueur, est devenu sans objet."

Les gouvernements signataires, membres du Conseil de l'Europe,

Considérant la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, proclamée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1948;

Considérant que cette déclaration tend à assurer la reconnaissance et l'application universelles et effectives des droits qui y sont énoncés;

Considérant que le but du Conseil de l'Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses membres, et que l'un des moyens d'atteindre ce but est la sauvegarde et le développement des droits de l'homme et des libertés fondamentales;

Réaffirmant leur profond attachement à ces libertés fondamentales qui constituent les assises mêmes de la justice et de la paix dans le monde et dont le maintien repose essentiellement sur un régime politique véritablement démocratique, d'une part, et, d'autre part, sur une conception commune et un commun respect des droits de l'homme dont ils se réclament;

Résolus, en tant que gouvernements d'Etats européens animés d'un même esprit et possédant un patrimoine commun d'idéal et de traditions politiques, de respect de la liberté et de prééminence du droit, à prendre les premières mesures propres à assurer la garantie collective de certains des droits énoncés dans la Déclaration universelle,

Sont convenus de ce qui suit :

Article 1 – Obligation de respecter les droits de l'homme

Les Hautes Parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente Convention :

Titre I – Droits et libertés

Article 2 – Droit à la vie

1 Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi.

2 La mort n'est pas considérée comme infligée en violation de cet article dans les cas où elle résulterait d'un recours à la force rendu absolument nécessaire:

a pour assurer la défense de toute personne contre la violence illégale;

b pour effectuer une arrestation régulière ou pour empêcher l'évasion d'une personne régulièrement détenue;

c pour réprimer, conformément à la loi, une émeute ou une insurrection.

Article 3– Interdiction de la torture

Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

Article 4 – Interdiction de l'esclavage et du travail forcé

1 Nul ne peut être tenu en esclavage ni en servitude.

2 Nul ne peut être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire.

3 N'est pas considéré comme "travail forcé ou obligatoire" au sens du présent article :

a tout travail requis normalement d'une personne soumise à la détention dans les conditions prévues par l'article 5 de la présente Convention, ou durant sa mise en liberté conditionnelle;

b tout service de caractère militaire ou, dans le cas d'objecteurs de conscience dans les pays où l'objection de conscience est reconnue comme légitime, à un autre service à la place du service militaire obligatoire;

c tout service requis dans le cas de crises ou de calamités qui menacent la vie ou le bien-être de la communauté;

d tout travail ou service formant partie des obligations civiques normales.

Article 5 – Droit à la liberté et à la sûreté

1 Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales :

a s'il est détenu régulièrement après condamnation par un tribunal compétent;

b s'il a fait l'objet d'une arrestation ou d'une détention régulières pour insoumission à une ordonnance rendue, conformément à la loi, par un tribunal ou en vue de garantir l'exécution d'une obligation prescrite par la loi;

c s'il a été arrêté et détenu en vue d'être conduit devant l'autorité judiciaire compétente, lorsqu'il y a des raisons plausibles de soupçonner qu'il a commis une infraction ou qu'il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de l'empêcher de commettre une infraction ou de s'enfuir après l'accomplissement de celle-ci;

d s'il s'agit de la détention régulière d'un mineur, décidée pour son éducation surveillée ou de sa détention régulière, afin de le traduire devant l'autorité compétente;

e s'il s'agit de la détention régulière d'une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d'un aliéné, d'un alcoolique, d'un toxicomane ou d'un vagabond;

f s'il s'agit de l'arrestation ou de la détention régulières d'une personne pour l'empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d'expulsion ou d'extradition est en cours.

2 Toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu'elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle.

3 Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure. La mise en liberté peut être subordonnée à une garantie assurant la comparution de l'intéressé à l'audience.

4 Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale.

5 Toute personne victime d'une arrestation ou d'une détention dans des conditions contraires aux dispositions de cet article a droit à réparation.

Article 6– Droit à un procès équitable

1 Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.

2 Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

3 Tout accusé a droit notamment à :

a être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui;

b disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense;

c se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix et, s'il n'a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d'office, lorsque les intérêts de la justice l'exigent;

d interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge;

e se faire assister gratuitement d'un interprète, s'il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience.

Article 7– Pas de peine sans loi

1 Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d'après le droit national ou international. De même il n'est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise.

2 Le présent article ne portera pas atteinte au jugement et à la punition d'une personne coupable d'une action ou d'une omission qui, au moment où elle a été commise, était criminelle d'après les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées.

Article 8 – Droit au respect de la vie privée et familiale

1 Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

Article 9 – Liberté de pensée, de conscience et de religion

1 Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites.

2 La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

Article 10 – Liberté d'expression

1 Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations.

2 L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.

Article 11– Liberté de réunion et d'association

1 Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, y compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts.

2 L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Le présent article n'interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l'exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l'administration de l'Etat.

Article 12 – Droit au mariage

A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l'exercice de ce droit.

Article 13 – Droit à un recours effectif

Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles.

Article 14 – Interdiction de discrimination

La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.

Article 15 – Dérogation en cas d'état d'urgence

1 En cas de guerre ou en cas d'autre danger public menaçant la vie de la nation, toute Haute Partie contractante peut prendre des mesures dérogeant aux obligations prévues par la présente Convention, dans la stricte mesure où la situation l'exige et à la condition que ces mesures ne soient pas en contradiction avec les autres obligations découlant du droit international.

2 La disposition précédente n'autorise aucune dérogation à l'article 2, sauf pour le cas de décès résultant d'actes licites de guerre, et aux articles 3, 4 (paragraphe 1) et 7.

3 Toute Haute Partie contractante qui exerce ce droit de dérogation tient le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe pleinement informé des mesures prises et des motifs qui les ont inspirées. Elle doit également informer le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe de la date à laquelle ces mesures ont cessé d'être en vigueur et les dispositions de la Convention reçoivent de nouveau pleine application.

Article 17– Interdiction de l'abus de droit

Aucune des dispositions de la présente Convention ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnus dans la présente Convention ou à des limitations plus amples de ces droits et libertés que celles prévues à ladite Convention.

Article 18 – Limitation de l'usage des restrictions aux droits

Les restrictions qui, aux termes de la présente Convention, sont apportées auxdits droits et libertés ne peuvent être appliquées que dans le but pour lequel elles ont été prévues.

Titre II – Cour européenne des Droits de l'Homme

Article 19 – Institution de la Cour

Afin d'assurer le respect des engagements résultant pour les Hautes Parties contractantes de la présente Convention et de ses protocoles, il est institué une Cour européenne des Droits de l'Homme, ci-dessous nommée "la Cour". Elle fonctionne de façon permanente.

Article 20 – Nombre de juges

La Cour se compose d'un nombre de juges égal à celui des Hautes Parties contractantes.

Article 21 – Conditions d'exercice des fonctions

1 Les juges doivent jouir de la plus haute considération morale et réunir les conditions requises pour l'exercice de hautes fonctions judiciaires ou être des jurisconsultes possédant une compétence notoire.

2 Les juges siègent à la Cour à titre individuel.

3 Pendant la durée de leur mandat, les juges ne peuvent exercer aucune activité incompatible avec les exigences d'indépendance, d'impartialité ou de disponibilité requise par une activité exercée à plein temps; toute question soulevée en application de ce paragraphe est tranchée par la Cour.

Article 22 – Election des juges

1 Les juges sont élus par l'Assemblée parlementaire au titre de chaque Haute Partie contractante, à la majorité des voix exprimées, sur une liste de trois candidats présentés par la Haute Partie contractante.

2 La même procédure est suivie pour compléter la Cour en cas d'adhésion de nouvelles Hautes Parties contractantes et pourvoir les sièges devenus vacants.

Article 23 – Durée du mandat

1 Les juges sont élus pour une durée de six ans. Ils sont rééligibles. Toutefois, les mandats d'une moitié des juges désignés lors de la première élection prendront fin au bout de trois ans.

2 Les juges dont le mandat prendra fin au terme de la période initiale de trois ans sont désignés par tirage au sort effectué par le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, immédiatement après leur élection.

3 Afin d'assurer, dans la mesure du possible, le renouvellement des mandats d'une moitié des juges tous les trois ans, l'Assemblée parlementaire peut, avant de procéder à toute élection ultérieure, décider qu'un ou plusieurs mandats des juges à élire auront une durée autre que celle de six ans, sans qu'elle puisse toutefois excéder neuf ans ou être inférieure à trois ans.

4 Dans le cas où il y a lieu de conférer plusieurs mandats et où l'Assemblée parlementaire fait application du paragraphe précédent, la répartition des mandats s'opère suivant un tirage au sort effectué par le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe immédiatement après l'élection.

5 Le juge élu en remplacement d'un juge dont le mandat n'est pas expiré achève le mandat de son prédécesseur.

6 Le mandat des juges s'achève dès qu'ils atteignent l'âge de 70 ans.

7 Les juges restent en fonctions jusqu'à leur remplacement. Ils continuent toutefois de connaître des affaires dont ils sont déjà saisis.

Article 24 – Révocation

Un juge ne peut être relevé de ses fonctions que si les autres juges décident, à la majorité des deux tiers, qu'il a cessé de répondre aux conditions requises.

Article 25 – Greffe et référendaires

La Cour dispose d'un greffe dont les tâches et l'organisation sont fixées par le règlement de la Cour. Elle est assistée de référendaires.

Article 26 – Assemblée plénière de la Cour

La Cour réunie en Assemblée plénière

a élit, pour une durée de trois ans, son président et un ou deux vice-présidents; ils sont rééligibles;

b constitue des Chambres pour une période déterminée;

c élit les présidents des Chambres de la Cour, qui sont rééligibles;

d adopte le règlement de la Cour, et

e élit le greffier et un ou plusieurs greffiers adjoints.

Article 27 – Comités, Chambres et Grande chambre

1 Pour l'examen des affaires portées devant elle, la Cour siège en comités de trois juges, en Chambres de sept juges et en une Grande Chambre de dix-sept juges. Les Chambres de la Cour constituent les comités pour une période déterminée.

2 Le juge élu au titre d'un Etat Partie au litige est membre de droit de la Chambre et de la Grande Chambre; en cas d'absence de ce juge, ou lorsqu'il n'est pas en mesure de siéger, cet Etat partie désigne une personne qui siège en qualité de juge.

3 Font aussi partie de la Grande Chambre, le président de la Cour, les vice-présidents, les présidents des Chambres et d'autres juges désignés conformément au règlement de la Cour. Quand l'affaire est déférée à la Grande Chambre en vertu de l'article 43, aucun juge de la Chambre qui a rendu l'arrêt ne peut y siéger, à l'exception du président de la Chambre et du juge ayant siégé au titre de l'Etat partie intéressé.

Article 28 – Déclarations d'irrecevabilité par les comités

Un comité peut, par vote unanime, déclarer irrecevable ou rayer du rôle une requête individuelle introduite en vertu de l'article 34 lorsqu'une telle décision peut être prise sans examen complémentaire. La décision est définitive.

Article 29 – Décisions des Chambres sur la recevabilité et le fond

1 Si aucune décision n'a été prise en vertu de l'article 28, une Chambre se prononce sur la recevabilité et le fond des requêtes individuelles introduites en vertu de l'article 34.

2 Une Chambre se prononce sur la recevabilité et le fond des requêtes étatiques introduites en vertu de l'article 33.

3 Sauf décision contraire de la Cour dans des cas exceptionnels, la décision sur la recevabilité est prise séparément.

Article 30 – Dessaisissement en faveur de la Grande Chambre

Si l'affaire pendante devant une Chambre soulève une question grave relative à l'interprétation de la Convention ou de ses protocoles, ou si la solution d'une question peut conduire à une contradiction avec un arrêt rendu antérieurement par la Cour, la Chambre peut, tant qu'elle n'a pas rendu son arrêt, se dessaisir au profit de la Grande Chambre, à moins que l'une des parties ne s'y oppose.

Article 31 – Attributions de la Grande Chambre

La Grande Chambre

a se prononce sur les requêtes introduites en vertu de l'article 33 ou de l'article 34 lorsque l'affaire lui a été déférée par la Chambre en vertu de l'article 30 ou lorsque l'affaire lui a été déférée en vertu de l'article 43; et

b examine les demandes d'avis consultatifs introduites en vertu de l'article 47.

Article 32 – Compétence de la Cour

1 La compétence de la Cour s'étend à toutes les questions concernant l'interprétation et l'application de la Convention et de ses protocoles qui lui seront soumises dans les conditions prévues par les articles 33, 34 et 47.

2 En cas de contestation sur le point de savoir si la Cour est compétente, la Cour décide.

Article 33 – Affaires interétatiques

Toute Haute Partie contractante peut saisir la Cour de tout manquement aux dispositions de la Convention et de ses protocoles qu'elle croira pouvoir être imputé à une autre Haute Partie contractante.

Article 35 – Conditions de recevabilité

1 La Cour ne peut être saisie qu'après l'épuisement des voies de recours internes, tel qu'il est entendu selon les principes de droit international généralement reconnus, et dans un délai de six mois à partir de la date de la décision interne définitive.

2 La Cour ne retient aucune requête individuelle introduite en application de l'article 34, lorsque

a elle est anonyme; ou

b elle est essentiellement la même qu'une requête précédemment examinée par la Cour ou déjà soumise à une autre instance internationale d'enquête ou de règlement, et si elle ne contient pas de faits nouveaux.

3 La Cour déclare irrecevable toute requête individuelle introduite en application de l'article 34, lorsqu'elle estime la requête incompatible avec les dispositions de la Convention ou de ses protocoles, manifestement mal fondée ou abusive.

4 La Cour rejette toute requête qu'elle considère comme irrecevable par application du présent article. Elle peut procéder ainsi à tout stade de la procédure.

Article 36 – Tierce intervention

1 Dans toute affaire devant une Chambre ou la Grande Chambre, une Haute Partie contractante dont un ressortissant est requérant a le droit de présenter des observations écrites et de prendre part aux audiences.

2 Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le président de la Cour peut inviter toute Haute Partie contractante qui n'est pas partie à l'instance ou toute personne intéressée autre que le requérant à présenter des observations écrites ou à prendre part aux audiences.

Article 37 – Radiation

1 A tout moment de la procédure, la Cour peut décider de rayer une requête du rôle lorsque les circonstances permettent de conclure

a que le requérant n'entend plus la maintenir; ou

b que le litige a été résolu; ou

c que, pour tout autre motif dont la Cour constate l'existence, il ne se justifie plus de poursuivre l'examen de la requête.

Toutefois, la Cour poursuit l'examen de la requête si le respect des droits de l'homme garantis par la Convention et ses protocoles l'exige.

2 La Cour peut décider la réinscription au rôle d'une requête lorsqu'elle estime que les circonstances le justifient.

Article 38 – Examen contradictoire de l'affaire et procédure de règlement amiable

1 Si la Cour déclare une requête recevable, elle 

a poursuit l'examen contradictoire de l'affaire avec les représentants des parties et, s'il y a lieu, procède à une enquête pour la conduite efficace de laquelle les Etats intéressés fourniront toutes facilités nécessaires;

b se met à la disposition des intéressés en vue de parvenir à un règlement amiable de l'affaire s'inspirant du respect des droits de l'homme tels que les reconnaissent la Convention et ses protocoles.

2 La procédure décrite au paragraphe 1.b est confidentielle.

Article 39 – Conclusion d'un règlement amiable

En cas de règlement amiable, la Cour raye l'affaire du rôle par une décision qui se limite à un bref exposé des faits et de la solution adoptée.

Article 40 – Audience publique et accès aux documents

1 L'audience est publique à moins que la Cour n'en décide autrement en raison de circonstances exceptionnelles.

2 Les documents déposés au greffe sont accessibles au public à moins que le président de la Cour n'en décide autrement.

Article 41 – Satisfaction équitable

Si la Cour déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d'effacer qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable.

Article 42 – Arrêts des Chambres

Les arrêts des Chambres deviennent définitifs conformément aux dispositions de l'article 44, paragraphe 2.

Article 43 – Renvoi devant la Grande Chambre

1 Dans un délai de trois mois à compter de la date de l'arrêt d'une Chambre, toute partie à l'affaire peut, dans des cas exceptionnels, demander le renvoi de l'affaire devant la Grande Chambre.

2 Un collège de cinq juges de la Grande Chambre accepte la demande si l'affaire soulève une question grave relative à l'interprétation ou à l'application de la Convention ou de ses protocoles, ou encore une question grave de caractère général.

3 Si le collège accepte la demande, la Grande Chambre se prononce sur l'affaire par un arrêt.

Article 44 – Arrêts définitifs

1 L'arrêt de la Grande Chambre est définitif.

2 L'arrêt d'une Chambre devient définitif

a lorsque les parties déclarent qu'elles ne demanderont pas le renvoi de l'affaire devant la Grande Chambre; ou

b trois mois après la date de l'arrêt, si le renvoi de l'affaire devant la Grande Chambre n'a pas été demandé; ou

c lorsque le collège de la Grande Chambre rejette la demande de renvoi formulée en application de l'article 43.

3 L'arrêt définitif est publié.

Article 45 – Motivation des arrêts et décisions

1 Les arrêts, ainsi que les décisions déclarant des requêtes recevables ou irrecevables, sont motivés.

2 Si l'arrêt n'exprime pas en tout ou en partie l'opinion unanime des juges, tout juge a le droit d'y joindre l'exposé de son opinion séparée.

Article 46 – Force obligatoire et exécution des arrêts

1 Les Hautes Parties contractantes s'engagent à se conformer aux arrêts définitifs de la Cour dans les litiges auxquels elles sont parties.

2 L'arrêt définitif de la Cour est transmis au Comité des Ministres qui en surveille l'exécution.

Article 47 – Avis consultatifs

1 La Cour peut, à la demande du Comité des Ministres, donner des avis consultatifs sur des questions juridiques concernant l'interprétation de la Convention et de ses protocoles.

2 Ces avis ne peuvent porter ni sur les questions ayant trait au contenu ou à l'étendue des droits et libertés définis au titre I de la Convention et dans les protocoles ni sur les autres questions dont la Cour ou le Comité des Ministres pourraient avoir à connaître par suite de l'introduction d'un recours prévu par la Convention.

3 La décision du Comité des Ministres de demander un avis à la Cour est prise par un vote à la majorité des représentants ayant le droit de siéger au Comité.

Article 48 – Compétence consultative de la Cour

La Cour décide si la demande d'avis consultatif présentée par le Comité des Ministres relève de sa compétence telle que définie par l'article 47.

Article 49 – Motivation des avis consultatifs

1 L'avis de la Cour est motivé.

2 Si l'avis n'exprime pas en tout ou en partie l'opinion unanime des juges, tout juge a le droit d'y joindre l'exposé de son opinion séparée.

3 L'avis de la Cour est transmis au Comité des Ministres.

Article 50 – Frais de fonctionnement de la Cour

Les frais de fonctionnement de la Cour sont à la charge du Conseil de l'Europe.

Article 51 – Privilèges et immunités des juges

Les juges jouissent, pendant l'exercice de leurs fonctions, des privilèges et immunités prévus à l'article 40 du Statut du Conseil de l'Europe et dans les accords conclus au titre de cet article.

Titre III – Dispositions diverses

Article 52 – Enquêtes du Secrétaire Général

Toute Haute Partie contractante fournira sur demande du Secrétaire Général du Conseil de l'Europe les explications requises sur la manière dont son droit interne assure l'application effective de toutes les dispositions de cette Convention.

Article 53 – Sauvegarde des droits de l'homme reconnus

Aucune des dispositions de la présente Convention ne sera interprétée comme limitant ou portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales qui pourraient être reconnus conformément aux lois de toute Partie contractante ou à toute autre Convention à laquelle cette Partie contractante est partie.

Article 54 – Pouvoirs du Comité des Ministres

Aucune disposition de la présente Convention ne porte atteinte aux pouvoirs conférés au Comité des Ministres par le Statut du Conseil de l'Europe.

Article 55 – Renonciation à d'autres modes de règlement des différends

Les Hautes Parties contractantes renoncent réciproquement, sauf compromis spécial, à se prévaloir des traités, conventions ou déclarations existant entre elles, en vue de soumettre, par voie de requête, un différend né de l'interprétation ou de l'application de la présente Convention à un mode de règlement autre que ceux prévus par ladite Convention.

Article 56– Application territoriale

1 Tout Etat peut, au moment de la ratification ou à tout autre moment par la suite, déclarer, par notification adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, que la présente Convention s'appliquera, sous réserve du paragraphe 4 du présent article, à tous les territoires ou à l'un quelconque des territoires dont il assure les relations internationales.

2 La Convention s'appliquera au territoire ou aux territoires désignés dans la notification à partir du trentième jour qui suivra la date à laquelle le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe aura reçu cette notification.

3 Dans lesdits territoires les dispositions de la présente Convention seront appliquées en tenant compte des nécessités locales.

4 Tout Etat qui a fait une déclaration conformément au premier paragraphe de cet article, peut, à tout moment par la suite, déclarer relativement à un ou plusieurs des territoires visés dans cette déclaration qu'il accepte la compétence de la Cour pour connaître des requêtes de personnes physiques, d'organisations non gouvernementales ou de groupes de particuliers, comme le prévoit l'article 34 de la Convention.

Article 57 – Réserves

1 Tout Etat peut, au moment de la signature de la présente Convention ou du dépôt de son instrument de ratification, formuler une réserve au sujet d'une disposition particulière de la Convention, dans la mesure où une loi alors en vigueur sur son territoire n'est pas conforme à cette disposition. Les réserves de caractère général ne sont pas autorisées aux termes du présent article.

2 Toute réserve émise conformément au présent article comporte un bref exposé de la loi en cause.

Article 58 – Dénonciation

1 Une Haute Partie contractante ne peut dénoncer la présente Convention qu'après l'expiration d'un délai de cinq ans à partir de la date d'entrée en vigueur de la Convention à son égard et moyennant un préavis de six mois, donné par une notification adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, qui en informe les autres Parties contractantes.

2 Cette dénonciation ne peut avoir pour effet de délier la Haute Partie contractante intéressée des obligations contenues dans la présente Convention en ce qui concerne tout fait qui, pouvant constituer une violation de ces obligations, aurait été accompli par elle antérieurement à la date à laquelle la dénonciation produit effet.

3 Sous la même réserve cesserait d'être Partie à la présente Convention toute Partie contractante qui cesserait d'être membre du Conseil de l'Europe.

4 La Convention peut être dénoncée conformément aux dispositions des paragraphes précédents en ce qui concerne tout territoire auquel elle a été déclarée applicable aux termes de l'article 56.

Article 59 – Signature et ratification

1 La présente Convention est ouverte à la signature des membres du Conseil de l'Europe. Elle sera ratifiée. Les ratifications seront déposées près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

2 La présente Convention entrera en vigueur après le dépôt de dix instruments de ratification.

3 Pour tout signataire qui la ratifiera ultérieurement, la Convention entrera en vigueur dès le dépôt de l'instrument de ratification.

4 Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera à tous les membres du Conseil de l'Europe l'entrée en vigueur de la Convention, les noms des Hautes Parties contractantes qui l'auront ratifiée, ainsi que le dépôt de tout instrument de ratification intervenu ultérieurement.

Fait à Rome, le 4 novembre 1950, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera des copies certifiées conformes à tous les signataires.


Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants

Strasbourg, 26.XI.1987

Les Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires de la présente Convention,

Vu les dispositions de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales;

Rappelant qu'aux termes de l'article 3 de la même Convention, "nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants";

Constatant que les personnes qui se prétendent victimes de violations de l'article 3 peuvent se prévaloir du mécanisme prévu par cette Convention;

Convaincus que la protection des personnes privées de liberté contre la torture et les peines ou traitements inhumains ou dégradants pourrait être renforcée par un mécanisme non judiciaire, à caractère préventif, fondé sur des visites.

Sont convenus de ce qui suit:

Chapitre I

Article 1er

Il est institué un Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (ci-après dénommé: "le Comité"). Par le moyen de visites, le Comité examine le traitement des personnes privées de liberté en vue de renforcer, le cas échéant, leur protection contre la torture et les peines ou traitements inhumains ou dégradants.

Article 2

Chaque Partie autorise la visite, conformément à la présente Convention, de tout lieu relevant de sa juridiction où des personnes sont privées de liberté par une autorité publique.

Article 3

Le Comité et les autorités nationales compétentes de la Partie concernée coopèrent en vue de l'application de la présente Convention.

Chapitre II

Article 4

1. Le Comité se compose d'un nombre de membres égal à celui des Parties.

2. Les membres du Comité sont choisis parmi des personnalités de haute moralité, connues pour leur compétence en matière de droits de l'homme ou ayant une expérience professionnelle dans les domaines dont traite la présente Convention.

3. Le Comité ne peut comprendre plus d'un national du même Etat.

4. Les membres siègent à titre individuel, sont indépendants et impartiaux dans l'exercice de leurs mandats et se rendent disponibles pour remplir leurs fonctions de manière effective.

Article 5

1. Les membres du Comité sont élus par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe à la majorité absolue des voix, sur une liste de noms dressée par le Bureau de l'Assemblée Consultative du Conseil de l'Europe; la délégation nationale à l'Assemblée Consultative de chaque Partie présente trois candidats dont deux au moins sont de sa nationalité.

2. La même procédure est suivie pour pourvoir les sièges devenus vacants.

3. Les membres du Comité sont élus pour une durée de quatre ans. Ils ne sont rééligibles qu'une fois. Toutefois, en ce qui concerne les membres désignés à la première élection, les fonctions de trois membres prendront fin à l'issue d'une période de deux ans. Les membres dont les fonctions prendront fin au terme de la période initiale de deux ans sont désignés par tirage au sort effectué par le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe immédiatement après qu'il aura été procédé à la première élection.

Article 6

1. Le Comité siège à huis clos. Le quorum est constitué par la majorité de ses membres. Les décisions du Comité sont prises à la majorité des membres présents, sous réserve des dispositions de l'article 10, paragraphe 2.

2. Le Comité établit son règlement intérieur.

3. Le Secrétariat du Comité est assuré par le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

Chapitre III

Article 7

1. Le Comité organise la visite des lieux visés à l'article 2. Outre des visites périodiques, le Comité peut organiser toute autre visite lui paraissant exigée par les circonstances.

2. Les visites sont effectuées en règle générale par au moins deux membres du Comité. Ce dernier peut, s'il l'estime nécessaire, être assisté par des experts et des interprètes.

Article 8

1. Le Comité notifie au gouvernement de la Partie concernée son intention d'effectuer une visite. A la suite d'une telle notification, le Comité est habilité à visiter, à tout moment, les lieux visés à l'article 2.

2. Une Partie doit fournir au Comité les facilités suivantes pour l'accomplissement de sa tâche:

a l'accès à son territoire et le droit de s'y déplacer sans restrictions;

b tous renseignements sur les lieux où se trouvent des personnes privées de liberté;

c la possibilité de se rendre à son gré dans tout lieu où se trouvent des personnes privées de liberté, y compris le droit de se déplacer sans entrave à l'intérieur de ces lieux;

d toute autre information dont dispose la Partie et qui est nécessaire au Comité pour l'accomplissement de sa tâche. En recherchant cette information, le Comité tient compte des règles de droit et de déontologie applicables au niveau national.

3. Le Comité peut s'entretenir sans témoin avec les personnes privées de liberté.

4. Le Comité peut entrer en contact librement avec toute personne dont il pense qu'elle peut lui fournir des informations utiles.

5. S'il y a lieu, le Comité communique sur-le-champ des observations aux autorités compétentes de la Partie concernée.

Article 9

1. Dans des circonstances exceptionnelles, les autorités compétentes de la Partie concernée peuvent faire connaître au Comité leurs objections à la visite au moment envisagé par le Comité ou au lieu déterminé que ce Comité a l'intention de visiter. De telles objections ne peuvent être faites que pour des motifs de défense nationale ou de sûreté publique ou en raison de troubles graves dans les lieux où des personnes sont privées de liberté, de l'état de santé d'une personne ou d'un interrogatoire urgent, dans une enquête en cours, en relation avec une infraction pénale grave.

2. Suite à de telles objections, le Comité et la Partie se consultent immédiatement afin de clarifier la situation et pour parvenir à un accord sur des dispositions permettant au Comité d'exercer ses fonctions aussi rapidement que possible. Ces dispositions peuvent comprendre le transfert dans un autre endroit de toute personne que le Comité a l'intention de visiter. En attendant que la visite puisse avoir lieu, la Partie fournit au Comité des informations sur toute personne concernée.

Article 10

1. Après chaque visite, le Comité établit un rapport sur les faits constatés à l'occasion de celle-ci en tenant compte de toutes observations éventuellement présentées par la Partie concernée. Il transmet à cette dernière son rapport qui contient les recommandations qu'il juge nécessaires. Le Comité peut entrer en consultation avec la Partie en vue de suggérer, s'il y a lieu, des améliorations dans la protection des personnes privées de liberté.

2. Si la Partie ne coopère pas ou refuse d'améliorer la situation à la lumière des recommandations du Comité, celui-ci peut décider, à la majorité des deux tiers de ses membres, après que la Partie aura eu la possibilité de s'expliquer, de faire une déclaration publique à ce sujet.

Article 11

1. Les informations recueillies par le Comité à l'occasion d'une visite, son rapport et ses consultations avec la Partie concernée sont confidentiels.

2. Le Comité publie son rapport ainsi que tout commentaire de la Partie concernée, lorsque celle-ci le demande.

3. Toutefois, aucune donnée à caractère personnel ne doit être rendue publique sans le consentement explicite de la personne concernée.

Article 12

Chaque année, le Comité soumet au Comité des Ministres, en tenant compte des règles de confidentialité prévues à l'article 11, un rapport général sur ses activités, qui est transmis à l'Assemblée Consultative et rendu public.

Article 13

Les membres du Comité, les experts et les autres personnes qui l'assistent sont soumis, durant leur mandat et après son expiration, à l'obligation de garder secrets les faits ou informations dont ils ont connaissance dans l'accomplissement de leurs fonctions.

Article 14

1. Les noms des personnes qui assistent le Comité sont indiqués dans la notification faite en vertu de l'article 8, paragraphe 1.

2. Les experts agissent sur les instructions et sous la responsabilité du Comité. Ils doivent posséder une compétence et une expérience propres aux matières relevant de la présente Convention et sont liés par les mêmes obligations d'indépendance, d'impartialité et de disponibilité que les membres du Comité.

3. Exceptionnellement, une Partie peut déclarer qu'un expert ou une autre personne qui assiste le Comité ne peut pas être admis à participer à la visite d'un lieu relevant de sa juridiction.

Chapitre IV

Article 15

Chaque Partie communique au Comité le nom et l'adresse de l'autorité compétente pour recevoir les notifications adressées à son gouvernement et ceux de tout agent de liaison qu'elle peut avoir désigné.

Article 16

Le Comité, ses membres et les experts mentionnés à l'article 7, paragraphe 2, jouissent des privilèges et immunités prévus par l'annexe à la présente Convention.

Article 17

1. La présente Convention ne porte pas atteinte aux dispositions de droit interne ou des accords internationaux qui assurent une plus grande protection aux personnes privées de liberté.

2. Aucune disposition de la présente Convention ne peut être interprétée comme une limite ou une dérogation aux compétences des organes de la Convention européenne des Droits de l'Homme ou aux obligations assumées par les Parties en vertu de cette Convention.

3. Le Comité ne visitera pas les lieux que des représentants ou délégués de puissances protectrices ou du Comité international de la Croix-Rouge visitent effectivement et régulièrement en vertu des Conventions de Genève du 12 août 1949 et de leurs Protocoles additionnels du 8 juin 1977.

Chapitre V

Article 18

La présente Convention est ouverte à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe. Elle sera soumise à ratification, acceptation ou approbation. Les instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

Article 19

1. La présente Convention entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de trois mois après la date à laquelle sept Etats membres du Conseil de l'Europe auront exprimé leur consentement à être liés par la Convention conformément aux dispositions de l'article 18.

2. Pour tout Etat membre qui exprimera ultérieurement son consentement à être lié par la Convention, celle-ci entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de trois mois après la date du dépôt de l'instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation.

Article 20

1. Tout Etat peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation, désigner le ou les territoires auxquels s'appliquera la présente Convention.

2. Tout Etat peut, à tout autre moment par la suite, par une déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, étendre l'application de la présente Convention à tout autre territoire désigné dans la déclaration. La Convention entrera en vigueur à l'égard de ce territoire le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de trois mois après la date de réception de la déclaration par le Secrétaire Général.

3. Toute déclaration faite en vertu des deux paragraphes précédents pourra être retirée, en ce qui concerne tout territoire désigné dans cette déclaration, par notification adressée au Secrétaire Général. Le retrait prendra effet le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de trois mois après la date de réception de la notification par le Secrétaire Général.

Article 21

Aucune réserve n'est admise aux dispositions de la présente Convention.

Article 22

1. Toute Partie peut, à tout moment, dénoncer la présente Convention en adressant une notification au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

2. La dénonciation prendra effet le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de douze mois après la date de réception de la notification par le Secrétaire Général.

Article 23

Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera aux Etats membres du Conseil de l'Europe:

a toute signature;

b le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation;

c toute date d'entrée en vigueur de la présente Convention conformément à ses articles 19 et 20;

d tout autre acte, notification ou communication ayant trait à la présente Convention, à l'exception des mesures prévues aux articles 8 et 10.

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente Convention.

Fait à Strasbourg, le 26 novembre 1987, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats membres du Conseil de l'Europe.

ANNEXE

Privilèges et immunités

(article 16)

1. Aux fins de la présente annexe, les références aux membres du Comité incluent les experts mentionnés à l'article 7, paragraphe 2.

2. Les membres du Comité jouissent, pendant l'exercice de leurs fonctions ainsi qu'au cours des voyages accomplis dans l'exercice de leurs fonctions, des privilèges et immunités suivants:

a immunités d'arrestation ou de détention et de saisie de leurs bagages personnels et, en ce qui concerne les actes accomplis par eux en leur qualité officielle, y compris leurs paroles et écrits, immunités de toute juridiction;

b exemption à l'égard de toutes mesures restrictives relatives à leur liberté de mouvement: sortie de et rentrée dans leur pays de résidence et entrée dans le et sortie du pays dans lequel ils exercent leurs fonctions, ainsi qu'à l'égard de toutes formalités d'enregistrement des étrangers, dans les pays visités ou traversés par eux dans l'exercice de leurs fonctions.

3. Au cours des voyages accomplis dans l'exercice de leurs fonctions, les membres du Comité se voient accorder, en matière de douane et de contrôle des changes:

a par leur propre gouvernement, les mêmes facilités que celles reconnues aux hauts-fonctionnaires se rendant à l'étranger en mission officielle temporaire;

b par les gouvernements des autres Parties, les mêmes facilités que celles reconnues aux représentants de gouvernements étrangers en mission officielle temporaire.

4. Les documents et papiers du Comité sont inviolables, pour autant qu'ils concernent l'activité du Comité. La correspondance officielle et autres communications officielles du Comité ne peuvent être retenues ou censurées.

5. En vue d'assurer aux membres du Comité une complète liberté de parole et une complète indépendance dans l'accomplissement de leurs fonctions, l'immunité de juridiction en ce qui concerne les paroles ou les écrits ou les actes émanant d'eux dans l'accomplissement de leurs fonctions continuera à leur être accordée même après que le mandat de ces personnes aura pris fin.

6. Les privilèges et immunités sont accordés aux membres du Comité, non pour leur bénéfice personnel, mais dans le but d`assurer en toute indépendance l'exercice de leurs fonctions. Le Comité a seul qualité pour prononcer la levée des immunités; il a non seulement le droit, mais le devoir de lever l'immunité d'un de ses membres dans tous les cas où, à son avis, l'immunité empêcherait que justice ne soit faite et où l'immunité peut être levée sans nuire au but pour lequel elle est accordée.


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